Pills – Electrocaine

Posted in Chroniques on December 22nd, 2008 by Dat'


Testimony





Il y a des groupes, qui marquent un homme pendant son long apprentissage de la musique. Qui vous accompagnent dans les prémices de vos découvertes musicales. Les sorties se succèdent, et vous, vous les attendez, la bave au lèvre, vous foutant un coup de vieux à chaque fois. « Merde les gars, le nouveau Cd de xxxx sort la semaine prochaine, j’écoute ce groupe depuis que j’ai xxans » Puis, un jour, plus rien. On attend, on attend… On oublie. Mais on y pense, parfois, au détour d’un son, d’un disque, d’une idée, pour le laisser retomber dans les limbes de nos cerveaux.


Pills en fait parti. A changé, ou peut être dirigé à tout jamais mes goûts, pour tendre à ceux qu’ils sont maintenant. Foundation a été une grosse claque pour mes oreilles. Mais c’est réellement Electrocaine qui fut un choc, tant il s’éloignait des formats trop propres de la musique électronique de ces années là, tout en gardant un coté accessible pour le plus grand nombre. Mais le pire, c’est que Pills a été constamment brocardé, raillé, comme étant le suiveur, le copieur, le plagiat des Daft Punk et de leur culte Homework.
On ne compte plus les remarques à la con du genre « pourquoi tu écoutes Pills, alors que Daft Punk font mieux et 6 mois avant en plus… »

Alors Electrocaine gît dans l’ombre d’Homework, voir pour éviter de se limiter, dans un bon nombre d’autres morceaux issu de Jeanne Dark la French Touch. Mais Pills n’a jamais pu profiter de cette aura. Trop sale, trop crade, trop âpre… Il se démènera pourtant pour imposer un tube incontournable, « Rock Me », que TOUT français de plus de 20ans a déjà entendu au moins une fois dans sa vie, sans savoir qui en est l’artiste. Mais il restera l’éternel suiveur. Pourtant, Anthony Sandor, tête pensante de Pills a autant de bagage, si ce n’est beaucoup plus, que toute la clique précité au dessus. Pionnier de l’Electro / Rave en France, jouant à coté d’Underground Resistance ou Orbital, il a adoucit la recette sur ces galettes au milieu des années 90 lui permettant d’avoir une résonance internationale. Tout en gardant sa singularité, un son qui ne ressemblait pas vraiment à ces camarades de jeu.

Car là ou le reste des French Touchers se basaient sur les « Pouet pouet », le son de Pills lui, travaille, se base sur les claviers bien saturés. Et c’est, au final, ce qui fait toute la différence.














Pas la peine de s’appesantir sur la pochette cultissime du Cd, ni sur son titre qui ne pouvait pas être plus éloquent, pour mieux expliquer une donnée importante. Le texte est ici basé sur la deuxième édition du disque, celle qui comporte en plus deux morceaux énormes et incontournables dans la carrière d’Anton et son groupe, Super Harmony et The Avengers. Chopper la version initiale sans ces deux plus serait une hérésie. C’est dit.








On parlait de saturations. Ne vous attendez pas à du Merzbow en goguette, ou de la Nic Endo déchaînée. Elles sont ici musicales, agréables, l’exercice est dosé à l’extrême. Garden Party est bien l’un des meilleurs représentant du concept. Une ligne de Synthé bien saturée, virevolte, pour parfois siffler, monter dans les aigues le temps d’une seconde, et reprendre sa danse sans choquer. Puis tout s’énerve, un texte est déclamé avec fracas, et tout explose, on pousse les compteur à fond, le tout matraqué par un pied magistral. IMPARABLE. On est d’ailleurs obligatoirement étonné quand le titre chute dans un gros raz de marée de synthés presque Dance, donnant plus de clarté au titre, avant de subir le même matraquage qu’au début. De toute façon, pour être clair, la 1ere minute de la chanson forme l’un des ensemble, l’un des démarrage de Cd le plus marquant de ma courte vie d’amateur de musique électronique. Pourtant cela n’a l’air de rien aujourd’hui.


Le titre qui a peut être échoué dans certaines têtes, et qui pourra peut être dire quelque chose à certaines personnes, c’est Fun-K-Tronic, sans avoir provoqué la même déferlante que le plus gros succès de Pills. Il faut dire que son clip, où l’on voyait les dreads rouges d’Anton virer au Slime et envahir un immeuble entier, a fait parti de la rafle du CSA censurant d’une façon hasardeuse une demi douzaine de clips pendant l’age d’or musical d’M6. (Avec celui de Zazie, jugé effrayant, ou le Ma Benz de NTM notamment, pour citer les plus connus.) Devenu introuvable sur le Net aujourd’hui, je serais bien reconnaissant si quelqu’un trouvait sa trace quelque part, soit dit en passant.
Reste que d’un point de vu stricto musical, si le mot « Groove » n’a pas été inventé pour ce titre, c’est qu’il y a un problème. Rythmique simple, sautillante, avec quelques bruits incongrus, Fun-K-Tronic ferait danser un mort. Mais là ou le titre prend toute son ampleur, c’est à l’arrivé d’une ligne crade comme jamais, qui commence à s’infiltrer dans cette allure trop simple, pour pervertir le morceau, le rendre complètement impropre à la consommation pour les oreilles pré-pubères, jusqu’à titiller l’âpreté la plus totale en essayant de monter au maximum. On imagine bien Anton essayer de dépasser le maximum permis par sa mollette à effet. Ca crie, ça hurle, c’est juste trop bon.









Passons à ce fameux tube donc, Rock Me Qui retournait notre TV à chaque fois qu’une pub pour une fameuse banque passait. Qui éclatait la rétine avec son clip de cinglé, ou l’on découvrait un véritable psychopathe torturer ses machines. (A voir en fin de page).
Reste que ce titre résume bien, en plus policé, en plus simple mais en tout aussi percutante la recette de Pills sur Electrocaine. Des lits de sons crades plus ou moins poussés, surplombés d’un Beat ultra massif, à faire trembler vos murs. D’une pêche incroyable, tout en étant fédérateur au possible, le morceau, petite réussite en lui-même, n’a pourtant jamais brassé le public plus loin que cet essai là, même si la suite a permis au groupe de jouir d’un succès non négligeable. On aime Rock Me mais on ne creuse pas. Et ce n’est pas faute d’avoir essayé, l’album comportant 4 titres ayant fait leur petit effet, Rock Me, Fun-K-Tronik et les deux inédits que l’on verra par la suite.








Reste que le son du groupe ne se limite pas à de petites déflagrations directes et sans compromis, et l’on tombe sur des petites perles bien plus obscures comme le bien nommé Black Pearl, où un chant Africain va se faire littéralement balayer au bout d’une minute par une vague de saturations, par des véritables cris extirpés d’une machine déchirée en deux. Sans oublier le martelage de rigueur à défriser le caniche de votre voisine. Le tout s’étendant sur plus de 6 minutes. Une vraie course d’endurance.

Dans le même genre, en moins agressif, Darkside remplie parfaitement son office : Intro hypnotique, avec son rythme appuyé et ses nappes oppressantes, il va se laisser petit à petit submerger par un gimmick Acid se tordant dans tout les sens, rêche comme la mort. Parfaite bande son pour une course poursuite dans un film d’anticipation, on se laisser perdre dans ses distortions semblant passer par toutes les fréquences disponibles sur une boite à rythme…

Mais Pills ne joue pas qu’avec les Scriiiiitttfzzzzzz, et peut verser dans le pachydermique avec Hurricane. Apres une intro excellente, où des vagues de voix saccadent pour échouer sur un beat énorme. Le tout se déroule pour lâcher des guitares énervées. Ok on ne fait pas dans la dentelle, c’est gras, mais cela reste suffisamment plaisant si l’on ne gerbe pas le trip F-zero.

On regrettera juste le Hip-hop mollasson de Drug-Store et la tentative de musique pour raffermir vos abdos fessiers avec Free Step.








Reste que les deux titres supplémentaires rattrapent ces petits écueils. The avengers est la version remixée du thème de chapeau melon et botte de cuir, à l’occasion de la sortie de l’adaptation au cinéma de la fameuse série. On ne s’étendra pas sur la qualité douteuse de ce long métrage pour se faire littéralement éclater la gueule par ce titre. Tout le monde connaît le sample de trompettes tiré de la série, rapidement surplombées par un beat énorme, ultra crasseux, poissard comme jamais. En gros, on alterne entre attentat contre la bande santé de nos enceintes et moments de calmes avec ces cuivres reconnaissables entre mille. Une bombe.

Super Harmony fait aussi parti des morceaux du groupe qui ont quelque peu trainé sur les ondes. Pas étonnant, tant ce dernier est un autre tube en puissance, à retourner n’importe quel club encore un peu exigeant. Un rythme énorme, un phrasé qui va plomber les têtes pendant des jours, et une montée en puissance qui saccagera 95% des bassins ici présents.
Je serai curieux de voir l’effet de ce titre s’il était sorti l’année dernière, tant la recette est efficace. Imparable².

Le CD étant à écouter vraiment avec un volume puissant, pour donner une vraie ampleur aux differentes tessitures.












Marrant qu’avec tout cela le groupe soit dans les limbes de l’oubli maintenant. Pourtant il a réussi à faire mieux en 2000 avec le petit chef d’oeuvre Musicsoldia (on en reparlera) qui était sorti en grande pompe au Virgin des champs, sans être appuyé par un single marquant, malgré des Feats bien sentis comme le dieu Lee Scratch Perry. Echec ou non, aucune idée, mais l’on a plus vraiment entendu parler de ce disque quelques temps après sa sortie, dommage vu la qualité et la richesse impressionnante de ce dernier (Bien plus que le Electrocaine que l’on traite ici, et que l’on trouve n’importe ou pour une bouchée de pain, raison de plus pour foncer)
Puis plus rien pendant quelques années.

Mais quelques temps plus tard, on surf sur le net, et l’on voit que Pills sort un nouveau single. On scrute, on choppe des extraits. Mais l’album, Cosmic Carnival ne sort pas. Pourtant, par pur hasard, je mets la main dessus, un jour. Vous n’imaginez pas ma joie. Voir un alien descendre en plein milieu de ma rue ne m’aurait pas fait autant écarquiller les yeux que pendant le moment ou je tenais la galette.
Bref je possède (le mot est important) ce disque, et je ne l’ai pourtant JAMAIS recroisé de ma vie, dans un magasin, sur le net, P2P ou autre, excepté les sombres rayons de sites d’enchere… Il n’est référencé nulle part, même pas dans l’ultra exhaustive banque de donnée Discogs…

Là est tout le paradoxe de l’admirateur. La joie de posséder un objet qui n’existe pas. Ou plutôt qui existe, mais que presque personne ne semble pouvoir acquérir. Et la tristesse de se dire que vous êtes l’un des seuls à en soupçonner l’existence.



Le pire dans tout ça, cest quand préparant ce texte, jai fais des recherches. Clips maintenant introuvables excepté l’inénarrable Rock Me, références presque disparues du net… Mais au milieu, tel un oasis, après avoir pourtant retourné le net pendant 3 siècles il y a quelques mois, (quand ça vous prend) je viens de me rendre compte que le groupe semble renaître discrètement de ses cendres, avec son label Scaffy Traxx… Un truc est même sorti en 2006 (quoi? où?) et je n’étais pas au courant. Les derniers titres ont l’air excellents. Certaines personnes possèdent donc une marche de plus, dont je ne soupçonnais pas une seconde l’existence.


Alors je bénis ces pages une fois de plus, car il me permet aujourd’hui de retrouver un type que j’ai toujours profondément respecté, et qui a défini un peu de mon mode d’écoute actuel, même si je suis passé à des choses bien plus secouées.

Mais serais-je à ce point amoureux aujourd’hui de la musique complètement escarpée et accidentée si je n’avait pas autant apprécié les teintes abrasives, les sons crades et les claviers saturés proposés par Pills sur ses productions ?




Electrocaine est pour moi l’un des meilleurs albums français de musique électronique simple et frontale, et je soutiens cela depuis maintenant presque 10 ans.



Arf, les amours de jeunesse



























12 Titres – Mercury
Dat’








Fog – Fog

Posted in Chroniques on December 18th, 2008 by Dat'


I want to sit and stare and stare and stare into space







Fog porte bien son nom. Où tout du moins, portrait bien son nom. Car son premier disque ne ressemblait à pas grand-chose de connu, à sa sortie. Un brouillard, de sons, d’intentions. Et contrairement à pas mal de disques qui se retrouvent avec une étiquette de “défricheur” ou “d’unique”, la musique de Fog est loin d’être alambiquée, ultra perchée et vertigineuse. Comme quoi, on peut innover sans être enseveli par les drogues.

Pourtant, Adrew “Fog” Browder avait rien de spécial, faisant parti de ses milliers d’américains un peu mélancoliques, sans avenir, qui se retrouvent à triturer de la musique dans leur garage, faute de mieux. A ruminer sur le pâté de maison décrépis, sur d’anciennes histoires de coeurs et autres doutes amplifiés par l’ennuis. Mais plutôt que de simplement pousser la chansonnette dans sa chambre, le monsieur va, pour faire une tambouille au départ énigmatique, sans réelle structure, lancinante et mélancolique. Aux grés de ses pérégrinations, il va même rencontrer Dose One, qui va le présenter à Ninja Tune, permettant au label de compter un zozo de plus dans ses rangs.

Fog aurait pu être un super chanteur-compositeurs de pop s’il avait eu les moyens de se payer un quatuor de cordes, quelques vocalists de renoms et un super studio à Liverpool. Manque de pot, le bonhomme ne pourra qu’acheter divers instruments avec son argent de poche, accumulant un bordel visible dans le livret (Qui a aussi le bon goût de recenser les textes parfois énigmatiques de l’album), pour accoucher d’un premier disque utilisant majoritairement une boite à rythme, une gratte et une platine. Un Self titled fait avec trois bouts de ficelles, qui accueille discrètement deux guests de haute tenue, pour les plonger dans un disque qui semble être foutu au micro-onde. Le genre d’album qui donne l’impression d’avoir passé des années dans un rayon de disquaire perdu, au fin fond d’une cave, avec trois centimètres de poussière dessus. On souffle, on souffle, et l’on découvre quelque chose de lumineux.




















L’intro, World of Advice est assez étonnante, ne reflétant pas vraiment ce que contient le disque, tout en se payant le privilège d’inviter MF Doom, ce dernier déclamant un discours sur des bruits bizarres. Point de freestyle enflammé, on lorgne plus dans le trip “Dumile te lit une histoire avant de dormir”. C’est tout. Je crois que c’est le seul disque au monde qui se paie le privilège de ne rien faire du tout avec un feat de Mister Doom. Le morceau est directement imbriqué dans The Smell Of Failure, pièce encore plus hermétique, faite de bruits de vinyles ultra ralentis, similaires au bruit du vent filant hors de notre maison un soir d’hiver, que l’on entendrait bien au chaud dans son lit, avant de dormir. On distingue quelques voix, quelques parasites, mais rien de plus probant. Bref, il y a de quoi flipper un peu à la fin des premiers titres, en se disant que l’on vient de tomber sur un disque completement abscons, faisant fi de la notion de mélodie et de rythme.

Et c’est la que débarque Pneumonia première vraie pièce du disque, et morceau qui embrasse le concept de Fog au mieux, celui qui va se retrouver tout au long de la galette. Ce concept, c’est un semblant de Pop-song dérouillée, avec un chant tout gringalet, qui se retrouve plonger dans une vague de parasite, avec une présence accrue de Scratchs et autres incursions platinesques. Le tout pilonné par un rythme un peu claudicant, un peu décalé, qui semble s’incruster dans le morceau sans se soucier réellement de la cohérence de ce dernier. Enfin, on pourrait prendre le problème dans le sens inverse et dire que Fog, c’est un beat, des couches de bruits et pleins de scratchs parasités par une gratte et un chanteur neurasthénique. Comme si Clouddead se serait mit à la pop, sans délaisser les brumes de leur premier disque.
Reste que ce morceau est un vrai bijoux, un alien distillant une mélodie à pleurer, tout en flirtant avec l’anodin, chapeauté par des paroles résignées, à base de In the bathroom, with the shower running and my clothes on / I figured out that I hate you all. La moitié du morceau avance vers nous en boitant, nous donnant presque envie de le prendre dans nos bras, tant la fragilité du tout semble évidente. Il suffirait de souffler sur la chanson pour qu’elle parte en lambeau, que les ingrédients tombent inanimés, tant l’image du petit gars triturant ses machines dans sa chambre nous saute à la gueule. Mais voila que le tout part en vrille, fonce vers le ciel, avec des scratchs affolés qui accompagnent une rythmique plus lourde, pour un écrin plus joyeux, plus bordélique, comme si le bonhomme décidait finalement de sortir de son gourbi pour courir dans les champs en se marrant comme un gamin. C’est tout simple, mais pourtant super joli, presque touchant, et étonnant de part ce mélange improbable entre scratchs miteux, beats étranges, guitare et chant anémiés.

Fuckedupfuckfuckup (tout un programme) se la jouera abstract hiphop oldschool décharné, avec ces samples de vieux vyniles d’avant guerre dérouillés par des parasites. Mais c’est Check Fraud qui renouera avec la candeur de Fog, laissant une guitare acoustique se faire laminer par des scratchs un peu bourrés et un rythme bien appuyé, gagnant petit à petit en reverb. On croirait entendre un Kid Koala qui aurait délaissé ses samples bizarres pour une ligne mélodique évidente, simpliste et poignante. Les scratchs sont d’ailleurs un peu basés sur le même type de procédé, triturant des samples surpitchés, donnant un aspect vieillot aux mélodies, comme si Mix Master Mike tentait de faire un Dj Set avec un vieux gramophone. Les scratchs de Fog semblent d’ailleurs tout simplistes, fait par un débutant qui n’aurait qu’une platine et un changeur de pitch, et feront bien rigoler les amateurs de haute voltige turnabilistique. Mais ce coté tout raté, tout simple et fait avec les moyens du bord, imprime un charme qui colle parfaitement au disque, donnant un coté lancinant et mélancolique au tout, accompagnant à merveille les petites litanies distillées ici et là.










Un peu plus loin, Glory pétrira le coeur des plus émotifs, avec une belle mélodie constituée de clochettes et de violons, fracassés par des écarts toujours issus de vinyles bien torturés. C’est DoseOne qui va poser sa voix sur le tout, balançant un Spoken word alangui avec son teint reconnaissable entre mille, tentant de se faire entendre sans élever la voix, au milieu de ce bordel passé en Slow Motion. La chanson a un aspect completement artisanal, cette dernière ayant toujours un élément déphasé par rapport aux autres, comme ce violon qui va partir dans les cieux alors que le morceau ne s’emballe pas vraiment, ou ce rythme qui semble être callé en live, à la main, pendant tout le morceau, sans se soucier des millisecondes de décalages qui pourront être décelées par l’auditeur.


Mais Fog sait aussi lâcher un peut les chevaux, et partir sur des contrées un peu plus secouées, comme avec l’immense Ghoul Expert, qui s’ouvre sur une guitare à pleurer, et une pulsation sombre et prenante, faisant passer le vinyle trituré pour des battements de coeur. Des scratchs plus incisifs se font entendre, mais le morceau avance tranquillement, la tête baissée, comme empli de regrets et de chagrin. Folkin’ & Scratchin’. La voix de Broder est plaintive, presque en symbiose avec les multiples vrombissements du morceau, on croirait presque entendre un titre de Radiohead remixé par Odd Nosdam. Et vlan, voila que de cordes cristallines permettent d’embrayer sur une envolée à crever, entre gratte, triturages de vinyles, bruits bizarres et pleins de choeurs fantomatiques, de plus en plus secoués par une guitare électrique.

Dans le même genre façon je-vais-rompre-ta-colonne-vetebrale-d’un-coup-sec, Fool remplit parfaitement son office. La première moitié du morceau, énigmatique, laisse courir scratchs et mélodie façon boite à musique dans une grotte qui débouche sur le centre de la terre. On dodeline de la tête, on se laisse happer par cette atmosphère sombre, hypnotique, on ferme les yeux. Gouffre, un beat pachydermique déboule, défonce le morceau, le catapulte sur une gratte rageuse. Les vinyles s’enflamment, les chétifs grognements se transforment en brûlante armada, ça crisse, ça vrille, ça crache. Encore une fois, le titre ne repose sur rien, ou presque, mais la claque est violente.

Hitting The Wall pourra lui se prévaloir d’être le morceau le plus déstructuré du disque, jouant constamment sur les ruptures et changements de ton. La ligne de basse est bien poisseuse, le rythme imparable et le chant façon mégaphone, le tout zébré de scratchs hors contrôles, qui fusent un peu partout, comme si ces derniers tentaient de s’échapper du disque, en passant par vos oreilles. Le morceau se stoppe, reprend de plus belle, s’éteint de nouveau, laisse perler quelques samples d’avant guerre, avant de partir dans une dernière bronca. Tout le contraire de la conclusion And Stay Out, dont le joli début de chanson en duo piano-voix va petit à petit se faire bouffer par des saturations cradingues, finissant dans l’abstraction la plus totale.












Difficile de ranger le disque dans une case, ou de lui apposer une définition stricte. Les magasins ont du pas mal se gratter la tête en recevant ce Fog, même si le label Ninja Tune pouvait faciliter les choses. Sans trop risquer de se tromper, on pourrait évidemment évoquer Clouddead et Kid Koala (dépressif) pour le coté électronique brumeux et les scratchs à tout va. Mais il y aussi ce coté Pop folk sans argent, genre Panda Bear coulé sous 6 mètres de béton, en lambeau à cause des radiations, qui imprègne la majorité du disque. D’ailleurs, depuis quelques années, Fog est sorti du brouillard, devenu groupe, et tape dans le Rock pop indé qui part dans tous les sens, tout en étant signé sur Lex Record, autre bastion du Hiphop dérouillé. Le son est plus propre, plus ouvert. Il peut se payer des guitares à doubles manches, des choeurs gospel et des solos de xylophones hydrauliques.


Ce premier disque de Fog garde lui ce coté cradingue, ce coté amateur, ce coté touchant car fragile, poignant car cramé. Car tout semble cramé dans cette galette. La guitare, anorexique, est foireuse. Le chant, à peine plus soutenu que celui d’un oisillon passant sous une roue de vélo, est foireux. Les beats, décalés et boiteux, sont foireux. Les scratchs, simplistes et hasardeux, semblent foireux. La donnée intéressante, c’est que beaucoup de sons semblent être dirigés par un coté aléatoire. Les métronomes basés sur des scratchs ne sont au final jamais vraiment les mêmes (comment reproduire parfaitement la même sonorité deux fois, sans la sampler?), et s’enrichissent d’une facette toujours en mouvement, menacée par les bugs, par le faux mouvement, par la glissade qui foutra tout par terre.
On a l’impression d’écouter un numéro d’équilibriste branleur, un mec qui semble assuré dans sa composition de petites litanies touchante, caressant ses vinyles en tirant sur sa clope, l’oeil torve, alors qu’un simple mouvement de la main trop appuyé pourrait tout foutre par terre. Le pire, c’est qu’avec tout ça, Fog arrive à pondre des morceaux qui filent la frousse, crachant sans ménagement leur beauté cristalline, ensevelie derrière ces lourds manteaux de parasites.

Un album tout cabossé, qui s’écroule si l’on tire les éléments les uns après les autres, est magique lorsque tout se retrouve en symbiose. Il ne faut surtout pas aborder ce disque avec une oreille de technicien tatillon, mais bien avec la volonté de rêver, de s’abandonner dans ses comptines flinguée et abstraites.




Ce Fog, c’est un peu une déclaration d’amour aux Home Studios, aux bidouillages anodins dans une chambre miteuse, alors que les parents ronflent à moitié devant Tout le monde en parle, à l’étage en dessous, un samedi soir.
A ceux qui se font chier toute la semaine, et qui finiront cette dernière prostrés devant leur MPC, à chercher des samples sur des vieux disques pourris trouvés dans la cave de pépé. Aux chanteurs torturés qui ne peuvent vivre une journée sans claquer quelques accords sur une guitare loqueteuse en susurrant des mélodies tristes, tout en rêvant de pouvoir, un jour, dresser les cheveux de cent personnes en faisant un concert. A ceux qui ne peuvent s’empêcher de faire un petit bruit de scratch ou de beatbox avec leur bouche en écoutant à la radio un titre assommant, en se disant que cela pourrait être cool de remixer ce dernier, pour tout oublier la seconde d’après. Aux musiciens qui compensent leurs petits moyens par une débrouillardise, une densité et une saleté sonore effarante, sans jamais sacrifier l’émotion qui perle du marasme.

En gardant, envers et contre tout, la volonté de ne rien faire comme les autres.

Une petite perle comme on en fait peu…













Fog – Pneumonia









13 Titres – Ninja Tune
Dat’











Bomb The Bass – Future Chaos

Posted in Chroniques on December 13th, 2008 by Dat'


BooBs & Heartbreak






Bon l’article ne devait pas nécessairement atterrir dans ses pages, mais 3 mois après sa sortie, il m’est encore impossible de me détacher de ce disque. Il était alors bien dommage de ne pas en parler un minimum ici avant cette fin d’année.

Alors, je ne le savais pas vraiment il y a encore quelques temps, mais il parait que Bomb The Bass, fin 1980, a révolutionné son petit monde, faisant parti des premiers à introduire le Sampling dans ses compositions, donnant même un nouveau visage au Hip-hop et à l’électro anglaise. Grosses bombes Acid Techno, Hip-hop vrillé, Bomb The Bass a enflammé plus d’un tympan, avant de se taire au début des années 90, et de produire certains grands d’aujourd’hui, comme Neneh Cherry ou l’album Ultra de Depeche Mode. Bref, Tim Simenon est une petite légende, et une influence certaine pour un nombre incalculable de groupes actuels (les nerveux de dDamage lui ont d’ailleurs rendu hommage en reprenant l’artwork de Into The Dragon, réadapté par Raoul Sinier ) Personnellement, malgré une overdose de musique électronique, j’ai completement loupé cette période. J’étais trop occupé à finir Battletoads et Cool Spots en écoutant Prodigy, ou finir mes devoirs avec du Dr Alban à fond dans ma chambre. C’était le bon temps, celui de l’insouciance, des cartables trop lourds, des parties de foot et des blagues téléphoniques. Bref, tout ça pour dire que je n’avais pas l’age de traîner en rave, dans des sous-sols morbides en gobant des cachetons d’ecstasy, mais plutôt celui de prendre un pain au chocolat en regardant salut les musclés.


Les retours façon faille spatio-temporelle, j’aime bien quand j’ai vécu le truc. 10 ans pour Portishead, accouchant au final d’un disque sublime, j’approuve. 8 ans pour Leila, qui nous balance un simulateur d’arrachage de coeur sur 60 minutes, je suis fan. Mais un mec que je ne connais pas et qui reviens 15 ans après avoir bousculé les premières sphères d’une musique électro festive, j’ai un peu peur. De me retrouver devant un truc un peu ringard, un peu cheap, un peu chiant avec des piiiiouuuu piiiouuuu et des ziioup ziioup. (Et dieu sait si j’aime ça pourtant, je radote sur les synthés putes et les trucs semi-foireux)
Mauvaise intuition : Ce nouveau disque prend à contre-pied les idées que je pouvais me faire de ce retour. Et se révèle être un vrai diamant. Derrière ce Future Chaos presque trop véhément se cache un album d’une beauté absolue, foncièrement électronique, assez pop. Tous les titres du disque accueillent un chanteur, avec la très belle voix de Paul Conboy (sur 5 morceaux), les Fujiya & Muyagi ou Mark Lanegan (ex Queens Of The Stone Age)
Et les petits chanceux qui se dépêchent peuvent encore chopper l’édition avec deux disques, l’album étant accompagné d’une galette de remixes.




















Le concept cerne facilement, (Il est au final décliné, pour simplifier, sur tout le disque, ne vous attendez pas à tomber sur une cavalcade tribale rock ou un attentat House) et cela dès le premier titre, Smog : Grosse ligne de basse, qui vrombit méchamment, chapeautant les choeurs de P. Conboy. Les Beats sourds se greffent à l’ossature, des nappes coulent en parabole, et le chanteur égrène d’une voix pas si éloignée d’un Thom Yorke (en plus grave) un texte plutôt mélancolique, seyant parfaitement à l’ambiance du tout. Rien de spécial, pas d’explosion, pas de charge rythmique, pas d’esbroufe. On plane, on rêve, ça s’immisce dans vos synapses, c’est mi-sexy mi-malsain, un peu langoureux, un peu cradingue. Et pas mal de morceaux peuplant ce Futur Chaos suivent cette démarche, à l’instar du faussement joyeux Butterfingers, funk salace qui pue “l’après éjaculation” bien dépressive. L’une des têtes de Fugiya & Miyagi s’en donne à coeur joie sur ce chapelet de bleeps tortueux, chuchotant d’une façon désintéressée tout en lorgnant sur une carcasse de mannequin la bave aux lèvres.


Bomb the Bass semble parfois avoir des difficultés à contenir ses vieux démons, et l’on sent une rage contenue tout au long du disque, tant dans les lignes de basses ronflant comme des moteurs, ou certains beats plus appuyés. Assez drôle d’entendre sur Burn The Bunker un Tim Simenon qui refrène ses ardeurs, balançant une base en fusion semblant prête à exploser à tout instant. Ca prend le coeur, ça gronde, les couplets pleins de tensions préparent le terrain, on a l’impression de se retrouver dans une montée perpétuelle, précédant l’explosion libératrice, celle qui vous fait sauter dans tous les coins en levant les bras et en criant que la vie c’est super cool, surtout quand on vient de se prendre un camion sonore en pleine face. Que nenni, les chiens ne seront jamais lâchés, ils se contenteront de tempêter comme des damnés au bout de leurs laisses. Le morceau se dérobe, nous laissant con, toujours dans cet état de tension, bousculé par un morceau qui secoue, qui fourmille, sans jamais nous exploser à la gueule. On sent la frustration, le mec qui a envie de pêter les plombs mais qui se refrène au dernier moment, inconsciente barrière qui l’empêche de baiser comme un sauvage.
Il caresse, il embrasse, il pince, il bouscule même, mais ne pénètre pas. Il transpire et fantasme sur sa copine qui prend sa douche, végétant en se laissant bercer par l’eau qui coule dans la salle de bain.
Old John jouera sur la même frustration / excitation, en plaçant marteler nos oreilles avec un gros pied techno, plus quelques zébrures saturées de rigueur. Depeche Mode qui enregistre son nouveau titre dans une machine à laver. Attention point de lassitude en ces contrées, tant le tout est bien foutu, empli de surprises, de bugs et d’embuscades sonores. Car les morceaux du disque, sous leur apparence parfois méthodiques, ont toutes une propension à craquer, vriller, bugger. Les mélodies s’écrasent, les rythmes se décalent, s’embrasent, s’emballent. Il n’y aura bien que Fuzzbox pour se lâcher et enfin éclater, partant dans une Drum & Bass presque noisy, avec des voix perlant de tout les cotés, saturées et passées au chalumeau.










Mais c’est justement quand Tim Simenon accouple beauté pure et parasites électronique que l’album en sort grandi, avec deux trois pop-song-experimentalo-electroniques de toute beauté. So Special évidemment, l’une des plus belles excavations de ce Future Chaos, avec son début cristallin, devenant mirifique quand mélodie et rythmes choisissent de se tenir la main. Paul Condon (encore lui) chante d’une façon aussi sexy que désespérée sur un rythme rond, entraînant, imparable. Ce morceau pue les larmes et le foutre, c’est la bande son parfaite pour illustrer un club de striptease décrépi, en fin de règne, là où des âmes perdent leur vie à sucer celles des autres. (Marrant d’ailleurs, le clip sorti quelques semaines après a confirmé mes dires) Cette pop sombre agrippe le corps et le coeur, s’immisce dans vos sinus, vous obligeant à dodeliner de la nuque en fermant les yeux et laisser vagabonder vos pensées sur des images plus ou moins inavouables. Un vrai petit chef d’oeuvre.

Un peu plus loin, le sublimissime Hold Me Up, convoque les forces sacrées de choeurs spectraux, enveloppés dans un manteau synthétique à tomber à la renverse. Condon est angélique, ça ondule dans les oreilles avec une grâce et une pureté absolue. Il y a une détresse évanescente qui brise l’échine, un abandon vers les nuages qui crachent leur mélancolie comme jamais. Morceau en suspension, brumeux, presque trop solitaire dans son écrin, qui brille de mile feu avant de s’éteindre petit à petit, se transformant en simple point lumineux dans une nuit trop noire. Le tout ne ferait pas tache dans un The Eraser.


Et comment ne pas parler de Black River, feat Mark Lannegan, ex Screaming Trees & Queens Of The Stone Age? Déjà car la voix, rocailleuse, profonde, tue sa maman en huit. C’est un fait. On entend ce mec, qu’on demande illico à la petite souris d’avoir le même organe à la prochaine dent perdue, pour pouvoir draguer tout le monde juste en parlant, et gagner plein de fric en collant son timbre grave sur des pubs débiles. Mais surtout parce que la chanson en lui-même ne s’embarrasse pas de fioriture inutile : on tient là le titre le plus direct, le plus simple de l’album, mais aussi le plus lumineux. On s’approche presque de la pop-song électro rêvée par pas mal de groupes : tout en apesanteur sans en chier des tonnes, belle sans devenir larmoyante, habitée sans être irritante. Equilibre parfait entre chant à tomber, nappes aériennes et beat cérébral. Enorme.











Ce disque n’a rien de spécial. Il n’invente rien, n’apporte rien de nouveau, ne surprend pas des masses. Si l’on aborde le disque d’une façon rapide ou désintéressé, on ne pourra y voir qu’une enfilade de pop-song Technoïsées. Pourtant, tout y est effectué à la perfection. Tel un venin, chaque morceau vous monopolise durant une journée entière. On y revient sans réellement y penser, si l’on se donne la peine d’être dans les meilleures dispositions possibles. Simple aide pour sauter dans état d’inconscience salvateur ou véritable arme de la tranquillité absolue, ce Future Chaos se révèle être un vrai bonheur.


Bonheur sombre certes, difficile d’accès, torturé aussi… Ce disque oscille constamment entre stupre et larmes, foutre et sanglots, levrette et solitude. Vicieux et vicié. Le mannequin qui se frotte à vous avec une lingerie irrésistible, tout en ayant la moitié du visage brûlée. Il est diablement sexy, tout en étant triste et résigné.
L’atmosphère parfaite pour aborder ce disque, c’est de te mettre dans ta chambre, avec une lumière rouge pourpre pour seul éclairage, et mater lubriquement la voisine en mode porno, tout rideaux ouverts. Tout en pensant constamment à ton ex, morte dans un accident de la route.


Et dans le genre electro-pop, il écrase à coup de talon toutes les tentatives passant sur ses plates-bandes, du nouveau Milosh au dernier Popnoname, alors que ces derniers sont déjà de petites merveilles. De part la qualité de ses compositions évidemment, mais surtout par ce coté sale et âpre, qui ne quitte jamais le disque.


Affolant dans son envie de nous faire trembler les intestins, de nous filer des fourmis dans la nuque, tout en nous embuant le cerveau d’une mélancolie incessante.














Bomb The Bass feat Paul Conboy – So Special











Bomb the Bass feat Fujiya & Miyagi – Butterfingers












9 Titres – !K7
Dat’











Mondkopf – (Declaration of) Principles

Posted in Chroniques on December 6th, 2008 by Dat'


Depth Can Dance







Le Myspace de Mondkopf fait parti des rares pages du site que j’ai squatté pendant plus d’un an, à grappiller chaque nouveau son, en attendant en vain que le bonhomme sorte une galette proposant ses titres, à l’instar d’un Nil qui avait su nous faire patienter d’une façon presque sadique avant son premier Ep. D’ailleurs, comme ce dernier, Mondkopf a pas mal usé les bancs d’Infratunes avec ses avatars, avant d’envahir le net. Grâce des remixes tout d’abord, par une énorme refonte d’un morceau de Johnny Cash, puis des petites perles fracassant Jamie Lidell ou Adam Kesher.
Mais c’est avec une composition perso que le gars m’avait foutu la colonne vertébrale en l’air, Ave Maria, sorte de complainte lunaire uniquement constituée de synthés à filer le vertige, sans rythme, qui t’envoyait directement mourir sur la lune avec un drapeau dans le cul. Ce titre, plus d’autres petites bombinettes assurant le grand écart entre messe techno du dimanche midi et Trance droguée, ont donc vite conduit à faire fumer le lecteur myspace du susnommé. A dire vrai, il avait même déjà sorti une galette (introuvable) sur une toute petite structure.


Et voila que Mondkopf signe sur Fool House, pour sorti un bon gros Ep. « Fool House ? Connais pas !» vous allez me dire. Certes. Mais Fluokids, vous connaissez sûrement. Et c’est là que le tout devient intéressant. Fluokids, que l’on peut clairement proclamer comme Ze audioblog français, adulé ou décrié, cité de partout, voir même devenu nom commun pour tout et n’importe quoi (à quand l’entrée dans le Larousse ?), a connu en 3 ans une expansion assez affolante. Si bien le blog se mue en structure et tente l’impossible : Ouvrir un label.
Intéressant paradoxe. Là où les audioblogs semblent être proclamés comme futur de la diffusion musicale, le futur de l’audioblog serait-il le label, qui vendrait ses sorties (digitales ou disque) sur le net ? Je veux dire, le tout ne serait qu’un cycle se mordant indéfiniment la queue ?

Les habitués de ces pages doivent avoir deviné mon matérialisme presque psychotique en terme de musique, et cette ouverture de label est quelque chose que je trouve particulièrement pertinent, dans la démarche tout du moins. Surtout que Fool House / Fluokids a l’intelligence de ne pas se fondre dans une structure qui va tenter de surnager vite fait, pour finalement crever dans 1 ans à cause des méchants distributeurs. Nop, l’axe, évidemment influencé par le vaisseau mère Fluo kids, se base sur la rareté, sur le one shot, sur le stock limité (500 ex à chaque sortie), tout en arrosant plus allégrement les petits lecteurs affamés de mp3 grâce à une sortie digitale. En gros, vous aimez l’objet et le concret, il y a possibilité d’acheter le disque, et si vous avez I-tunes en intraveineuse, c’est ok aussi.

Bref, en plus de faire un choix un peu gonflé (Si la pratique se multiplie, j’entends déjà des majors en pleine dépression hurler que des blogs qui ouvrent des labels, c’est l’hôpital qui se fout de la charité) et de proposer un twist inattendu (Shyamalan, tu peux t’en inspirer dans ton prochain film), Fool House a le bon goût de ne pas se la jouer strictement digital. Je vais suivre la suite du label avec pas mal d’intérêt, ne serait-ce que pour la démarche…



















(Declaration of) Principles, c’est d’abord 3 titres de Mondkopf, avec Sainte gros rouleau compresseur qui se pointe en premier pour flinguer les tympans. Ligne un peu crade, gros synthés trançouilles. Cool. Mais c’est surtout ce kick monstrueux qui choque, qui bastonne, qui bouscule, qui pilonne, qui viole littéralement le morceau. Un truc ultra massif, à rendre fou un immeuble entier, à faire danser la polka à tes enceintes, crise d’épilepsie. Mon voisin est allé voir un psychologue. On en viendrait presque, sans casque, à passer à coté de la mélodie toute fragile, cristalline, perdue dans ces méandres affolants, pour se focaliser simplement sur cette pulsion pachydermique, presque hors norme quand les basses sont poussées au max. C’est comme assister à l’une orgie dans une salle de concert, avec une armada de têtes cramées qui dansent, sautent, baisent, se roulent dans le foutre en hurlant à la mort, et au centre, une petite tête candide anémié qui chantonnerai une mélodie cristalline, imperturbable parmi toute cette aliénation. Et quand Mondkopf nous octroie un peu de répit, en mettant en avant le clavier bien granuleux, c’est pour mieux nous renverser la seconde qui suit. Party Traumatic.

Christmas se la jouera encore plus earthquake-simulator, tout en étant moins cramée que sa jolie copine du dessus. Le pilonnage est moins massif, contrebalancé par une ligne de basse gargantuesque offrant au morceau un tapis sourd et écrasé, comme si mille éléphants se mettaient à ramper frénétiquement pour essayer de te chopper le mollet. Le tout pouvant convenir autant à des fêtards en manque de coups dans le bide, qu’à un groupe de Hiphop consommateur d’héroïne cherchant une instrue parfaite pour rapper en surfant sur des comètes. Les breaks façon synthés-pute-en-slow-motion sont à tomber, parfait pour s’exploser les cervicales.









Mais trêve de plaisanterie, le titre de Mondkopf, celui qui m’a scotché pendant des mois, c’est donc le fameux Ave Maria. Cathédrale de synthés affolants, moment christico-electro-ambiant, genre Boards Of Canada qui se mettrait à faire de la musique classique avec leurs claviers poussiéreux. Bref, un morceau énorme, grandiose, habité, et tout pleins d’autres termes qu’aime bien utiliser Kamel Ouali. Manque de pot, ce Ave Maria n’est pas inclus dans l’Ep. Scandale, indignation et esclandre. Enfin si, il est bien là, mais en live edit. Alors je commence à gueuler que c’est n’importe quoi, qu’il va y avoir un beat de tâcheron qui va niquer le trip putain pas content machin… Mais bon sait-on jamais, on se lance, un parachute à la main. La mélodie remplie directement son office, grave, dure, belle comme la mort. On se demande comment le morceau va se déplier, vu qu’il prenait 6 minutes auparavant pour s’élever dans les airs sans accélérer une seconde.
Bam, un kick te soulève le ventre, et prépare une montée de synthés à s’arracher les yeux tellement c’est beau, ça monte, ça file, tout prend de l’ampleur, la mélodie chétive devient massive, monstrueuse, elle gicle dans tous les coins, elle dégringole, s’envole, implose, roule, gronde. Elle te broie le coeur, t’écrase les viscères, le kick finissant de t’achever à coup de talon. La mâchoire en sang, t’es dans le caniveau, à regarder la voûte s’obscurcir mais pourtant tu te sens super bien, l’impression que des anges viennent te frôler, avant de te laisser choir en enfer pour une dernière phase grisante, avec une dernière ligne mélodique qui bourdonne et qui s’illumine pourtant comme jamais.
Comme dirait l’autre, c’est la techno dans une cathédrale, une pièce de grandiloquence contenue d’une classe folle, sublime et pourtant trop courte. On aimerait que le tout se déroule sur un quart d’heure, qu’il serve de messes aux gens assez dégénérés pour se recueillir sur une pièce pareil. Je ne sais pas à quoi pensait Mondkopf en pondant ce truc, à un enterrement, à un mariage, à une nuit d’amour, à une rupture, à une balade la nuit avec de la drogue plein le pif, à une jolie fille qui court pied nue sur l’herbe avec des cheveux bruns qui bougent au ralenti et le soleil dans le dos… Impossible à savoir, mais putain, ça devait être intense. Pour résumer donc, le morceau est monstrueux, l’édit tue, et sans (évidemment) faire oublier la pièce originale, se pose comme se qui pourrait être un vrai traumatisme à subir en live. Le genre de truc qui t’électrise pendant des heures, qui continue de courir le long de ton échine, même en étant blotti contre ton polochon réservé aux après-concerts cool.

Par contre, ce même titre bénéficie de deux remix. Et I :Cube remixant Ave Maria, sur 9 minutes de surcroît, ça ne peut que donner quelque chose d’épique. Et bien oui et non. A dire vrai, le morceau, pris seul, est assez sympathique, avec son trip 8 bits spatial assez déjanté, genre épopée gameboy chez les ewoks. Mais la refonte en elle-même n’apporte clairement rien à l’édifice du morceau exposé au dessus.
On lui préférera le remix de Hello Kurt qui reprend les bases du Ave Maria original, avec ses choeurs fantomatiques, un beat rond et tranquille, le tout surplombé d’une ligne de guitare parfaite, donnant au tableau une atmosphère presque Teen movie. Le morceau se déroule tranquillement, sans aspérité ni fracture, si l’on excepte le semblant de vague shoegaze dans le dernier tiers. Générique de fin parfait d’un film aux teintes sépia, avec la camera qui quitte petit à petit la route pour lorgner au ralenti vers le ciel. Nous, on est dans une vieille caisse américaine, lunettes de soleil pendant négligemment au bout d’une main, le volant dans l’autre, à regarder, emprunt de mélancolie, l’automne qui avale graduellement le paysage.












C’était évident, mais il fallait confirmation. C’est chose fait avec cet Ep, qui entérine le fait que Monkopf est un mec à suivre, qui risque d’exploser dans les années à venir. Comme Nil, un Ep ne suffit pas (d’autant plus que ce dernier se permet d’occulter l’Ave Maria original et la Dame en bleue), un album est plus que demandé, au plus vite évidemment. Et comme Nil (décidément), mais sur une base évidemment différente, Mondkopf, allie parfaitement le coté rentre dedans d’une musique frontale avec la fragilité de mélodies presque tire larmes, de litanies cristallines et autres pièces montées de claviers. (Et essayez de chopper quelques remix, ça vaut le coup d’oreille)

Il n’y a encore pas si longtemps, la distinction était clair dans l’electro francaise, entre les titilleurs electronica et les cavaleurs de la French Touch seconde vague. Cette frontière, grâce aux petits gars précités, est en train de se dissoudre. Voir mieux, de pousser les extrêmes à copuler ensemble, à se mélanger pour accoucher d’ovnis titillant autant les hanches que l’échine. Bonheur.









Mp3 :


Mondkopf – Ave Maria (Extrait) (Clic droit / telecharger sous)










5 titres – Fool House
Dat’











Adrian Sherwood – Never Trust a Hippy

Posted in Chroniques on December 3rd, 2008 by Dat'


In Adrian we trust…







Difficile de résumer la carrière d’Adrian Sherwood. Tout du moins en ne se limitant pas qu’à ses propres releases, car il n’y en a que deux. Mais d’un point de vu producteur et remixeur, le Londonien a de quoi rendre fou n’importe quel squatteur de Studio.
Surtout que le monsieur a officié dans deux genres presque antinomiques, participant à l’essor de la musique Industrielle, qu’elle soit Rock, electro ou hip-hop, tout en se faisant un nom dans le reggae et le dub.
Membre du groupe Tackhead, qui influencera une majeure partie du courant Indus, soul et electro, Adrian Sherwood est peut être familier à ceux qui ont étrillés leurs oreilles sur Nine Inch Nails, Ministry ou Cabaret Voltaire pour avoir assuré la productions de certains morceaux, et remixé une brochette folle d’artistes, de Primal Scream à Einstürzende Neubauten’s, en passant par Queen Of the Stone Age.


Mais c’est dans sa cave, à triturer des bases Dub jusqu’à l’excès qu’est né son envie de jouer crissements et saturations. Car c’est bien dans le Dub que le monsieur à un Cv hallucinant, en tant que producteur, étant même à l’origine du Time Boom X De Devil Dead de Lee Perry et Dub Syndicate, pour beaucoup considéré comme l’un des meilleurs disque de sieur Perry.

Bon pour le coup, quand j’avais acheté, à sa sortie, Never Trust a Hippy, je n’étais que très vaguement au courant de tout ça, même en ayant écouté certains groupes du dessus, étant plus attiré par l’étiquette electro-dub-barrée du disque que par l’histoire formelle du musicien. A l’instar du The Avalanches, retour sur un disque qui m’a profondément marqué.

Donnée étonnante, c’est que ce disque est seulement le premier album solo du musicien, après plus de 20 ans de carrière. Impossible de résumer ou condenser cette dernière en une galette, tout en sachant pertinent qu’Adrian ne pourra pas faire un banal disque d’indus ou de Dub vu les bagages bien garnis qu’il trimballe derrière lui. Il va prendre la tangente, en filant un énorme coup de pied au cul à tous les disques de Dub électro sortant sur la première moitié des années 2000, avec un son foncièrement électro et des samples sortis de rites drogués et extatiques.






















Apres avoir découvert un étrange packaging où les initiales du slogan de la galette sont apposées sur une brochette d’objets, on se lance sur No Dog Jazz. Basses dub rebondies, sample d’un gimmick roots qui tourne jusqu’à overdose, on pourrait se croire en terrain conquis, déboulant sur une galette comme il en sortait des tonnes il y a quelques années. Mais un élément déterminant raye l’oreille, accroche le tympans, donne des papillons dans le ventre : Cette rythmique, brute, rapide, qui claque. Là où le dub habituel se retrouvait cintré dans une base mouillée et pleine de reverb, ou noyé sous des basslines pachydermiques, la musique de Sherwood se retrouve étonnement aéré et sèche, tout en étant bien soutenue. Le mec préfère la MPC aux peaux de chèvres.
On est presque dans une drum and bass décharnée, où seul la moitié des beats survivraient, tout en étant cinglants comme des coups de marteau sur la porte d’une cabane. La rythmique n’est pas moite et grasse comme de la jungle classique, on n’est pas dans une cave suintant la transpi, mais sur une étendue d’herbe, en haut d’une montagne, à respirer un vent glacial, écrasé par un soleil radieux. Ce morceau, c’est un peu comme si un zozo un peu allumé et bien joyeux tentait de faire de la Drum en tapant avec des barres de fer sur une planche de bois et une plaque en métal. Parfait.

Mais si il y a bien quelque chose qui va prédominer dans ce Never Trust a Hippy, ce sont les chants et teintes ethniques omniprésentes. Attention, ne vous y méprenez pas, l’album reste instrumental. Je parle juste d’incursions malaxées et tiraillées par les machines de Sherwood, comme si des tribus amazoniennes passaient dans un mixeur Moulinex d’avant dépôt de bilan. Des fantômes completement habités, qui scandent, hurlent ou chantent des dialectes plus ou moins indentifiables, comme si Sherwood était allé tâter du crocodile et des moustiques pour chopper quelques vocaux exotiques sur bande.
Le premier morceau à cristalliser cela (et ils sont nombreux) pointe juste après le ptit loup du dessus : Hari Up Hari, qui laisse des voix plaintives ( créditées Hari Haran, chanteur parait-il assez connu en Inde), implorant je ne sais quel dieu, se faire secouer par des beats toujours aussi secs, qui se télescopent et s’enroulent à n’en plus finir, le tout plombé par des claviers dub massifs. Imaginez une cérémonie de sacrifice avec votre cul plongé dans la marmite, le tout placé en Slow motion, et vous y êtes.

Le superbe Haunted By Your Love pourra faire flipper sur les premières mesures, avec ce chant céleste et ce piano un peu cheap, qui fait très chillout de seconde zone. Sauf qu’un pied bien sourd débarque, qu’une enfilade de rythmes bien secs et de scratchs tordus foncent dessus, soulèvent le morceau, on claque des doigts, on est bien, ça part dans tous les coins, et en plus c’est Sly & Robbie qui s’occupent des percus. Rien que ça. Et vlan, break, une tribu hallucinée vient casser le tout en criant, ça soulève les tripes, ils reviennent à la chasse, ils dansent autour du feu en gueulant, exorcisme, c’est cool. Quand la voix indienne repointe son nez, ce n’est plus dans une compile Buddha bar que l’on est, mais au dessus de la planète, à prendre en levrette un gros cumulonimbus.
Quand à X-planation, il convie un chant étrange, spectral, placé en mille feuille, qui semble petit à petit se muer en accordéon, chapeauté de percus chaudes vite balayées par une grosse ligne de basse bien crado. Le jeu de rythme est énorme, on voyage, on danse, on se met à se rouler la bite à l’air dans la peinture multicolore, énorme.









Et quand Sherwood est à court de Sample ou de chanteurs énigmatiques, il va carrément aller chercher ses filles pour faire quelques choeurs, comme sur Processed World, préau d’école primaire qui va petit à petit se transformer en rave, les éclats dub du départ et la candeur des voix des petites demoiselles se faisant zébré par de grosses nappes électro, qui tiennent plus de la réunion trance-club que du repas familial chez oncle fumette. Ignorant Version fera une partie Technoïde entre un Hiphop beatboxé, moines qui hurlent des prières, spectres incantatoires et petite litanie de filles se baladant dans la foret pour cueillir des champignons. Alien imparable. Mais gros alien quand même.

Sherwood va même se permette quelques fusions flirtant avec le grand écart, mais accouchant d’un des sommets du disque, Dead Man Smoking. Le début est bien dub, presque roots, c’est le bonheur tranquille, super joyeux, tu tournes en rond avec tes potes, un chien débarque, parasite la chanson en aboyant, ça rebondi, sourire en banane. Des guitares entrent dans la danse, en travers, en diagonale, passent dans tes oreilles, s’envolent, le son est magnifiquement traité, ça fourmille, on se croirait presque chez Cornelius. Et paf Ghetto Priest débarquent sans prévenir pour lâcher un couplet super bref, on tombe dans de la pop divine, les violons perlent, les cordent continuent de faire l’amour, on se noie dans les reverbs, et la fin arrive bien trop tôt. Super court, le titre flirte néanmoins avec le petit chef d’oeuvre.

En parlant de dub, que l’on rassure les puristes, il y a bien quelques titres qui se révèlent moins soutenus rythmiquement, faisant la part belle aux sonorités rondes et aux échos incontrôlés. Entre le long Paradise Of Nada qui aurait pu s’échapper d’un disque de Truffaz, avec cette trompette virevoltant tout le long du morceau, avant de s’inviter sur le completement psyché Boogaloo qui se présente comme un labyrinthe de reverbs où des prières se seraient paumées, sans compter l’hypnotique Strange Turn, très tribal, qui va se retrouver petit à petit écrasé sous un sublime lit de cordes en tout genre, les amoureux d’un son plus ample seront servis.
Le disque se conclura d’ailleurs sur l’étonnant, massif et pop Majestiv 12 qui va impressionner par son beat bien lourd, et cette trompette presque héroïque, qui crache une très belle mélodie, à raidir la colonne des plus émotifs. Un break de tribus out-of-control va rapidement mettre à sac le tout, avant que les cuivres, accompagnés d’une prêtresse à la voix belle à pleurer et martyrisée par des changements de pitch, vous envoie directement dans un space-farwest. Le coucher de soleil, veuve éplorée, brin d’herbe dans la bouche et pistolet laser sont compris dans la formule. Cette dernière piste me transportera encore pendant longtemps.










D’un avis évidemment personnel, et donc completement subjectif, ce Never Trust a Hippy(?) est pour moi l’un des tout meilleur disque de Dub électro qui m’a été donné d’écouter. Tous les fans d’Ethno-dub devraient être ravis, le disque évitant en plus le syndrome du National Géographique (aka je pioche des sample World un peu n’importe comment parce qu’il faut en mettre) au vu de la pureté des sonorités choisies. Les voix sont à crever, qu’elles soient en choeur ou hululant en solitaire.
Le disque permet en plus de se démarquer de bien de ses camarades grâce aux rythmiques arides, cinglantes et soutenues qui parcourent toutes les pistes, donnant un coup de fouet aux compositions, qui sont toujours hypnotiques, mais jamais ronflantes.

Il est enfin absolument évident, à l’écoute de ce disque, que Adrian Sherwood ne sort pas de nulle part, tant la qualité du son et le travail effectué frise la perfection, le tout étant d’une propreté et d’une profondeur absolue. Ça fuse dans les oreilles, ça claque, ça enveloppe, ça irradie, un vrai bonheur pour les tympans, et presque une leçon de prod qui a du déprimer pas mal de groupes dans le genre, à l’instar d’un Body Riddle pour l’électro.
Dommage que le Londonien n’ait pas réitéré l’exploit avec le disque suivant, Becoming a Cliché, qui, tout en restant plutôt bon, n’a pas cette patte, cette folie dans l’atmosphère, les voix et rythmes.


Reste qu’Adrian Sherwood, avec cet énorme premier album, a bien fait de se centrer sur lui-même et arrêter de produire pour les autres, vu la qualité extrême de l’opus. Qui reste d’ailleurs une de mes galettes de prédilections, toujours en haut de ma pile de disque.











Adrian Sherwood – X-Planation











11 Titres – Realworld
Dat’










Mr Oizo – Lambs Anger

Posted in Chroniques on November 29th, 2008 by Dat'


Ne pas vendre la peau d’un Flat Eric avant de l’avoir buté








Here comes the man. Il s’en est passé des choses pour Mr Oizo depuis l’incroyable album Moustache (Half A scissor). Et comme d’habitude, avec une trajectoire qui, en plus de surprendre, continue d’oeuvrer dans la quasi-autodestruction, le pétage de plombs, voir le foutage de gueule pour certains. Bref, après un album génial mais quasi impossible à assimiler pour une personne saine, Mr Oizo sort un dernier Ep chez F.com qui frise le bruitisme. Et ce n’est pas le remix de Justice qui atténuera les choses. Le Label de Laurent Garnier devant malheureusement (paix à son âme) fermer ses portes, Mr Oizo se retrouve sur l’écurie française la plus plébiscitée du moment, Ed Banger, pour un énorme Ep, Transexual / Patrick122, et en profite pour produire quelques morceaux pour la demoiselle Uffie.

Entre temps, Quentin Mr Oizo Dupieux se pose derrière la camera pour son film Steak, invitant ses potes Sebastian, Kavinski, ou Sebastien Tellier à jouer au cotés d’Eric et Ramzy. Comme au temps de Flat Beat, Oizo tenait encore dans ses mains un concept pour dynamiter le box office, se rouler dans les billets de banques et devenir le meilleur pote de Paris Hilton, en pondant ze comédie française avec le duo comique le plus apprécié à ce moment. Et bien non, on tombe sur un bordel surréaliste et malsain, une ode à l’absurde totale et flinguée (qu’il tutoyait déjà dans son NonFilm, aka le truc le plus bizarre imprimé sur une pellicule française, où l’on pouvait déjà trouver Tellier et Kavinsky), qui fait fuir tout le monde et choqué les parents amenant leurs enfant voir le film la bouche en coeur. Comble du surréalisme, Steak, honnis par le public, va représenter la France à l’eurovision, la chanson de Sebastien Tellier parlant des Chivers, la bande de zozos du film. (C’etait l’intro name dropping du mois)

C’est peut être ça qui anime Mr Oizo. Ne pas débarquer d’une façon frontale dans le mainstream comme avec son tube Flat Beat il y a 8 ans, mais le parasiter en jouant sur les paradoxes, l’infiltrer en catimini pour finir par le tailler en pièce, le rejeter face à ce qu’il a de plus absurde. Quoique, lui doit s’en foutre, mais le résultat est là. Et le voila chez Ed Banger, sûrement le label français qui peut lui offrir la plus grande résonance mondiale ces temps-ci. Pour enfin repasser sur Mtv, ou mieux envahir la terre avec sa quête de non-sens ?






















Hun ne dépaysera pas les amateurs du bonhomme : Gros beat façon funk putride, bien saturé et crade, qui file envie de se brûler les pieds en dansant comme un mec bourré atteint d’une crise d’épilepsie. L’espèce de sample disco déboule, le rythme qui s’entrechoque est juste énorme, on sent que la salle peut déjà basculer, c’est la folie. Mais non, une voix de nana dont Mr Oizo a le secret, façon carte postale parlante, va expliquer que l’on va entendre un disque avec des trucs cool, des chansons pourries et des choses passables. Le tout bousillé par des bugs. Well. Ça met en confiance. Boum, le rythme déboule de nouveau, et on s’en fout, on est content, Pourriture 2 arrive, recyclant le slogan présentant Moustache mais en le passant en français. Gros synthés bien gras, beat sec, enlève ton cerveau et saute partout.

Mais c’est vraiment Cut Dick qui va se poser comme le premier tour de force du disque. On a toujours ces beats d’usine qui sont en fait pas des beats d’usine mais que Mr Oizo taille pour qu’ils ressemblent à des beats d’usine. On a toujours ce groove de folie, qui fourmille dans les hanches, elles mêmes déboussolées par les bugs et convulsions d’une ossature qui semble évoluer comme elle seule le souhaite. Les morceaux d’ Autechre mutent pour devenir savants, ceux de Mr Oizo se défigurent pour devenir débiles. Mais c’est clairement ce Saxo completement ringard, samplé dont on ne sait où, qui soulève le morceau. On assiste à une parade d’un irrésistible mauvais goût. Comme le pote qui s’habille avec des trucs mauves, des vieux pulls looney-tunes et des chapeaux pourris, mais qui garde un magnétisme et une classe folle dans sa démarche et sa façon de rouler les épaules en tirant sur sa clope. Le Saxo de Patrick122 donnait l’envie de se rouler par terre dans un club jusqu’à ce que mort s’ensuive, celui de Cut Dick tapera plutôt dans le desir de se balader avec une paire de lunette de soleil et un chewing-gum dans la bouche, à faire le marlou sur les trottoirs de Paname en se mettant les pouces dans les poches.

D’ailleurs, la grosse question qui pointait avant la sortie de ce disque (Même si les doutes furent rapidement balayés par l’Ep Transexual) était de voir quelle influence Ed Banger allait avoir sur le son de Oizo (le contraire est également valable), posant la perspective alléchante que ce dernier donne un son plus direct, plus dansant, tout en continuant à martyriser ce dernier. Et des gros tubes, il y en a dans ce Lambs Anger. Avec une écoute distraite, on pourrait même croire que Dupieux a policé sa musique, en la blindant de gros claviers, de synth Dance et gros pieds rave.











A dire vrai, Mr oizo a même décidé de “Pute-ifier” sa musique. Il suffit de se tourner vers l’exemple le plus flagrant, Bruce Willis is Dead, déflagration flirtant avec la Makina, qui tourne sur le web depuis quelques mois, espèce d’attentat frontal de 4 minute presque simplet, rouleau compresseur près à retourner le monde, mais clairement, en surface tout du moins, éloigné des délires habituels du musicien. A dire vrai, le morceau a bien changé sur cet album. Le début est toujours aussi traumatisant, avec ce sample Bruce willis is dead tournant jusqu’à overdose, ses Whouuu whouuu allumés, et surtout cet énorme synthé, juste colossal. Le truc réduit nos cerveaux en bouillie, annihile toute notion de retenu. Mais cet hymne dégénéré commence graduellement à partir en couille, se désagrégeant pour se transformer en une fanfare un peu crétine, un peu candide, completement inoffensive, genre générique de dessin animé pour gamin qui aurait pris de la drogue, alors que les deux premières minutes du morceau étaient presque synonymes de tremblement de terre. Le morceau cristallise, en tirant vers les extrême, ce que veux faire ce Lambs Anger : Balancer des bombinettes fédératrices qui vont se retrouver dépecées, explosées, débilitées par Mr Oizo.

L’autre ouragan, et sûrement meilleur titre du disque pour moi, c’est Gay Dentists, morceau completement cintré, qui commence sur les chapeau de roue avec cette voix très Dance Machine se frayant un chemin entre les synthés dérangés et les rythmes virevoltant de partout. Mr Oizo recycle un titre disco qui date en le plongeant dans un écrin de claviers hystériques. C’est Corona qui se fait hacher menu par un psychotique affalé sur ses machines, ça hurle, ça crisse, ça cogne, le bonheur. Et paf, sans prévenir le morceau part dans un gros délire imparable, au groove affolant, barge au possible. Costume blanc, on lève le doigt vers le ciel, bien synchro, avec de la came plein la gueule.










On ne pourra pas faire l’impasse sur Positif, déjà culte avec ses slogans martelés jusqu’à la nausée, insultant ceux qui oseront se trémousser sur ce missile implacable, aussi dansant que maladif, à la ligne de basse affolante. L’explosion du morceau est vécue comme une libération, un tourbillon cradingue qui t’arrache les oreilles. Super court (pour un scud dancefloor j’entends), le morceau risque néanmoins de s’inscrire (si ce n’est pas déjà fait) dans les titres mythiques du bonhomme. A noter que la refonte du morceau par LFO, dispo sur l’ep, est un modèle dans le genre remix-industriel-acharné.

Mr Oizo trouvera même le temps de partager quelques titres avec des featurings, comme l’ultra saturé et métallique Erreur Jean avec Error Smith, façon game-boy passée dans un grille pain qui tente de faire une dernière mélodie avant de mourir, ou le très bon Two Takes It feat Carmen Castro (mais qui est-ce ?), hiphop-dance-funk déglingué. Mais c’est bien le morceau avec Uffie qui se taillera la part du lion, avec ce r’n’b bien vicieux, ses hand claps omniprésents et la miss qui minaude comme jamais dernier son micro en balançant un tubesque “My load is pretty heavy / but you swallow ?cause you think I’m cute / Two times might be one too much / i’m loosing sights i’m loosing touch” introduisant un texte bien abscons. Le titre se trouverait presque être le morceau “normal” du disque. Si poser sur une instrue minimaliste qui bascule sur un piano dépressif avant de se faire aspirer dans un vortex cradingue peut être considérer comme étant normal.


Lambs Anger contient évidemment les réglementaires morceaux aliénés et absurdes propre à toute galette de Mr Oizo, entre un Rank qui ferait passer le générique d’X-files pour un morceau de Madonna, un W qui semble tout cassé de partout, un Jo très disco-lover bousillé par un bug façon poisson qui frétille avant de clamser, et un Lars Von Sen, déclaration d’amour pour un Larsen. Tout va bien. La palme reviendra à Lambs Anger, Mr Oizo déterrant une nouvelle fois Flat Eric pour mieux détruire le mythe, l’humiliant sur la place publique en lui donnant la possibilité de faire un morceau de musique : This audio was recorded by flat eric. En résulte un interlude noise inaudible et surréaliste au milieu d’un disque pareil, soudainement coupé par un Ok thats enough, go back to the closet lapidaire.
Le disque se conclura sur l’énorme Blind Concerto déjà présent sur l’Ep Transexual / Patrick122, balade psychotique traumatisante, genre Kraftwerk bourrés qui tanguent sur un velo, machines à la main, tentant de faire ce qu’ils peuvent pour construire un semblant de mélopée, avant de se casser la binette dans le fossé, le nez en sang et la tête ouverte. Vous avez envie de danser mais la nausée vous tenaille ? C’est tout à fait normal.













Ce Lambs Anger risque d’être autant descendu / porté aux nues que ses grands frères. L’ouverture de Mr Oizo à un son plus simple et direct n’a pas vraiment eu lieu. Enfin si, mais en façade. Certes, les synthés putes et les rythmes tapageurs ont remplacés les mixtures informatiques et les boucles façon J’ai-marché-sur-ma-machine-mince-elle-est-cassée. Mais on a toujours cet aspect completement déconstruit, completement dingue et malsain propre à Oizo. Celui qui surprend après nous avoir enchanté pendant quelques secondes, qui traumatise après avoir enflammé la piste de danse, ou qui nous relève du caniveau en nous balançant une montée imparable.
Sous ses tubes affolants, la musique d’Oizo garde cet aspect bizarre, absurde et dérangeant. Le disque semble plus simple d’accès que Moustache , les fractures étant cachées sous une facette très dance-machine-débile. Et c’est justement pour cela que ces dernières semblent encore plus surprenantes, les aspérités nous giclant littéralement à la gueule au détour d’un saxo ou d’une boucle pourrie, là ou elles étaient devenues « norme » sur le précédant, assimilées rapidement (ou rejetées en bloc) car parasitant les fondations même de la galette.
Mais rassurons nous, Mr Oizo continue de faire des bombes aliénées, des instrues pour Mickeal Jackson et des trucs branquignoles et dérouillées.



Ce Lambs Anger, pourrait presque mit en parallele avec le dernier Bodgan Raczynski, ne s’interdit pas de flirter avec un son putassier, tout en ensevelissant le tout sous des virages illogiques et autres bugs assumés et contrôlés. Se marrer en assumant un coté débile, joyeux et gras, tout en ouvrant un vrai boulevard à ses pulsions sadiques en lacérant sa musique avec de grosses saturations et autres accidents jouissifs. (Et bordel, rien que le morceau Gay Dentists est un incontournable dans le genre)

Au final ceux qui ont toujours trouvé Mr Oizo insupportable continueront de ne pas pouvoir encadrer sa musique. Beaucoup de ceux qui ont aimé Moustache n’aimeront pas le coté dancefloor de Lambs Anger, et pas mal de ceux qui apprécient le son Ed Banger crisseront des dents devant la majorité des morceaux de cet alien irrationnel.


Bref, Mr Oizo continue son travail de sape pour se faire détester par tout le monde, en dynamitant avec un sourire pervers toute optique qui lui donnerait la possibilité de nager dans une piscine de biftons et tenir un Grammy Awards dans chaque main.
Mr Oizo se marre et n’a que faire de la réaction du jury. Cela tombe bien, c’est clairement dans cette perspective qu’il est le meilleur.












Mr Oizo – Lambs Anger album teaser











Mr Oizo – Positif














17 titres – Ed Banger Records
Dat’













Mr. Oizo – Moustache (Half A Scissor)

Posted in Chroniques on November 26th, 2008 by Dat'


Micheal Jackson dans la DeLorean : Rush to the Futur







Mr. Oizo… 95% des gens de plus de 18ans connaissent un titre mondialement connu, qui a tourné jusqu’à l’overdose dans la fameuse pub Levis et son bonhomme jaune creutzfeldt-jakobien. Phénomène relayé par tout les mass medias, piste electro placée en étendard d’une nouvelle vague française, résultat environs 2 millions de ventes du titre. (Absolument énorme pour un morceau du genre)

Bref premier album extrêmement attendu en 1998 suite à ce rouleau compresseur.
Et là tout le monde ramasse ses dents. “Analog Worms Attack” n’est qu’un album inécoutable, sauvage, fait de Hip-hop saturé et abstrait, glorifiant les saturations et le son crade. Réactions : “Une honte”, “un suicide Commercial” “Mr. Oizo? La peluche jaune? Ouai j’adore hihi…”
Le pire dans tout ça, c’est ce Flat Beat rajouté en catimini façon “Bonus track”, comme obligé d’être présent pour ne pas transformer le Seppuku du monsieur en vrai naufrage assumé.

Sauf que… “Analog Worms Attack” est une pure bombe avec un titre éponyme qui retournerait n’importe quelles enceintes au monde. Et restera une référence pour tout amateur de musique Electronique et de Hiphop qui se respecte.





Puis 7ans… Quelques tracks jetées au hasard, des films, de clips… (Il est cinéaste en plus)
Rien d’énorme à se mettre sur la dent.

Mais l’ébullition reprend, Le petit français Mr. Oizo prévoit une nouvelle galette. Les petits sites indépendants musclent leurs oreilles, les gros Medias se masturbent sur une future sortie d’un des activistes electro français les plus connu. On veut tous des chansons destructrices, des petits bombes.
Tout le monde parle de Mr. Oizo = Flat Beat. A croire que cela lui colle à la peau. La preuve, impossible de ne pas en parler ici même, ne serait-ce que pour donner de la contenance à une pseudo-intro qui en jetterai presque.

Surtout que le titre sensé introduire l’espéré prochain disque, Stunt, arrache les dancefloor, une vraie tornade, même sans avoir le charisme et le pouvoir de rallier une deuxième fois des millions de pèlerins.


Manque de pot, Mr. Oizo a du se rater lors de son premier sabordage, et va prendre encore tout le monde de contre-pied avec un objet décrié, détruit, honnis, critiqué par 90% des testeurs.
Même son Boss de label et pote Laurent Garnier le taxe d’inaudible, et ne se gène pas pour transmettre son incompréhension dans la presse spécialisée.
Liberation (si si) se fend d’un “inécoutable”, d’un “vide de sens”. La majorité des critiques s’accorde à dire que ce disque est creux, radical, hermétique, sans queue ni tête pour la sucer.
“Mr. Oizo? Il a renversé de la bière sur ses machines? J’aime pas hihi”


Sauf que…




















Hello Hello, Who ever you are… This is computer Music. Shoot, Or die !


Cette diatribe ouvre le bal du disque, (à la pochette surprenante) et sera répétée plus d’une fois au long de ces 17 titres.
Comme pour nous prévenir. Pour nous mettre en garde. Pour bien nous imprimer au fond de notre minus cortex que le voyage ne se fera pas sans heurts. Un peu comme les multiples avertissements précédents un Space moutain. Bon moyen de faire monter la sauce, comme chez le faux sac à vomis de chez Dysney? Oui… Mais non…

Oui car l’on frétille d’avance d’entendre le disque d’un mec qui ne prône pas “la maturité”, qui veut pas donner un coté “humain” (Larmes aux coins des yeux) à son entreprise.




Non car des le premier vrai (la piste 1 est censée ne pas exister) titre de l’album The end nos oreilles se rendent compte que la punch line est emplie de sincérité.
Complètement défoncé, abrupte, presque aléatoire (sans jamais être violente ou agressive, ne me faites pas dire ce que je n’ai pas dis) la structure du morceau est insaisissable. Sorte de funk de 2 minutes complètement drogué, ralenti, on écoute, incrédule. On croit assister à une ode aux bugs, aux errements, aux bidouillages et cuts up aveugles.

Et des comme ça, Mr. Oizo va nous en servir quelques échantillons. Vagiclean2 , “(E)”, Scum Hotel, “(ee)” sont entre autres de drôles d’oiseaux, des piafs aux ailes coupées, pissant le sang entre les pattes du rôle paradoxal de chat du musicien.
Bref, ces titres, ne dépassant pas vraiment les 2 minutes, partent méchamment en couilles, mais avec (semble t’il) pas mal d’humour. Pas vraiment le genre de titre ou l’on pourrait s’entendre dire “ouai mais non tu comprends il faut puiser l’essence de la track dans le passé substantiel de la fécondité intrinsèque de l’artiste…”

Il faut juste le prendre comme du fun accidenté de la route qui tente de nous faire bouger la tête sous son manteau de tôles concassées.


Et la tête, on va la bouger, et méchamment.






Outre donc le Titre Stunt (son en fin de texte) qui serait le seul titre normal de “Moustache”, sorte de house concassée et bien rude, qui ne varie pas des masses, mais bien ravageuse, on trouve dans ce disque tout une tripoté de grosses bombes déjà explosées, dont seul les restes suffisent à nous foutre à genoux.
Et le parallèle avec Mickeal Jackson, même si je dois être le seul hurluberlu à le faire, est pourtant évident.
Car c’est bien le petit bout du petit doigt de pied des pistes destructrices d’un MJ que l’on retrouve ici…

Il suffit d’écouter le Grandiose Half A scissor pour s’en convaincre. Apres une intro très métallique, fermée, Le morceau se transforme avec des breaks excellentissimes, avec un groove imparable, dégueulasse, façon Super_Collider, sans la voix. Des bouts de chansons, des micros samples qui donnent l’impression de sortir tout droit d’un Thriller, d’un Bad ou d’un Murder on the dance floor des grands soirs… Ou tout autre tuerie du genre, pour ne pas froisser les fans du Monsieur.
A chaque temps d’arrêt de la piste, à chaque son émergent de l’instrue aride, on a envie de lever le bras avec un doigt tendu au bout, en foutant brusquement ses hanches vers la gauche ou la droite.
Tout simplement Enorme.





Et cette ambiance de James brown violé, on va en avoir pour notre argent.
Latex et Squaresurf sont juste terribles. Elles pourraient faire danser tout le monde mais personne n’osera, de peur de devenir fou sur ces rythmiques martiales, et pourtant enjouées.
Même problème sur Nurse Bob ou le son crade se fait marteler par un beats un peu plus clair que précédemment, tout en partant dans des stratosphères que seul son architecte doit comprendre.
Berleef Réussira le tour de force de pointer dans le trio de tête des 3 plus perchées et difficiles d’accès pistes de l’album, passant d’un début répétitivement énigmatique à un marasmes de sons disjonctés, comme si l’on ne s’arrêtait pas de passer en revue les stations radio de la bande FM (sans les parasites au milieu). Elle aura le bon goût de s’arrêter sur la bonne station crachant un Hiphop joyeusement foiré…


Pour mon super rapprochement entre MJ et ce disque, sorti de mes trop longues nuits sans sommeil, Drop Urge Need Elle en est un très bon émissaire. Mélodie et Beats presque pop minimale, laminés par des interventions humaines ou non, par des cavalcades de sons et autres attentats sonores, elle réussit clairement à nous filer des fourmis dans les jambes, pour peu que l’on soit déjà sérieusement atteint par un virus informatique.


On serait même étonné de tomber sur un très beau 1$44, où la mélodie est clairement mise en avant ici, avec ligne de synthé bien crade, soutenue par un rythme HipHop lent et appuyé… Malmené certes, surtout en sa conclusion, mais prenant, carré, et presque poignant après cette orgie de machines prises d’une douce folie. Folie qui va virer à l’acte sexuel débridé sur Vagiclean, Mr. Oizo s’amusant dans la deuxième partie de la piste à faire simuler l’orgasme à ses machines. L’effet est saisissant.
En fermant les yeux, on imaginerait presque le dernier I-Mac se trifouiller les nichons. Bandant.



—————————————–




Alors que retirer de cet Album complètement à l’ouest?


Que Mr. Oizo confirme bien qu’il excelle dans le suicide commercial.
S’il te plait, continue de te foutre en l’air au nez et à la moustache de tout le monde.


Deuxièmement, Mr. Oizo a déjà maché le travail pour Micheal Jackson, et cela bénévolement. Si le King of pop n’est pas mort dans 30 ans, il aura des instrues déjà toutes faites, et pile dans l’air du temps à partir de 2025. De vraies bombes en perspectives. J’ai hâte.
De plus, la dureté et l’aridité de son album fera clairement fuir les gosses lui tournant autour, ce qui est tout bénéf au final…




Pour conclure, et pour une fois, je vais vous demander de ne pas suivre mon conseil, et donc de faire semblant de ne pas me croire quand j’affirme que ce disque est tout simplement génial. Je n’ai pas envie de crouler sous des injonctions en justice et les demandes en remboursement pour avoir conseillé d’acheter un disque qui ne va pas plaire à 98% des lecteurs de ce billet, qui va être taxé de vide, de machin flirtant avec le n’importe quoi, complètement hermétique, inintéressant ou inécoutable.




Donc n’écoutez pas ce disque. Parce que c’est une putain de tuerie. Un gros gros bordel sonore joyeux et genial.



























17 titres – F.com
Dat’








Matt Elliott – Howling Songs

Posted in Chroniques on November 22nd, 2008 by Dat'


Urgence







Tout commence par une sombre histoire de disque repoussé. C’est une habitude maintenant, quand vous vous présentez devant un vendeur de la Fnac & co le coeur battant, les pupilles brillantes et le coeur gonflé d’espoir, vous vous faite rabrouer violemment par un “non pas reçu” ou “mmm désolé, il est repoussé à une date inconnue”, voir même par le terrifiant “mince je devrai l’avoir, mais je ne l’ai pas reçu, je me demande pourquoi ?”. Bref, repartant la queue entre les jambes, l’air désespéré, on déambule dans les rayons, à la recherche d’une bonne surprise. Sait-on jamais, certains gagnent bien au loto.

Comme d’hab, de la musique tourne dans les étages. Les cds claquent dans les mains de ceux qui farfouillent et Un vendeur parle à une midinette. Une mélodie distillée par une guitare, une voix grave. Sympa. Et tout à coup c’est l’explosion, le bug, le blocage, la paralysie. Je reste droit comme un con, à écouter, à me prendre ma baffe. Juste à coté des deux qui continuent de bavasser, et qui doivent me prendre pour un mec qui vient de perdre son cerveau, voir un pervers qui tente d’écouter les conversations. La montée est tellement dantesque, que le vendeur se tourne pour baisser le son. Sacrilège. L’envie de sauter par-dessus le comptoir pour casser ce bras qui s’approche de la molette volume me submerge. On se contentera de se pencher pour vérifier la jaquette du disque qui est en train de tourner, de foncer dans le rayon, de saisir ce Matt Elliott, de passer à la caisse, et de se précipiter chez soi pour continuer le dit morceau, en espérant que la petite aventure ne soit pas un mirage (ou pire que le vendeur n’ait pas changé la jaquette après avoir inséré une nouvelle galette dans la sono du magasin. T’as pas l’air con avec le mauvais disque dans les oreilles.)






















Alors le fameux morceau, c’est Something About Ghosts, deuxième piste de son état. A dire vrai, si je n’avais pas pris le morceau au bon moment, je serais sûrement passé sans sourciller. Pourtant l’entame est belle. La voix grave de Matt Elliott hypnotise, les notes de guitares toutes fragiles rassurent. Et ce violon, qui perle, qui implore en second plan, torche le travail. Certes. Jolie folk song un peu désabusée. On en connaît des tonnes dans le genre, même si cette dernière à l’air réussie. La guitare se retrouve seule, commence à s’affermir. Le tout prend de l’assurance. La voix n’est plus, reste une mélodie qui prend corps. Le basculement s’opère à la troisième minute. Un espèce de miracle, un éclat qui saborde l’équilibre, qui broie les viscères. Un orchestre, un bataillon, que dis-je une armée déboule, explosant la trame du départ, nous noyant littéralement sous une bronca venu des pays de l’est. La guitare tonne, les violons virevoltent, le tempo s’emballe, implose, nous écrase. La montée est sublime, harassante, éprouvante. Tu as l’impression qu’un continent entier te tombe sur la tronche, te piétine, te crache à la gueule, pour finalement baiser ton cadavre avec tendresse. Tu as l’impression que les balkans veulent faire du hardcore avec des instruments acoustiques et t’inviter dans une transe qui va te violer la conscience. Tu as l’impression que l’on veut t’arracher le coeur, pour l’écrabouiller, et qu’on te dit que c’est bien fait, fallait s’y attendre, c’était trop beau pour ta connerie de palpitant engraissé par les Monster Munch. D’ailleurs le coeur, il bat, et il cherche désespérément une bouffée d’air, car tu cours comme un dératé pour ne pas se faire écraser par ce rouleau compresseur. C’est la Russie qui te tabasse alors que t’es même pas un journaliste, qui t’arrose de vodka pour t’immoler en hurlant de bonheur, même si je ne sais plus si la vodka, ça flambe. C’est grand, c’est beau, c’est un pillage d’émotion énorme, et les deux dernières minutes sont justes les deux plus belles putains de dernières minutes qui ont réussi à sauter dans mes oreilles, sans que je le demande, depuis un bail.



Alors oui, au fait, il y a l’ouverture du disque aussi, The Kubler Ross Model, longue ascension de 11 minutes, qui va laisser Matt Elliott chanter sur un lit sublime de guitares glissant comme de l’eau, et de violons tziganes à l’agonie, avant que tout se déchaîne, déborde, fulmine comme jamais. Les choeurs emplis de tristesse se font balayer par un soulèvement absolu, entre guitares électriques apocalyptiques, violons affolés sublimes, bruits électroniques, et mille grattes acoustiques en mode virtuose. Comme si tu foutais un groupe tzigane dans le plus gros des orages, avec un dingue de métal derrière, et une tornade qui parachève le tout. Les terres désolées et arides du départ se prennent une bombe atomique sur la trombine, tout le monde meurt, les flammes bouffent tout, les gens hurlent avant de voir peau et os partir en lambeaux, ce naze de schwarzy a du louper son bus, judgement day, au revoir madame colonne vertébrale. Monstrueux.

Oups j’allais oublier A Broken Flamenco, qui ne va s’enticher que d’une courte introduction, toujours a tomber à la renverse, Matt Elliott chantant d’une voix cristalline sur des cordes qui te percent l’aorte, qui te donnent l’impression d’être au mariage d’un enterré. Mais très vite, ça explose, ça échappe à tout contrôle, et cette fois un mur de trompettes enragées se callent sur la bourrasque, qui passera en deux temps, histoire de bien faire son travail, de tout casser et de ne laisser pas une seule mini miette de nos esprits. Le Flamenco de Matt se retrouve dans un tunnel aberrant, grondant comme la fin du monde, filant sous cette chape de plomb immense, comme si l’espace entier venait télescoper le plancher des vaches. Attention ta mâchoire tombe. Et ce n’est pas cet enchevêtrement de voix distordues par des réminiscences électro qui permettront de rebâtir la moindre parcelle de nos oreilles.










Attendez, je vous vois venir : non, il n’y a pas que des compositions qui filent vers le ciel avant d’exploser et d’engloutir notre pauvre petite tête. Il y a Berlin & Bisenthal par exemple. Mon dieu, Berlin & Bisenthal. C’est calme, c’est sublime. C’est une voix grave qui se balade sur un violon tzigane qui volera l’âme du plus insensible des humains sur cette terre. C’est une longue complainte qui se traîne, qui nous traîne comme un vulgaire sac. Qui nous retourne, qui nous transperce. Ca me rappelle quand j’étais môme et que ma mère m’emmenait dans des bars super bizarres de Paris pour écouter de la musique tzigane ou manouche. Des coins où je flipperai de revenir aujourd’hui tellement ça avait l’air coupe-gorge, alors que c’est sûrement les lieux les plus magiques de la capitale. Le morceau ne décolle pas, ou presque, et laisse la voix de Matt Elliott se dédoubler et se muer en choeur anciennement désespéré, maintenant résigné. Tu as envie de tourner en rond avec ta moitié au ralenti, en rigolant, avant de voir cette dernière disparaître à jamais.

I named this ship the tragedy, bless her and all who sail with her (ouf) en prendra le même chemin, sur plus de 6 minutes, alignant une superbe pop song traversée de cordes à chialer et d’une guitare qui résonne dans vos tympans. La deuxième partie est à crever, le « refrain » prend aux tripes, alors qu’il est déclamé le plus simplement du monde. Il se répète à n’en plus finir, parasitant notre cerveau qui le prend pour acquis, qui s’endort petit à petit, bercé par cette mélodie. Le bateau coule lentement, et vous vous en foutez, vous dodelinez de la tête en regardant les étoiles. Le problème, c’est que le morceau débarque sur Howling Song, et que Howling song c’est le traumatisme de l’année. Le bateau a coulé, et vous voila accroché à une planche de bois à luter pour ne pas périr, avalant des litres d’eau en moulinant désespérément des bras. Ce morceau, c’est comme si tous les spectres du monde fonçaient sur vous en entonnant un chant de guerre. C’est mille voix qui chantent sur un purgatoire drone pour vous pulvériser. La guitare acoustique peine à se faire entendre au milieu de cette chorale ultime, qui chavire en suivant les vagues de l’océan déchaîné.

Les deux morceaux ne vivent que imbriqué l’un à l’autre. La transition est indescriptible, effarante, aberrante. Les repères deviennent une notion fallacieuse, on cherche une échappatoire, on serait presque tenté d’arracher le casque, allumer la lumière, respirer et aller pisser un cou en se disant “c’est rien mon ptit loup, t’a juste fait un cauchemar, tu vas t’en remettre”. Sauf que le bordel est tellement beau qu’à peine la vidange effectuée, on fonce sur son pieu pour revivre le truc. Mais bien préparé cette fois, on se tient dur au polochon, comme quand on fait Space Moutain la deuxième fois. On fait le beau mais on serre quand même encore un peu les dents.











En plus Matt Elliott, certains le connaissent bien. Déjà (et surtout) parce qu’il était l’homme derrière l’electro-drum de Third Eye Fondation, ayant accouché de très bons disques (“Ghosts” et “You Guys Kills Me” pour ne pas les nommer). L’aventure Third Eye étant mise sous cloche, j’avais même sauté sur son premier disque marqué de son nom, le “The Mess We Made”, sans y retrouver l’éclat des prods précédente. Bref, un peu déçu, j’avais un peu lâché l’affaire, et loupé les deux disques suivants, cristallisant cette mutation étonnante, passant de la Drum expé aux musiques noise-balkaniques avec une aisance assez incroyable. Je vais réparer ça rapidement.



On croirait que la sérénité habite enfin le disque avec sa conclusion, Bomb The Stock Exchange, qui commence sur une belle valse, apaisée et heureuse. Le soleil, certes bien caché, perle entre les nuages, et caresse notre peau de quelques rayons rassurants. Les cordes sont à se damner, on se balade en levant les yeux, avec l’herbe verte encore mouillée par la pluie qui nous chatouille les pieds. On rigole, on respire, on espère. C’est une sortie de caverne, c’est la première aurore aperçue depuis la fin de l’hiver, c’est le moment où tu aperçois de nouveau tes potes, après trois ans d’exil. Mais le monde se craquelle, les ombres fondent sur le paysage, le tonnerre gronde. Les sourires s’effacent, les mines réjouies et soulagées disparaissent. Une gigantesque vague, non, un cyclone colossal dévale et engouffre tout. C’est la fin du monde, la fin de tout, les violons se disloquent, les voix s’éteignent, et ne subsiste que cette cathédrale noise, mêlant les voix de mille fantômes et une machine déchaînée, un hurlement amplifié d’une façon aberrante, indescriptible, se confondant presque avec le néant.


Matt Elliott vient de me fracturer l’âme avec un pied de biche.

Beirut composerait ce disque après avoir passé dix ans enfermé dans une cave, sans savoir par qui, ni pourquoi, à bouffer de la merde tous les jours en se faisant hurler dessus.

Enfin non, pas sur. Je ne sais pas, je ne sais plus, je perds le fil, j’ai la gerbe et j’étouffe. Au secours.












MP3 :


Matt Elliott – Something About Ghosts ( Clic droit / enregistrer sous )












9 titres – Ici D’ailleurs
Dat’











Beirut – The Flying Club Cup

Posted in Chroniques on November 22nd, 2008 by Dat'


Sunday Smile








Certains traversent l’océan atlantique pour atteindre l’eldorado Amérique, qui cristallise la réussite, le succès, l’exposition maximum. Beirut, a.k.a Zach Condon, a fait le chemin inverse, quittant les USA pour sillonner l’Europe de l’Est, trimballant sa mélancolie de pays en pays, engrangeant une culture musicale impressionnante, hésitant entre Gitannes et Tsiganes, pour accoucher d’un grand disque, tout seul, « Gulag Orkestar », qui a fait connaître le bonhomme très rapidement, avec ce mélange de folk, pop et musiques de l’Est. (Il suffisait d’écouter le sublimissime morceau “Elephant Gun” pour s’en convaincre).
Mais Zach Condon semble vouloir se poser, et tombe amoureux de la France. Mélangée à une joie de vivre parasitée par une infinie tristesse, le Beirut nouveau nous sort Flying Club Cup en Septembre dernier… Ou comment se faire broyer l’échine en 13 leçons.











Je ne sais par où commencer. L’étonnement de voir certains titres de morceaux en Français peut être, alors que tout est chanté en Anglais. Le petit Condon semble bien maîtriser la langue de Molière soit dit en passant. Le chanteur et la Blogotheque (les fameux réalisateurs des “Concerts à emporter”) ont aussi réalisé des très bons petits films pour chaque morceau, joués en live un peu partout, dans la rue, dans une cour, sur une rive, dans un camion… Il faut enfin savoir que Beirut a éclairci sa recette sur cette nouvelle galette. Grand fan de musique Tziganes et d’Accordéon, un disque comme « The Flying Club Cup », c’est presque du fan-service pour mes oreilles. Mais quand on mélange le tout avec des mélodies à pleurer, on se demande s’il est encore nécessaire de continuer à écouter de la musique après ça.









Et c’est Nantes qui ouvre le bal. Magistralement. Ambiance guillerette, accordéon joyeux, le chant est toujours aussi déchirant, timide, brisé, fragile. Et le rythme s’emballe, claudiquant, typique du style, les cuivres montent, résonnent, entament une valse qui ne retombera pas. Tout tourne, accompagne le chanteur dans sa balade. Apres la petite pause, c’est le paradis que l’on frôle, avec ces choeurs discrets, se greffant petit à petit sur la ligne directrice.
A Sunday Smile ? L’un des miracles de l’album. Une chanson sublime. C’est l’histoire d’un vieux manège, tournant tristement, sans enfant pour l’accompagner dans sa ronde. Le soleil perle entre les barres scellant les cheveux de plastiques, mais seules les feuilles mortes se permettent de virevolter dans les airs. Zach Condon, au guichet, attend désespérément des sourires de marmots qui ne viendront jamais. Alors il chante, seul, sur la bande sonore vieillissante de son attraction. Jusqu’au refrain où toute une bande de gamins arrive, transportant le tableau dans une allégresse pétrifiante. Alors les cuivres s’invitent, la valse se fait plus appuyée, le tenancier n’est plus seul, les voix du refrain vous arrachent le coeur tellement la ritournelle est magnifique.
Mais ce titre, c’est surtout le parfait équilibre entre tristesse et joie pétrie de mélancolie. La tristesse d’avoir quitté l’être aimé, mélangée à la joie des vieux souvenirs qui refont surface. Courir les bras écartés, en pleurant de désespoir, en riant de bonheur. Indescriptible.

On ne redescendra pas. Guyamas Sonara nous crache à la gueule que Beirut sait créer des mélodies à filer la chair de poule à n’importe qui, avec cette trompette, instrument leader du morceau, qui vous pétrifie à chacun de ses soubresaut. Et quand une rythmique courageuse s’installe, explose, pour vous propulser chez les anges, avec un chanteur qui ne se lasse pas de s’envoler, c’est pour nous gratifier d’un des plus beaux moments du disque. On aimerait que ce moment dure 5 minutes, 10 minutes, trois quarts d’heure… la beauté est parfois bien frustrante. A se faire sauter le caisson en hurlant de joie.








Mais “The Flying Club Cup” tire aussi dans le minimalisme de façade, où seul un élément va tenter de colmater les blessures : The Penalty et Un dernier verre (pour la route) sont de ceux là. Le premier avec un simple ukulélé, et la voix de Condon, déchirante. Le final, qui laisse perler un accordéon triste à en crever, est juste superbe. Quand au second, c’est un piano, presque terne, qui va accompagner le gus dans ses élucubrations. Au moment où l’on commence à se demander si l’on ne tient pas la ballade mollassonne du disque débarque une fanfare, pour un final tellement beau que l’on se demande encore pourquoi ce dernier ne dure pas une éternité. C’est comme se prendre un mur apparu, de nulle part, de plein fouet, après une longue et chiante ballade en voiture. Il faut l’entendre pour le croire. C’est majestueux, pas d’autre terme en magasin.

Tout le contraire de l’alambiqué Cliquot l’un des plus beaux morceaux du disque (Mais sincèrement, y’en a-t-il un plus beau qu’un autre ?), avec ses trois phases bien distinctes, concentrant tout ce qui se fait de mieux chez le Beirut, avec cet accordéon supplanté par une marche militaire, qui va déboucher sur un passage lumineux, avec une mélodie d’une beauté absolue, violon en avant, pour échouer sur une transe des balkans, tourbillon d’instruments, à tirer des larmes au plus renfrogné des hommes sur terre.

Comment ne pas finir sur la petite pièce St Appollonia le morceau le plus marquant écoute par écoute. Ukulélé, violon et voix claire, pour un ensemble triste, grave, presque mortuaire. Sans prévenir, silence. Chute. Explosion. Tous les instruments se mettent à tonner, Zach Condon se déchaîne sur sa mini guitare, on monte lentement, lentement, pour attendre un état de grâce hallucinant, à vous violer l’âme en seulement moins de 3 minutes










Beirut semble avoir tout vu, tout vécu pour nous offrir un disque pareil. La tristesse et la joie de vivre s’entremêlent à n’en plus finir, pour former un ensemble compacte, indissociable, un sourire plein de larmes. Zach Condon n’est pas tout seul, mais Beirut n’est point un groupe non plus. L’américain se pose en chef d’orchestre, en multi-instrumentiste de génie.
On ne saurait quelle chanson choisir dans l’album pour son enterrement, tant la beauté transpire à chaque seconde de musique, tant les notes égrenées accompagneront avec perfection la peine absolue des gens assis dans l’église, tout en donnant une lumière, une clarté qui leur donnerait à tous l’envie d’avancer, de dépasser en riant l’immense chagrin.


J’en fais trop ? Assurément. Mais comment ne pas s’enliser dans l’emphase et les phrases boursouflées en écoutant un disque pareil ? Le disque est parsemé de petits diamants, de moments de grâce suprêmes, joue aux montagnes russes de l’ivresse des sentiments. L’envie de s’éteindre à jamais, harassé par les pièges de la vie, en étant pourtant si excité de voir poindre un nouveau jour, plein de surprise et de bonheur.




Ce disque rend triste, joyeux, enivre, tremblant, il déprime, il épuise, il nous enflamme, il nous transporte, aux grés des questionnements et des émotions sur la petite vie de Zach Condon. Il en peint des tableaux, des fresques aux mélodies sublimes, sans se soucier une seconde des précipices de mélancolie qu’il a autour des yeux.



Et nous, nous restons cons, abattus, étranglés par tant de sublime.











Beirut – Sunday Smile / Shot in Brooklyn










Beirut – Nantes / Shot in Paris











Beirut – St Apollonia / Shot In Brooklyn (Mon dieu ce panorama…)








Enfin, je ne peux résister d’inclure la vidéo de Elephant Gun , titre présent sur le precedent Ep de Beirut, et qui donnera une meilleure idée du son “Beirut” version Studio.







Beirut – Elephant Gun










13 Titres – Ba Da Bing Records
Dat’










Videos µ°8

Posted in Chroniques on November 18th, 2008 by Dat'


Girls…


8éme salve :

























Atmosphere – Shoulda Know














Factor feat Awol One – More Rude Than Handsome















Descriptions en commentaire !
Dat’










Popnoname – Surrounded By Weather

Posted in Chroniques on November 18th, 2008 by Dat'

The Way of the dodo






Comme pas mal de gens j’imagine, je ne connaissais pas du tout Popnoname. Pourtant, l’année derniere, son premier album avait renversé le coeur de pas mal de gens, ces derniers soutenant la beauté de la galette, qui semblait impérissable pour une décennie. Bon, il faut dire que depuis quelques années, avec tout ce qui était estampillé “Techno come from Allemagne”, je faisais vachement gaffe, presque traumatisé par une vague de disques impossibles à ingurgiter, souvent estampillés d’un cinglant Minimale qui me refroidissait assez souvent.
Quoi qu’il en soit, même si le disque précédant était parti, selon les dires, pour devenir un classique, Jens Uwe “Popnoname” Beyer a à peine mis un an pour nous balancer son petit frère, le bien nommé Surrounded By Weather.


Attention, que les effrayés (j’en fais parti) par mon premier paragraphe contenant les mots techno + minimale se détendent (en plus il n’y a pas Berlin, j’ai fais soft), Popnoname imprime une recette bien différente des susnommés. Le patronyme lui-même choisi par Beyer pourra parfaitement éclairer sur la direction musicale de son projet : Une pop sans nom. Une pop masquée, dissimulée, qui ne veut pas se faire repérer, car l’idée d’un mélange pop et techno fait encore plus peur aux puristes que le nouveau single de Hakimakli version fr. La musique de Popnoname, c’est bien de la Techno. Une Techno candide, aérienne, cristalline. Qui dérobe les mélodies de la pop, pour les fracasser sous un métronome monolithique. En plus, c’est Kompakt qui distribue le bonhomme. Appréhensions annihilées.


















Il doit y avoir une mode cette année, consistant à insérer des formes géométriques colorées dans un décors quelconque, vu le nombre d’artworks reposant sur ce principes A l’instar donc de Fuck Buttons, El Guincho, School Of Seven Bells, Pyramids ou Steeple Remove, entre autre, Popnoname colle une curieuse structure aux faux airs de vaisseaux aliens en plein milieu d’un panorama décrépi. Le livret assurera l’originalité avec un assemblage de cartes postales formant une longue frise de d’horizons, de Moscou aux îles paradisiaques, en passant par Montreal. Les lyrics seront sur le verso de ces cartes, écris à la main, et à peine plus lisibles qu’une ordonnance faite par votre gentil médecin traitant.










Des Lyrics ? Oui, car Jens Beyer chante sur la plupart des titres. Comme si Sebastien Schuller tentait de fricoter avec Technasia. D’ailleurs à l’entame du premier titre, 2012, on se demanderai presque si un petit saloupiau de vendeur n’aurait pas échangé le disque dans votre dos pour se venger de ne plus pouvoir reluquer la pochette du cd de The Sounds, parce que ce dernier à été retourné au fournisseurs car les cds qui se vendent pas, faut pas déconner, on les dégagent des rayons de la Fnac. Oui donc, étonnement, ce Cd estampillé Italic / Kompakt commence comme un disque de Folk un peu enfumé, avec un mec qui chante, simplement accompagné d’une gratte, et noyé dans les échos. On se laisse bercer, à moitié convaincu par cette comptine, à dodeliner des fesses sur le béton d’une cours, avant qu’un gouffre s’ouvre subitement sous notre humble séant : après une petite saccade, le morceau part dans une Techno pure et cristalline, avec un beat bien appuyé mais cajoleur, le tout habillé de quelques choeurs bizarres et autres litanies enjouées. La surprise résidait dans la rupture totale, ce grand écart entre deux parties qui ne devraient normalement pas cohabiter. Alors le morceau va tranquillement se dérouler, nous laissant le temps de profiter des nuages bien moelleux sur lesquels nous rebondirons avant de s’envoler vers le soleil.

La première minute du disque sera d’ailleurs le seul passage du disque dénué de sonorités électroniques, et Touch veut nous le marteler, démarrant directement sur un rythme martial, et un Popnoname qui semble complètement s’étouffer à l’entame de son couplet, genre petit oisillon qui veut chanter du Radiohead après avoir fait le marathon de Paris. Mais le gars se rattrape bien, et aligne une phase tubesque à base de “Cash rich make a wish / Flash light make it right / Smile feel make it real” qui parasitera longtemps les têtes. Le morceau, format chanson, finira sur une ouverture assez belle, démultipliant l’organe de l’allemand pour en faire une mini chorale, le tout sur les nappes de synthés qui vont bien.

C’est bien Id Card qui finira de nous convaincre d’aller nous rouler à poil dans les cumulonimbus, très belle track, choisie à raison comme premier extrait de l’album (et qui résume parfaitement ce que l’on pourra trouver dessus). La boucle hypnotique et duveteuse qui tourne sans fin dans nos oreilles, secondée par une petite mélodie volatile, n’est pas sans rappeler certaines perles de The Field. Le pied est surpuissant, et la basse fini d’enterrer les oreilles. Beyer chante enfin d’une voix assurée, presque prophétique, alors que des choeurs semblent épouser nappes et beats. Hop tu fais le con dans un ciel bleu éclatant, à te gausser de voir le monde en miniature.
Même combat pour The Movement, jolie tech-pop éthérée, noyée dans des synthés cristallins, et teintes vaporeuses, longue introduction planante, avant que le titre parte dans un bon trip dancefloor, avec un rythme rehaussé et une bassline qui fera lever les bras de tous les gens passant dans le coin.










“Hey les mecs, je sais aussi faire de la techno qui flingue les bassins !” semble d’ailleurs nous dire Popnoname avec Crack, rouleau compresseur pour clubs, avec une base rythmique énorme, surplombée une boucle massive et hypnotique, qui va se déplier pendant les trois quart du morceau, se permettant de partir en grosses saccades histoire de filer le vertige. Des notes angéliques tenteront bien de s’immiscer dans la fin du conflit, mais sans jamais perturber ce dernier. Bourrin, le titre n’en est pas moins imparable.
Pas de chant, comme pour son camarade Perspective, plus long titre du disque (pointant dans les huit minutes), sorte de négatif du précédant, alignant une techno céleste et limpide, entre nappes cotonneuses et une harpe bizarre. Bref, azur et ses potes les nuages sont de retour. Et ce n’est pas l’énorme break un peu Trance, avec ses synthés presque “pute”, qui me feront dire le contraire. La deuxième partie du morceau est plus enlevée, plus cabossée, t’écrase le corps et le coeur juste avant de décoller. Bonheur.

Et après avoir privé deux de ses compositions de voix, Popnoname va charcler les rythmes de The Smallest Part pour proposer la seule et vraie pop-song du disque. Une voix noyée dans les reverbs, et surtout une sublime mélodie distillée par un synthé grave et claudiquant. Rien de plus. Ca n’avance pas, ça n’évolue presque pas, et pourtant le morceau est un vrai diamant, un intermède hors du temps, un vortex sonore. Je ne m’avancerai pas en disant que cette piste est la meilleur de l’album, vu qu’elle en prend le contre-pied (dans la forme tout du moins) mais on est pas loin.

Love proposera elle une très belle pièce d’electro-pop, en constante ascension, avec ce synthé grandissant, avançant par strate, nous balançant directement dans l’espace dès que le rythme reprend ses droits, et qu’une guitare acoustique vienne titiller la corde sensible.
La conclusion du disque, Storm en étonnera pas mal, en tapant dans le coté Trance soyeuse et extatique, encore une fois superbe, bardée de nappes et de scintillements, le morceau s’envolant à n’en plus finir, à griller la colonne vertébrale. Dès que Popnoname se met à chanter, le titre chavire, les claviers s’enroulent sur eux même, ça brille de partout, on court dans la neige avec un temps éclatant, à regarder ses potes éclater de rire en s’envoyant au ralenti des boules de neiges, avant de partir dans une spirale qui transformera votre canapé en véritable rampe de lancement destination Lune. On aura même le droit à un sympathique morceau caché, qui interviendra non pas après dix minutes de silence, ni quinze, ni même vingt, mais bien 25 minutes ! ( ?!?? le grand n’importe quoi…) Bref, cette petite pièce bonus instrumentale, très réussie au demeurant, genre électro dans une caverne de glace avec des anges dedans et un gros beat qui fait tout trembler, est évidemment condamnée à l’oubli.












Il faut quand même prévenir que le disque est un disque clairement Techno. Certes, matinée de pop et autres litanies rêveuses, avec un chant omniprésent, mais Techno quand même. Les réfractaires au genre risquent donc de ne clairement pas adhérer, même si le disque peut permettre d’appréhender le genre avec douceur et évasion. Voir découvrir une pop bien secouée, qui a rarement l’occasion de s’ébattre sur ce genre d’écrins. L’album est loin d’être monolithique, et si la tendance est clairement au vol plané béat au dessus de pics enneigés, il reste quand même plein de surprises, de mélodies en tiroirs et autres terrains escarpés. Il faut imaginer, dans une fête foraine, le plaisir de courir dans un labyrinthe de glace, sans jamais se prendre se prendre un seul miroir en pleine gueule.


A noter que la sortie digitale du disque (I-tunes, Beatport and co) est tronquée d’un titre, Crack n’étant dispo que sur la version cd, qui a en plus le plaisir exclusif de contenir la ghost track.


Surrounded By Weather n’est pas miraculeux en soi, mais reste une excellente galette, proposant un mélange rarement aussi bien réussi (L’addition pop + techno est souvent casse-gueule). Parfaite compagne d’un avant sommeil, la musique de Popnoname risque aussi de se frayer un chemin pour tous ceux qui veulent se planter dans un canapé avec des rêves pleins la tête, ou regarder le paysage défiler à bords d’un Tgv.

Voir adéquat pour déambuler tranquillement, proche du coma, dans une ville noire et cradingue, en s’amusant à souffler de la fumée avec sa bouche. Quand il fait froid.













Popnoname – id Card











9 titres – Italic / Kompakt
Dat’












Gang Gang Dance – Saint Dymphna

Posted in Chroniques on November 11th, 2008 by Dat'


Before My Voice Fails







Il serait difficile de traduire par les mots mon impatience concernant l’arrivée du nouveau disque de Gang Gang Dance, sans conteste la sortie que j’attendais le plus cette année (et dieu sait les cds qui sont sorti. c’est dire l’ampleur du truc). Pourtant, la musique des New Yorkais n’a rien, de prime abord, pour retourner les foules à grande échelle. Pour cela, il faudrait que le monde se soit transformé en secte enragée, les gens courant à poil dans des rues multicolores, dynamitant les supermarchés pour se rouler dans la nourriture en hurlant, à baiser dans tous les coins en regardant Nrj 12 avant de se jeter par la fenêtre pour essayer de voler.


Gang Gang Dance, c’est surtout un disque, énorme, ultime, indispensable, coincé entre une demi douzaine d’Ep et d’albums, God’s Money. Ovni complet, qui balance des fulgurances pop sur des Everest expérimentaux, construisant des cathédrales enfumées absolues, coincées dans les limbes insondables de 4 vrais dingues. Le disque contenait sûrement ce que l’on pouvait décrire comme “premier vrai tube experimentalo-tribal” du siècle en la chanson Egowar, marathon de 9 minutes annihilant toute notion de perception et de conscience, et tutoyait une dégénérée perfection.
On peut dire ce que l’on veut, le disque n’était, et n’est toujours pas affiliable à une scène, à un genre en particulier, objet trop unique pour être classé, et trop sublime pour ne pas être laissé dans l’anonymat.


Mais malgré sa position isolée, en dehors de toute catégorie, on sentait, depuis longtemps, pointer quelques éclats de musique immédiate, appréhendable par tous, noyée sous trois couches de folie pure : Certains passages chantés de God’s Money. Ou l’énorme single Nicoman (M.I.A aura pu faire ce titre après avoir été plongé dans une marmite de Lsd) dans le Rawwar Ep, coincé entre deux pièces completement absconses et autistes.
Avec ce Saint Dymphna, il était temps pour Gang Gang Dance de démontrer que sous ses aspects affolés et affolants, le groupe pouvait lâcher de vraies bombes, n’étant pas qu’une tribu mystique anthropophage sortie de la jungle. Et si Social Registry édite toujours le groupe aux Usa, ce dernier va pouvoir débouler tranquillement en Europe grâce au label Warp.


















L’effroyable photo ornant ce Saint Dymphna pourrait apeurer les plus téméraires, qui sortiront de la Fnac en hurlant, s’arrachant les yeux avec un piolet, pour les filer au chien de la voisine. Certes. Mais tentons d’ignorer ces pulsions au combien alléchantes. D’ailleurs, pour l’anecdote, Sainte Dymphna est, parait-il, dans la religion catholique, la sainte des psychotiques, déséquilibrés et possédés, entre autre, tout en étant la “protectrice” des professionnels de la psychanalyse. Tout un programme.


L’entame du disque, Bebey, renvoie directement aux élucubrations instrumentales usuelles du groupe : Une plage mêlant pércus tribales et synthés virevoltants, sur quelques samples bizarres, tordus et énigmatiques. Mais sur le dernier tiers du titre, une saturation débarque, empli vos tympans, introduisant des cris brefs et concassés de la voix du groupe, Liz Bougatsos, qui percent la marche tranquille du morceau. Ça monte, ça monte, le tout prend méchamment de l’ampleur, bam, un rythme énorme vous claque en pleine figure, une transe aborigène noyée dans des synthés cristallins qui tournoies de partout, et c’est déjà le deuxième titre, First Communion. On a la tête dans les étoiles, on essaie de chopper les comètes, le métronome change du tout au tout, et devient imparable, frisant le tube, avec la chanteuse qui se met à pousser des petits cris, avant de balancer des baragouins dont elle seule a le secret. Ça chante, ça hurle, ça susurre, ça cajole, parfois completement à contre temps, c’est la grosse fête, tout le monde saute partout en se léchant le cul, démence pure. On va breaker, repartir tester les astres, avant de retomber violemment, pour définitivement fondre dans le soleil avec la dernière attaque, mirifique, d’une Liz qui semble vouloir toucher le ciel, en hululant comme une damnée cherchant ses cachetons dans le fond des chiottes. Bug, colonne vertébrale déjà hors service.


Ah oui, j’avais oublié de parler de la chanteuse justement. Car si un élément particulier à toujours fait fuir ceux qui tentait l’expérience Gang Gang Dance (outre la folie des compositions et le bordel organisé du groupe), c’est bien la chanteuse. Douce hystérique, à la voix absolument inqualifiable, chahutant n’importe comment sur les rythmes de ses potes. Elle ne hurle jamais, elle n’est jamais agressive (contrairement à la demoiselle de Melt Banana par ex), tout en incarnant parfaitement l’aliénation mentale. Faut imaginer une souris blanche sous ecstasy avec une guirlande de pétards dans le cul qui chanterait à la Star ac sans prompteur, et vous tenez presque le truc.

Mais justement, celle qui semblait, sur les précédents disques, completement hors contrôle, va sur St Dymphna poser parfois sa voix, et réussir à chanter presque normalement. Si si, normalement ! Je vous assure, c’est difficilement envisageable quand on a connu ses performances passées, mais c’est le cas. Prenez la description du dessus et enlevez les mots sous ecsta et ça devrait être bon. Bon, j’ai bien dit “parfois” hein.

Et plus que ce ravalement de façade vocal, le groupe semble vouloir s’ouvrir, ne plus s’emmurer dans leur mixture introuvable ailleurs. Ce nouveau disque, c’est surtout l’occasion de prendre des bouts de pop, de hip-hop, de techno, pour les foutre dans la marmite de base. S’adapter, avaler, voir balayer du mainstream, et les dérouiller à la sauce GGD.











Blue Nile, troisième titre, synthétise superbement la description du dessus. Démarrant sur un beat Techno sourd, le titre va rapidement accueillir des cordes orientales. On plane, c’est beau, rupture abrupte, un excellent rythme Hip-hop super sec débarque, Liz reste loin, sa voix se superpose pour faire des choeurs, tout se mélange. Constant chassé croisé entre les deux bases rythmiques décrites si dessus, ça tue tellement que je ne sais pas quoi dire. Le retour du beat Techno après les gémissements divins de la chanteuse me broie l’échine, c’est à crever. Juste sublime, l’un des plus beaux titres du groupe.
Ce tour de force sera pris en contre-pied par l’étrange Vaccum, sorte de sirène qui se ferait remixer par des indigènes en slow motion, avec une couche de claviers Noise par-dessus. Ca avance en claudiquant, avec des percussions matraquées comme jamais, étrange.

Cet intermède obscur introduit d’ailleurs ce qui est, incontestablement, ze tube du disque, Princes. Et qui accueille (je ne l’ai pas cru la première fois que j’ai vu ça) en featuring Tynchy Stryder, tête du Grime anglais. Gang Gang Dance et le Hiphop, on le sentait perler dans les rythmes, mais là, c’est carrément un Mc qui va se fondre dans la musique du groupe, volant la vedette à Liz pour pondre un morceau de hip-hop complètement hors norme. L’intro est d’ailleurs cristalline, très vaporeuse, bien électro, s’enroulant sur elle-même, ravissante caverne de glace.
Mais des yo ! et Gang Gang ! se font entendre, avant qu’une rythmique pachydermique déboule, renversant tout, laissant Tynchy débiter son texte comme un dingue sur les basses ronflantes. Hop, ce que l’on croit être le refrain n’est en fait qu’une incartade mystique et aérienne où l’autre harpie va gigoter et piailler pour quelques secondes, aidant le morceau à partir dans un délire Tribalo-electro terrible, amorçant un deuxième et dernier couplet pour le Mc, qui enterre vos oreilles à coup de pelle. Imparable, idée géniale, grosse mandale.

Tellement grosse que le groupe va calmer le jeu sur les deux titres suivants. La première moitié d’Inner Space semble tout droit sortie du premier disque de Burial, avec cette rythmique sèche si caractéristique, avant que le tout parte en couille dans un délire 8bits-tribal-dub lumineux et joyeux. On se croirait presque en dessous d’une cascade à danser avec ses potes, alors que des cuivres jamaïcains débarquent pour faire la bringue.
Petit à petit, des synthés électro débarquent, ouvrant Afoot, qui nous fout dans un tunnel Techno planant, sans beats, remplacés par des bruits métalliques. Liz s’essai au spoken-word prophétique, le synthé se fond dans des échos troublants, les reverbs bouffent toute la piste, et la Techno se transforme en Dub halluciné, malsain et ensorceleur. Superbe et fascinant.










Et c’est là que débarque House Jam, qui, à sa manière, réussi le même exploit que Princes : Prendre une base completement opposée à la sauce GGD, pour se l’accaparer et transformer le morceau en tube expé. Apres le Hip-hop, c’est la Pop que les New-yorkais vont asservir. Le titre s’ouvre sur des choeurs hypnotiques un peu cheap, et un gros synthé bien gras, bien pute, toujours greffé à une rythmique flinguée, seule vestige de racines cramées.
Liz ne chante plus comme une Minnie Mouse qui aurait pris de la coke, mais tente d’imiter Britney Spears en feulant façon candide coquine.
L’exercice super casse gueule se transforme en énorme réussite, étonnante, prouvant que Gang Gang Dance peut aussi faire des chansons presque normales, construites, et surtout (cramponnez vous) avec des refrains ( !!?!). Sauf que le naturel revient vite, et l’on sent que la chanteuse perd petit à petit le contrôle de sa voix, qui vrille, avance sur le fil, se faufilant entre les claviers orgasmiques de la chanson. Le final sera instrumental, basé sur un superbe solo de guitare extatique. On hésite entre le tube pop dont on aurait mélangé les bandes, le r’n’b pour asile et le groupe de camé qui essaierait de faire une cover du Voyage Voyage de Desireless.

Seul interlude du disque, le bien nommé Interlude (No Know Home) laissera pendant une minute quelques synthés électro se dérouler, chahutés par une saturation cradingue, faisant le lien avec l’aberrant Desert Storm, titre completement cintré, faisait directement références aux attentats tribalo-épileptiques de God’s Money, le rythme colossal débarquant presque sans prévenir, sorte d’enchevêtrement de percussions et de basses ronflantes. C’est juste énorme, et pour parachever le tout, la chanteuse a repris tous les excitants de la terre, pour retrouver son hystérie schizophrène, partant en couille à chaque mot, entre susurrements malsains et piaillements frénétiques, en laissant le rythme derrière elle. Le morceau se calme, échouant sur une grosse vibration, on a presque l’impression que le tout va repartir en electro hardcore, mais l’ecstasy sonore reprend ses droits, pour un passage completement délirant, entre mélodie enfantine et massacre rythmique, avant une dernière bronca, un pétage de plomb ultime et suffocant, qui laisse le bon sens sur le carreau. Etonnement, le titre agonisera sur une superbe ligne de guitare, mélancolique en diable. Passez ça dans un lieu public, et regardez le monde se transformer en espace informe et plein de couleurs, avec des êtres charmants et cannibales qui courent partout pour se bouffer la gueule.

L’album se conclura sur Dust piste instrumentale apaisée, entre mélodie aérienne, presque ambiant, et chapelet de tambourins. Pour le coup, on plane à mort, on est presque lavé de tout le vertige engendré par les musiques précédentes. C’est un peu se balader dans un désert à dos de chameau, avec le soleil qui se couche et le guide qui joue du synthé.












St Dymphna est un disque énorme. Jamais je n’aurais pu m’attendre à ce que Gang Gang Dance puisse autant ouvrir sa musique, sans perdre un iota de leur folie.
En extrapolant un peu, ce St Dymphna est à l’expérimentalo-tribal ce que [ insérer la mention souhaitée ] était au [ insérer la mention souhaitée ]. Un disque qui tire les plus obscures forces du genre pour les faire copuler avec une musique immédiate et ouverte à tous.
Princes est hip-hop, House Jam est pop, No Know Home et Afoot seraient des track techno si on leur greffait un rythme en plus. Mais ces derniers sont tellement explosés, aliénés, épiques, qu’ils en deviennent uniques, et toujours insaisissables. Les Gang Gang Dance n’ont pas oublié leur folie, pire, ils la cultive, et s’immiscent dans la normalité pour mieux la détruire.


Alors certes, Gang Gang Dance peut maintenant être affilié à toute une branche de musique, d’ Animal Collective et autres tarés from New York, en passant par les Liars, ou les japs de Boredoms, leur musique se déployant clairement sur le monde, ne poussant plus dans le jusqu’auboutisme expérimental. Mais le groupe ne perd pas son identité, il la déplace, la retourne et la malmène.

L’album se tient de bout en bout, alignant morceaux mémorables sur morceaux mémorables, et peut même se prévaloir d’être un disque important. Pour ce que j’aime tout d’abord, se permettant de dérouiller la plupart des disques sortis cette année. L’album fera date, je suis sur que certains illuminés en parleront encore dans quinze ans. (et j’imagine être de la fête)



Mais important pour la musique expérimentale surtout, qui se retrouve propulsée au firmament, atteignant enfin l’impossible équilibre : celui qui pousse à être autant apprécié dans un club du centre ville que dans une réunion de défoncés chroniques cherchant à rejoindre le soleil en se noyant dans les psychotropes.



Grand disque.










Mp3 : le barge “First Communion” et l’énorme “Princes”




Gang Gang Dance – First Communion (clic droit / enregistrer sous)


Gang Gang Dance – Princes feat Tinchy Stryder (clic droit / enregistrer sous)











11 titres – Social Registry / Warp
Dat’











Gang Gang Dance – God’s Money

Posted in Chroniques on November 9th, 2008 by Dat'


Voodoo People







On allume le feu, on sort les poupées vaudous, les aiguilles, les percussions et surtout les plus violents psychotropes.

Décrire la mixture? Impossible, à part dire qu’elle va vous faire partir bien haut. Une sorte de Rock déglingué et expérimental, agrémenté d’éléctro, de racines tribales et saupoudrée de pop et de dub, le tout habité par une grande prêtresse névrosée… Vous n’avez rien compris? Tout s’éclaire et se confond à l’écoute.












Une pochette qui a vraiment de la gueule, annonçant bien la couleur, et un livret qui a la bonne idée de proposer les paroles.


Si j’avais un conseil à donner sur ce disque, c’est de foncer sur la troisième piste, Egowar.
On tient là morceau majeur de la musique barrée, défoncée, perchée, originale, expérimentale… 9 Minutes complètements hallucinantes. Un travail des sons qui impressionne. Une ossature Rock, des effets Dub, des sonorités Pop, et un son tribal qui habille le tout. Mais ce qui étonne le plus, c’est cette voix, qui survient sans prévenir. Hallucinée jusqu’à l’os, presque incompréhensible dans ses propos, elle semble chanter comme le ferait un prêtre shaman dans une danse rituelle.
Un break survient, le tout fond dans un marasme d’échos, flirtant avec l’explosion sonore. Puis la calme transe reprend ses droits. On voyage comme on n’a rarement pu le faire avec un simple disque. Le titre se conclu dans le même schéma que le break dubesque du milieu, en poussant les échos à leur paroxysme, sur presque 2 minutes. On entend les guitares geindre, des instruments se noyer, et la voix qui tente de surnager au milieu de ce tsunami sonore. Il en serait presque dangereux d’écouter ce titre sous l’effets de drogue ou d’alcool quelconque.
Pas compliqué, simple d’accès même, il en reste pas moins complètement différent de la quasi-totalité de ce que l’on a pu écouter jusqu’à lors…
Surtout que le tout est mené de main de maître.
Comme si My Bloody valentine était parti en stage défonce au fin fond d’une foret peuplée d’Incas…




A dire vrai, et pour notre plus grand plaisir, Egowar n’est pas la seule claque du disque… On revient en arrière pour les titres le précédent. Car après la mystique intro God’s Money I (Percussion), on débouche sur un autre énorme titre, A. Glory In Itself B. Egyptian.
L’ensemble est clairement plus foisonnant que le monument précité…
On tombe sur un titre construit de multiples nappes électros toujours en mouvement, avec une chanteuse hystérico/controlée.
C’est le grand huit de la danse vaudou. Les sonorités tribales pleuvent, tout se mélange. Pas la peine de se raccrocher à une discernable ossature comme sur Egowar ici tout part en couille. On se fait envelopper par les musiciens, completement maître de la cérémonie. On se sent attaché et suspendu à un poteau, avec les quatre membres du groupe qui tournent autour de nous, scandant des formules magiques, le feu nous grignotant les doigts de pieds. Sensation sublimée à la moitié de la piste, le titre prenant une surprenante tournure presque groovie, malsaine, tordue. La mise à mort est proche, la grande prêtresse se bride de moins en moins, sa voix tutoyant les aigues et graves avec une facilité déconcertante. C’est de toute façon impossible à coucher sur écrit, malgré tout le vocabulaire que l’on s’évertue à vomir.




Manque de pot pour celui qui tente d’écrire sur ce CD, le groupe fait encore mieux trois pistes plus loin. Parce qu’atteindre le niveau proposé avec Before My Voice Fails, c’est du rarement vu. Même recette que ses grands frères, avec cet enchevêtrement de nappes et tissage electro, cette ossature rock, flirtant avec le violons “synthétique”, ses allures de pop, cette batterie bien appuyée et mélange bien perchée de sonorités venues d’ailleurs. On note l’apparition de samples d’instruments à cordes, renforçant le coté “foisonnant” du titre.
Mais là ou ce dernier prends tout son intérêt, oû il tutoie les sphères du génial c’est juste à sa 4eme minute. Tout explose, pour monter plus haut que le paradis. Même les anges ne peuvent pas suivre. La chanteuse, si instable, si déséquilibrée, mue sa voix démente en vrai chant pastorale. On navigue dans la chorale d’un asile psychiatrique. C’est beau comme la mort. Le mur de violon, cette voix divine, ce martèlement rythmique. La première écoute fut un vrai choc en pleine gueule.
S’envoler dans un gouffre sans fond. Ou chuter inlassablement vers le soleil, au choix.




On ne touchera plus les dieux de la même façon, sur le reste des pistes, mais l’on continuera l’aliénation shamanique de la plus belles des manières, ne serait-ce qu’avec Nomad For Love (Cannibal), plus calme, presque linéaire par rapport aux mets distillés à longueurs des sillons de “God’s Money”. Les basses sont plus rondes, le tout est plus épuré. Un dub minimal et froid. La chanteuse par toujours autant en couille, mais sans excès, flirtant avec le Spoken Word sur la fin, répétant les mêmes mots sur fond de reverbs et tripatouillages en tout genre.




Le groupe laisse aussi la douce folle taire ses incantations pour quelques plages instrumentales, liant les pistes principales entre elles, comme des longs ponts tantôt planants, tantôt angoissants, toujours surprenants et singuliers.
On notera donc le presque étonnant God’s Money V, ou une rythmique tribale parsemée d’éclats métalliques pencherait presque vers un Hip-hop desséché, ou le cristallin planant Untitled (Piano), tout droit sorti d’une cave de glace, finissant sur un trip saccadé noir et oppressant.
Même début d’ambiance « moins zero degré » avec God’s Money VII qui évoluera lui sur une électronique bizarroïde, peuplée de petits bouts acoustiques difficilement identifiables. Un trip qui aurait pu avoir sa place sans rougir dans le mirifique “Druqks” d’Aphex Twin…

Pour finir, et toujours dans la veine des “instrumentaux”, le disque se conclue avec le petit chef d’oeuvre God’s Money IX. Excellentissime, indescriptible encore, oû une batterie et une guitare se noient dans des synthés fantomatiques, semblables à des plaintes d’âmes errantes.







A vrai dire, et contrairement à pas mal d’autres “aliens musicaux” chroniqués dans ces pages (Guinea Pig, Merzbow, Orgasmic…) ce disque couvre un spectre extrêmement large. Il pourra plaire aux amateurs de Rock, de pop, d’electro, de musique bien “ethnique” et de toute autre expérimentation sonore sortant terriblement des sentiers battus.
Cela ne ressemble à rien d’existant. Et après avoir écouté un disque pareil, on n’a franchement plus le même regard sur les productions “normales”, un peu comme Mr Bungle pour le rock, ou un Aphex Twin pour l’electronique…
Une écoute d’extraits de trente seconde n’a encore ici aucune signification…

Ce fut clairement pour moi l’un des 5 meilleures disques de 2005.

Il est aussi l’un des disques qui représente pour moi le plus la défonce sonore, les expériences sous psychotropes et les sons carrément perchés, tout droit sortis d’une autre dimension. Les structures et architectures musicales n’ont rien de commun, et la voix de la chanteuse, completement hallucinée, dégénérée, aliénée, contribue à ce son abreuvé de trips artificiels, d’une recherche musicale rare.

On est autre part, dans le délire et la tête de quatre musiciens qui viennent, ou en tout cas pensent et vivent dans un autre monde.






Indispensable et essentiel, sincerement…








9 titres – the Social Registry
Dat’







Gang Gang Dance – Retina Riddim

Posted in Chroniques on November 9th, 2008 by Dat'


Blink Of A Sightless







Un nouveau disque de Gang Gang Dance, groupe extraordinaire et inclassable sortant une musique qui n’a pas d’équivalent dans le psychédélisme tribal, comme derniers shamans encore vivant sur cette pauvre planète. Leur dernier album, God’s Money arrivait à faire le pont impossible entre Brian Wilson, Animal collective, Aphex Twin, Dead Can Dance et bien trop de références encore. Accoucher d’un disque parfait en somme.

Et voila que la bande revient avec un disque + un Dvd, Retina Riddim le premier comprenant une seule piste d’une demi heure, et l’autre un film d’environ 35 minutes. De Graw étant le membre le plus impliqué sur ce projet… On est interloqué, on regarde l’objet avec curiosité et circonspection. Mais impossible de ne pas se laisser tenter quand on a posé au moins une fois l’oreille sur l’un des précédents disques du collectif.












Pochette rectangle qui dépassera d’une tête tous vos autres disques soigneusement rangés, Retina Riddim se déplie en deux battants dévoilants des gorilles (animal semblant avoir une place dans le coeur du groupe, vu leurs déclarations… ) qui se regardent dans une glace avec un air circonspect, le tout contenant aussi un simili « poster » avec une photo bien énigmatique d’une part, et les crédits du disque au verso qui sont tout simplement illisibles (car agencés comme des mots croisés…)








Et là, un problème se pose. Evidemment, on écoute le disque de fond en comble avant d’en parler. A partir du moment ou le projet d’en faire un texte est établi, à chaque écoute, on se demande bien comment présenter tout ça… Ok, dans le cas présent, vu le caractere indescriptible de la galette, on va faire un « moi je », qui traverse plusieurs villes du monde, diverses ambiances, tant ces 30 minutes de musique changent du tout au tout : Château versaillais, Rave londonienne, jungle amazonienne, village africain, plages d’Australie… Oui bonne idée. Sauf que tout fini par s’entremêler, et qu’il est bien difficile d’être dans plusieurs pays à la fois…
Bon on va se la jouer gros trip de drogué, avec différents effets qui vous démonte la tête, vous faisant voir toute sorte d’horizons, vous faisant planer avant de vous occire de la meilleure des façons… Ouaip facile, bonne idée de chronique. Sauf que même avec cette méthode, le tout reste trop périlleux à décrire, et donnerait un résultat bien obscur, reléguant Las Vegas Parano à une simple nouvelle du Journal de Mickey.


Alors on va se limite à une simple description, tant bien que mal, de ce Retina Riddim. Un simple petit tour du propriétaire, sans exercice de style stérile et compliqué. Car ce disque l’est bien trop… Sans être une seule seconde prise de tête. Une petite demi-heure donc, 25 minutes pour être précis, de musique. Qui ne s’interromps jamais. Une grosse piste quoi. Mais attention, plus comparable à un Roller Coaster pour drogué qu’une longue plage d’ambiant tirant vers la somnolence.








Presque étonnant, ce Retina Riddim débute sur une musique classique, des violons fragiles, faiblards, collés les uns sur les autres, tentant de vous arracher une larmichette, grinçant ou montant vers les cieux. Musique de chambre moderne. Mais des percussions sourdes se font entendre. Des choeurs au loin, perlant comme si des naïades dansaient autour d’un feu. Qui font irrémédiablement penser au très bon disque de Panda Bear, « Person Pitch »
Et ce ne sera pas la seule analogie que l’on fera avec ce disque. Car la démarche, au fond, est foncièrement semblable, même si Gang Gang Dance nous offre ici une (seule) balade bien plus diversifiée que la dernière galette du petit gars des Animal Collective (groupe parcourant la même route que GGD). On assiste à un ensemble de collages, de jeux d’échos, de sonorités tribales, de relents conséquents de LSD, de choeurs planants…

Le temps d’y penser que le titre nous plonge dans un manège un peu cassé, un peu vieillot, tournant sans grand espoir d’avoir des enfants juchés sur ses cheveux en plastique, le tout toujours parasité par de bruits plus ou moins identifiables, virant d’une tribu indigène en plein transe à des machines d’usines fonctionnant à plein régime. Et hop, on est parachuté dans un rythme enlevé, plein de percussions africaines, samples d’instruments du Moyen Orient qui mutent par réverbérations et autres éclairs indus détruisant la bonne marche du tout…
La voix si unique de la chanteuse du groupe n’apparaît presque pas, fantomatique, noyée dans ce maelstrom tribal, qui explose tout à coup et vire dans une Electro acid à toute allure, accompagnée de prières, semblable à un Luke Vibert ou un Ceephax bien énervé. Psychotique, on passe de la musique tribale à celle d’une Rave champêtre. Mais ce n’est pas tout, car l’électronique vire carrément au Thunderdome, avec des Basses ultra puissantes typiques du Hardcore, balayant vos tympans comme des vulgaires châteaux de sables. Le choc est de la partie à la première écoute, à ne pas écouter en voiture pour éviter l’accident. Mais le tout s’apaise après quelques minutes, pour mourir sur des nappes de synthés désincarnées…

Pas le temps de se retourner, Retina Riddim va nous proposer un collage de sons, de voix, de rythmes, tirant vers le Hip-hop mutant, parsemé de drones et de fûts maltraités. On se croirait presque dans une relecture du spectacle Stomp faite par des dégénérés. Les violons vont refaire surface pour se mêler au tout, c’est superbe. Et surtout cohérent. Donnée importante pour un disque de Gang Gang Dance. Un lego musical.
Et cela va continuer sur une bonne demi-douzaine de minutes, à renouer par petite strate avec la saveur « tribale » du commencement, à nous faire de plus en plus planer, en jonchant la structure d’échos et de brisures informatiques.
La conclusion sera un peu énigmatique, avec ce clavier sorti d’on ne sait ou, de ces bruits bambous entrechoqués, et de ces samples tout droits sorti d’un jeu de combat ou de vieux films crapoteux…







Voila pour la partie musicale. Le Dvd donc… Le Dvd ? Impossible de remettre la main dessus. Bizarre. Sûrement égaré, dans ma pile de Cd. Une des premières fois que cela m’arrive. Il suffit de l’avoir glissé par inadvertance dans un boîtier que l’on a rangé, et hop, introuvable. Alors ce texte sera mis à jours si je retombe sur l’objet… Dommageable quand même.








Que retirer de ce Retina Riddim ? Que l’on tire vers quelque chose de presque « arty », riche, planant et torturé. Cela ne ressemble à rien de connu, balaye dix styles différents en une demi heure. On pense à un Panda Bear crade et désincarné, à de multiples paysages mis bout à bout de la plus belle des façons.
Intérressant pour les fans de Gang Gang Dance, complètement inutile pour les néophytes du groupe…
Pour ceux qui ne connaissent pas vraiment, il serait même péché de commencer la découverte avec ce disque. IL FAUT écouter le précédent, God’s Money, absolument hallucinant et incontournable.



Pour le reste, et comme il est défini dans le Sommaire de ces pages, ce disque est un vrai « alien musical » qui, de part son caractère expérimental sans compromis, ne plaira à personne… ou presque…









1 Titre (25 minutes) – The Social Registry
Dat’











Hood – Cold House

Posted in Chroniques on October 31st, 2008 by Dat'


Neurasthenic Boyz ?n the…







J’étais parti sur un article traitant du nouveau Deerhunter. Fortement impressionné par le précédant disque, Cryptograms, petit bijoux experimental-electro-shoegaze assez dingue, bizarrement devenu culte, j’ai foncé sur la nouvelle livraison. Manque de pot, le premier disque du double album Microcastle ne m’évoque (pour le moment) pas grand-chose. Je me rassure en me disant que je n’ai pas encore écouté le la deuxième galette, que je suis un peu fatigué, que c’est la crise mondiale et que tout plein de disques sortent en retard. Mais pour le coup, c’est un peu dommage.
Reste qu’il pleut pas mal, qu’il fallait quelque chose pour ses oreilles, histoire de marcher dans la nuit pendant quelques temps, en cherchant désespérément un endroit ouvert pour se sustenter. Et c’est là qu’il est judicieux de déterrer ses anciens disques.



Hood, groupe anglais, de Leeds est un cas un peu à part. Et l’album Cold House encore plus. Le groupe fut, et reste connu pour ses balades post-rock et expérimentations pop plus ou moins acoustiques. Mais l’album Cold House lui, plonge cette post-pop dans une recette completement electronica, voir IDM. Plus étonnant vu le passif musical du groupe, plusieurs morceaux ont été réalisés en collaboration avec Why ? et DoseOne, ce dernier n’ayant encore pas encore trempé dans ses délires pop flinguées, ses groupes Themselves et Clouddead étant alors toujours d’actualité.





















L’artwork représente parfaitement la musique de ce Cold House. Quelque chose de flou, de lumineux et de froid dans le même mouvement, traversé par quelques silhouettes fantomatiques. Le texte bordélique perlant sur le coin gauche de la pochette présente bien le Tracklisting, et l’on aura à peine plus d’info dans le livret rachitique et brumeux.


Ce qui est par contre limpide, c’est que le disque démarre avec son plus beau morceau, They Removed All Trace That Anything Had Ever Happened Here, cristallisant à la perfection cette dualité electronica-pop, avec un DoseOne et un Bracken, chanteur de Hood qui se permettent de t’arracher le coeur en cinq minutes trente. Guitare esseulée, violon à se flinguer, le tout perdu dans des échos, dans un espace infini, plaine désolée et inhabitée. Et ce rythme ! Simple fissure rampante au départ, cette petite bête va graduellement prendre de l’ampleur, s’enrouler, former un amas click’n cuts étrange, rapidement soutenu par des percussions martiales, flinguant le semblant de confort que l’on osait espérer à l’entame du morceau. Ça s’emballe, ça se nécrose, implose, mute, sans jamais exploser, sans jamais déranger la voix pure de Bracken, triste, presque désemparée, qui égrène son texte sans sourciller. Le violon le colle dans ses intonations, c’est à tomber. Il semble implorer le ciel de laisser perler quelques rayons de soleil.
Voix nasillarde, répétant une phrase à l’infinie, DoseOne rentre en piste, semble observer la scène du haut d’un nuage en débitant à la vitesse de la lumière sa sentence. Le Mc se dédouble et pose au dessus de son flow tgv une litanie bizarre dont lui seul à le secret. Ça fait presque mal, la montée du morceau, discrète, est pourtant parfaite. Tout se pose, s’éteint, avec DoseOne s’éloignant petit à petit sans jamais stopper le débit, pour finir à quatre pattes, chuchotant dans l’esgourde d’un violon malade, qui semble cracher sa dernière mélodie avant de crever. Je ne sais pas pourquoi, mais je trouve ce morceau absolu. Sûrement le meilleur du groupe anglais. Mais aussi l’un des meilleurs trucs où DoseOne ait pu poser sa voix. C’est sûrement débile à dire, mais ce truc m’a toujours renversé, même après des années d’écoutes. Et il devrait au moins continuer son office pour pas mal de temps. Un morceau évident, qui te retourne la gueule, qui te déchire les tripes sans jamais en faire des tonnes. Pire, il reste dans son coin, distille son venin, te happe, et ne se lassera jamais de t’étrangler. J’imagine qu’il doit laisser indifférent la plus part des gens, mais c’est comme ça, on ne peut rarement expliquer les histoires d’amour avec des termes rationnels.


Son copain suivant ne laissera pas Hood desserrer son étreinte, tout en se permettant d’être plus optimiste, plus éclairé, malgré son implacable intitulé, You Show No Emotion At All. Débutant sur un rythme électro assez appuyé, un peu saturé, le morceau va se muer en vraie incartade pop, avec une guitare acoustique qui va tenter de surnager, et un Bracken à la voix lumineuse, malgré des lyrics accablés. Le synthé qui virevolte distille une mélodie immédiatement appréhendable sous la douche, et que l’on retrouvera chez des groupes comme The Notwist, période Neon golden. Chute, le piano doit assurer la partie seule, avant que le chant devienne un peu plus vindicatif (toutes proportions gardées), et s’effacer au mieux devant une montée de cuivres, avec un rythme qui n’en peu plus de rouler sur lui-même, tenant vainement de se soulever.











C’est sur la troisième piste, Branches Bare, que DoseOne va se repointer au micro, accompagné de son hirsute camarade Why ?. La tonalité est clairement plus lugubre que précédemment, avec une basse sombre couvrant des bruits non identifiables, et un piano sépulcral suppurant une mélodie à pleurer. Le rythme est craché par une vraie batterie, boitillante, en perte d’équilibre. Le chant est là pour un mini couplet, et un refrain désabusé, avant que les deux zozos d’Anticon débarquent en fanfaronnant, comme deux clowns dans une église, balançant un rap chewing-gum tranchant avec l’entame du morceau, pour finalement se retirer sans crier gare. Le piano revient à la charge, mais une beatbox prend le dessus, dégageant les fûts pour balancer un rythme hip-hop énorme, parfaitement en symbiose avec les instruments plaintifs, malgré le caractère incongru de l’opération. 6 minutes accouchant d’un superbe alien.

On recroisera les deux énergumènes sur le dernier morceau de Cold House, au titre toujours aussi joyeux, You’re Worth The Whole World. Guitare acoustique, percussions sèches, avec un flow de Dose qui se retrouve tordu, accéléré, saccadé ou ralenti au grés des circonvolutions, parasitant le Spoken word sombre et abscons de Why ?. Le piano prendra le premier rôle quelques instants, pour que Bracken se retrouve lui aussi chahuté par un semblant de vocoder, transformant sa voix en un simple filet grésillant. Parfaite conclusion d’un disque, qui fini en se ralentissant à l’extrême, laissant une voix d’androïde habiter les dernières secondes.

Entre temps, il n’y aura pas que des expérimentations alambiquées et atmosphères résignées. Enemy Of Time fera dans la belle chanson pop, aux saveurs acoustiques. Apres un couplet chanté, le morceau va laisser perler un violon, un hautbois et un piano pour atteindre des hauteurs à filer la chair de poule, histoire de planer les bras bien ouverts vers le soleil, en tentant de ne pas s’écrouler sous le poids d’une mélancolie débordante.
On appréciera également le swing étouffé de Lines Low To Frozen Ground, sorte de piano-bar enseveli sous les gravas, tentant de regagner la surface, pour nous greffer une paire d’ailes au deux tiers de sa progression.










Reste que l’electronica aura encore la part belle au Coeur de Cold House : I Can’t Find My Brittle Youth, étonnera, démarrant comme un morceau de pop rock frontal, toutes guitares dehors. On sent une rythmique un peu breakée, tentant de partir en Drum & Bass, mais le titre se tient droit, façon rock anglais, avant de se faire petit à petit bouffé par des brisures que l’on croiraient sorties d’un Squarepusher. Le final frisera l’apocalyptique, si l’on compare avec l’entame, la pop-rock du début se muant en Drill pour un bref instant, avant d’échouer dans un nuage cotonneux de bruit blanc.

The winter Hit Hard versera lui dans l’ambiant-electro, noyé dans les échos, et parasité par des crépitements métalliques. Bracken, lâche quelques phrases sereines, bouffées par les revers et les saccades. Un rythme déboule de l’horizon, claquant comme l’enfer, tonnant au loin, pour se ruer dans vos oreilles, et bousculer cette boite à musique cristalline à coup de Drum-dub psychotropé en slow motion. Le chant, presque acculé, se fait plus fort, frôle l’exclamation, avant que le titre se nécrose, crépitant tel un feu en fin de vie.

Mais c’est clairement This Is What We Do to Sell Out(s), véritable complainte à la Autechre, qui aurait même pu être affiliée au duo de Warp, si ce dernier avait un jour décidé d’accueillir un chanteur sur leurs compositions maniaques. Le rythme est évidemment indescriptible, completement gangréné, organique, sorti d’on ne sait quelle machine, mutant toutes les trois secondes, se brisant dans des crissements maitrisés, avant de reprendre la chevauchée instable de plus belle. Jamais agressif, le lit rythmique semble pourtant incontrôlable au premier abord, completement écartelé entre l’envie furieuse de bouillir ou de disparaître à jamais. La voix, qui semble ignorer le maelstrom ambiant, chante lentement, accompagnée d’une guitare tranquille et d’un violon monocorde, ne voulant clairement pas participer à la bataille, tout en perdant clairement pied. Enorme morceau, presque unique, qui tient autant du folk lunaire que des précités residents de Warp.











Cold House reste l’un des meilleurs albums pour appréhender l’hiver, voir même toute phase de contemplation / introspection mélancolique. Et cristallise pour moi le meilleur album de Hood, le plus radical peut être, le plus beau et énigmatique assurément.
Certains titres sont juste mirifiques, touchant à la perfection, marquant à vie mes oreilles à coup de mélodies à chialer et excavations déroutantes. Outside Closer fera presque aussi bien, en ramenant un peu de chaleur au son des anglais, mais il n’a pas ce caractère exclusif propre à ce Cold House. Ceci étend évidemment exacerbé avec la présence de DoseOne et Why ?, qui dynamitent avec douceur les construction d’un groupe plongé dans une beauté froide et absolue.


Un disque presque indispensable pour les amateurs du genre.













HOOD with DOSE ONE – They removed all trace that anything had even happened here
La musique ne demarre pas avant la 12eme seconde…












10 titres – Domino Recording
Dat’











Leila – Blood, Looms and Blooms

Posted in Chroniques on October 26th, 2008 by Dat'


Something Wicked This Way Comes







Portishead et Tricky ne sont pas les seuls “gros noms” des 90 à revenir avec un nouveau disque. Leila, qui avait fait ses armes sur Rephlex, puis XL Recordings il y a 8 ans, revient sur Warp, comme si de rien n’était, après une longue période de déprime. Et comme si l’Iranienne avait traversée un vortex temporel, elle déboule en s’entourant des mêmes voix qui peuplaient ses fresques electronica-triphop. Car, que l’on ne si trompe pas, Leila ne chante pas sur ses disques et laisse le terrain à ses compères de toujours : Sa soeur évidemment, Roya Arab, qui a marqué son monde en hantant le somptueux Londinium d’Archive. Mais aussi Martina Topley Bird, la muse éternelle de Tricky, ou Luca Santucci toujours aussi présent, chantant sur les prods de Leila depuis sont premier disque, et mémorable sur le mirifique Even Spring de Plaid. Se greffe en plus le classieux Terry Hall pour compléter, entre autre, la grille de départ.
Mais que les amateurs de longues excavations électroniques désertées par les voix se rassurent, Leila semble avoir pour objectif de ne pas choisir de camp, pour servir autant de morceaux instrues que vocaux, là ou les précédant tendaient plus vers la deuxième option.

Et comme les autres précités plus haut, on sert drôlement les fesses en attendant le disque, en se disant que de toute façon, le disque sera moyen, voir raté, qu’il ne pourra pas réveiller les mêmes sentiments qu’à la bonne époque, les même plongeons dans les bains de mélancolie, les même secousses sismiques cradingues. On peut se détendre les joufflues, Blood, Looms and Blooms est une bonne petite claque.

















Si l’on m’avait soutenu que Leila était absente depuis 8 ans car elle voulait chiader son packaging, je l’aurai presque cru : Artwork ensorceleur (avec une Leila bien cachée, toujours juchée sur sa bicyclette), digipack cartonné super épais qui se déplie en quatre pour laisser apparaître les paroles des titres chantés (avec une police d’écriture jolie mais difficile à déchiffrer) et images d’éprouvettes bizarres. On a mis le paquet chez Warp. (On pourra même s’amuser à transformer le packaging en un triangle tenant parfaitement debout, si l’envie d’ériger un autel aux couleurs de Leila vous prend. Et ça c’est super classe, même si cela ne sert à rien)

Pour saisir le concept du disque (s’il devait y en avoir un) il suffirait d’écouter les deux premiers titres, parfaite synthèse des deux facettes que va offrir l’album : Une electronica tapant directement dans le coeur, dans la pure tradition Warp, et un Trip-hop soyeux, apaisé, accueillant des voix travaillées à l’extrême.









Focalisons nous d’abord sur les pistes instrumentales du disque, en commençant par deux petits chef d’oeuvres, Mollie et Mettle, qui devraient mettre d’accord tous les amoureux du genre. Mollie c’est l’incarnation presque parfaite de la nappe un peu cradingue, un peu saturée, qui vous perce de le cortex instantanément. Qui monte, qui monte, qui prend de l’ampleur, qui vous enlace, vous embrasse et vous étouffe. Les échos angéliques perlant sur l’entame contrebalancent l’aspect rugueux de la ligne d’horizon, qui grésille, qui sature gentiment. Break candide, petites clochettes étouffées, avant que le tout redébarquer avec une force ahurissante, faisant trembler les enceintes tout en vous envoyant planer dans l’espace. Terrible, ça se calme encore, on croit à la fin du titre, et vlan, une explosion énorme, cristalline, au grain de son affolant vous gicle dans les oreilles, comme seul Chris Clark sait normalement le faire. Leila ne pouvait pas se payer une meilleure ouverture pour son disque, nous ralliant définitivement à sa cause en 5 minutes seulement.

Un peu plus loin, c’est Mettle qui va travailler le grain cradingue-electronico-angelico-shoegaze, en plus sombre, plus brut, amis tout aussi époustouflant. Sans rire, le morceau est affolant, avec cette rythmique faite d’un beat hip-hop sec et de clapotis aquatiques. Une Bassline pachydermique débarque, zébrée de paraboles industrielles, bouffant une guitare esseulée, à peine distinguable, s’escrimant à se nécroser sur ses propres cordes. Le tout prend une ampleur hallucinante, ça pleut de partout, pause, on calme le jeu, on respire, rythmique monstrueuse, clapotis déchaînés, ligne de basse qui vrille à n’en plus finir, qui viole les oreilles, qui fait trembler les fenêtres du quartier. Ça se déchaîne, c’est extatique comme la mort, tripes malaxées, tympans explosés et tout le toutim. Ok merci pour le passage à tabac auditif, on repassera.
Et quand je citais Chris Clark , ce n’est pas pour placer une simple indication. Ces deux morceaux, par leur force, leur amplitude et ce grain si caractéristique, pourrait presque faire parti de l’album Body Riddle. Et vu la place qu’occupe ce disque dans mon ptit coeur, vous comprendrez la hauteur du compliment.


Dans un genre assez différent, mais toujours emprunt de cette mélancolie bousculée, Carplos plongera nos oreilles sur des nappes inquiétantes, spatiales, à la rythmique presque rétro, entre des handclaps ultra grillés. Comme si Leila voulait donner son interprétation de Blade Runner, en nous foutant dans cette cathédrale de synthés sortis des rues crades, vidées de toute vie, et surplombées de voitures volantes. Le titre va graduellement se faire bouffer par les échos, le métronome se démultipliant à l’envie, tentant de s’échapper de cette chape presque malsaine. Placé pile au milieu du disque, le morceau, contrastant avec ses camarades, ferait presque office d’entracte poisseuse et spatiale.
The Exotics placé juste après, laissera des hululements fantomatiques glisser sur une instrue claudicante, façon vieux manége cassé des caraïbe , lardé de quelques fulgurances saturés.
On sautera enfin sur place avec le joyeux Little Acorns, au rythme bien appuyé, aidé par des trompettes guillerettes. Break, on part dans un Hiphop mutant, bien rond, avec un gamin qui lâche des lalalala, des mmh mmmh ouuuhouuu et des incantations bizarres, avant de partir dans un Dancehall super bref. Marrant.









Coté voix, on ne pourra pas passer outre Daisies, Cats and Spacemen abritant Roya Arab. Que l’on n’a pas entendu chanter depuis… euh… le dernier disque de sa soeur Leila ? Comme si les deux soeurs avaient décidées de se mettre en berne au même moment, de s’emmurer dans le silence il y a 8 ans. Il est clair que le manque était, au final, assez immense. Même si cette dernière fut (presque) oubliée après ses pérégrinations précédant le nouveau millénaire, on peut décemment avancer qu’elle a sûrement l’une des plus belle voix qu’ait connu le Trip-hop, voir la musique électronique dans son ensemble. Celle qui m’a brisé l’échine pendant des années sur le Londinium d’Archive revient avec ce même grain de voix, indescriptible, envoûtant, pur et grave à la fois. Elle emporte, s’immisce dans votre être comme une volute de fumée. La musique n’est pas en reste, et distille, après un départ salement saccadé, une marche étrange, en suspension, presque funèbre. Le pied industriel, même étouffé, contraste avec les cordes pincées glissant tout le long du morceau. Et quand le tout se soulever, sans déborder, avec classe et retenue, accueillant violons et samples de vieux films, on chavire, on se laisse emporter. Tout est distillé à la perfection, construisant un univers qui plairait à Mr Jack et son noël, avec une mini bronca finale en rehaussant les textures crasseuses.

Pour continuer dans une veine féminine aux voix parfaites (décidemment), Martina Topley Bird envoûtera sur l’agressif Deflect, avec un synthé granuleux bien massif, une guitare acéré et quelques beats de rigueur. Le coté surchargé et caverneux de l’instrue se heurt à la voix de velours de la chanteuse, qui surnage avec grâce sur cette usine en implosion. Elle se permettra même de lâcher un tubesque I understand you like a baby / I won’t listen you like a baby qui pourrait se chanter sous la douche.









Mais ce sont bien les hommes, aux voix claires et célestes, que Leila aime triturer sur cette nouvelle livraison. En la présence de Terry Hall tout d’abord, sur l’étonnant Time To Blow, à la mélodie boitillante, encore flinguée par un beat crade. On se sent serein, on plane presque, mais Leila décide très rapidement de lâcher les chevaux, et de remplacer le rythme du départ par une Drum & Bass étrange, sèche, claquante, mais feutrée et jamais agressive. Le débit du chanteur ne change pas, toujours aussi droit dans ses pompes, à tenter de nous charmer en persiflant divinement, alors que la Drum devient de plus en plus présente, pour ensevelir la voix et pétarader dans nos oreilles.

Quand à Luca Santucci, il balancera sa voix spectrale sur 3 titres, dont le sublime et indéfinissable Teases Me , sorte de remix Trip-pop bizarre d’un Like Spinning Plates, avec cette même sinusoïdale aigue et bizarre en fond sonore, matraquée par un roulement corpulent. Le morceau fait les montagnes russes, mettant en valeur l’organe du Luca avant de le noyer, en passant par quelques pauses sereines, rapidement défroquées par les assauts de batterie. Il y a plein de sons qui arrivent de partout, ça hypnotise, superbe morceau.
Norvegian Wood jouera dans la même cours, éthérée et précieuse, moins secouée, portant parfaitement son nom. Etendue de neige, avec des fantômes qui sortent de la lisière d’une forêt, et Luca Santucci qui va pousser dans les aigus, noyés sous des échos mâtinés de bruits blanc, histoire d’arracher bien proprement la colonne vertébrale. Enfin, Ur Train délaissera pour un temps les artifices électroniques, pour plonger dans un Folk-abstract-hiphop sublime, encore et toujours porté par la voix du bonhomme ci-dessus.

Le disque se terminera sur Young Ones, une mystérieuse partie de jambe en l’air entre un piano, un violoncelle et une clarinette ; très beau morceau taillé à l’or fin, et Why Should I duo mystérieux, presque Burtonien entre Terry Hall et Martina Topley Bird. La voix de cette dernière est à tomber à la renverse, on en viendrait presque à espérer entendre la demoiselle nous susurrer des mots doux à l’oreille, tous les matins.










Difficile de trouver des défauts à ce Blood Looms & Blooms, qui se tient sur tout son déroulement (si l’on excepte le début irritant de Lush Dolphins) alignant perles sur perles, en se permettant de naviguer entre les styles, et de ne jamais réellement se répéter. Certes, il ne faudra pas être allergiques aux réminiscences Trip-hop, et à l’electronica un peu torturée, mais pour les personnes friandes du genre, le disque est vrai bonheur, tant les deux visages exposés sont réussis.

En parcourant les titres, se raccrochera parfois au triptyque Chris Clark / Emilie Simon / Archive (première fournée), et la mélancolie tenace du tout, couplé au travail de production énorme de Leila, cristallise l’un des disques Warp les plus réussis de ces derniers temps.


Bref, je ne sais pas trop quoi dire sur cette conclusion, qui, si je continue, va se transformer en communiqué de presse générique. Donc on s’en tiendra au fait le Trip-hop et l’electronica vu par Leila, c’est toujours aussi cool, beau, et maîtrisé, que Warp, c’est cool aussi, que rappeler à la barre Roya Arab et Luca Santucci, c’est encore plus super cool, et que je vois mal mon Top de l’année sans ce disque caché quelque part.










MP3 :


Leila – Mettle Clic droit / enregistrer sous

Leila feat Terry Hall – Time To Blow Clic droit / enregistrer sous












14 Titres – Warp
Dat’