Die Antwoord – SOS

Posted in Chroniques on October 11th, 2010 by Dat'


I’m so wet that the pussy get mad at me



Bon, on a tous des disques que l’on défendra jusqu’à la mort. Contre vents et marées, à faire chier ses potes pendant 5 ans à base de « hey au fait je t’ai déjà fais écouter xxxx ? » « Oui, et je t’ai dis au moins dix fois que je n’étais pas fan » « Oui ok, mais tu as vraiment bien écouté la 3minute de la track 9 ? Attends je te la remet » et donc à force vous perdez toutes vos connaissances, puis votre job car vous êtes écrasé par la tristesse, et l’on vous retrouve un an après pendu dans votre salon le froc souillé. Le bonheur de la musique.

Alors oui, des Cd dans le genre, il y en a une poignée, que je traine avec moi partout, au cas où, si un jour je peux croiser une personne qui aura la même révélation en les écoutant. Alors je tente de les coller dans les bars, dans la rue, de faire du prosélytisme musical un peu partout. Le Bad Thriller d’Abstrackt Keal Agram, le Wxfdswxc2 de Raoul Sinier, le premier Ep de Nil Hartman, le Sell Our Soul de Tha Blue Herb… Et donc, (on arrive au gros du sujet) le Totally Rad And Dj Fuck de Watkin Tudor Jones. Qu’est-ce donc ? Petit retour dans le passé.


Il fut un temps où un groupe français, Interlope, avait sorti un énorme album de Drum’n bass, au moment ou cette dernière commençait sérieusement à sentir le fenouil. Ce Talk To The Beat m’aillant bien marqué à l’époque, on part en bande avec la bagnole pour aller voir le duo dans une MJC pourrie de Bretagne, où il y avait plus de mecs dans les chiottes à prendre des pilules que dans tout le reste de la salle. Bref, après une bonne baffe live, les deux bonhommes confirment l’arrivé sous peu d’un nouvel album assez différent, beaucoup plus Hiphop. Je saute dessus comme un mort de faim, et outre Jamalski, on retrouvait sur les morceaux un mec complément inconnu,  Mc Totally Rad, avec un flow complément cramé, malléable à foison, génial. Ses incursions devenant mes passages favoris de ce Electrified, je cherche pendant quelques mois d’autres morceaux de ce type, sans succès. Quelques années après, il y a 4 ans pour être précis, Jarring Effect sort une compilation d’albums from South Africa. Dedans, un Lp absolument gigantesque, du même Mc Totally Rad aka Waddy Jones. Et là c’est la claque absolue. LE Monstre.

Que cela soit dit, ce Mc Totally Rad and Dj Fuck, qui est sorti en France sous ce nom, et en Afrique du Sud sous le nom de l’artiste, Watkin Tudor Jones, reste l’une des plus grosses baffes de ces dernières années en Hiphop déviant. Tout est parfait, dans les beats concoctés par Sibot, et dans le Flow de Waddy Jones, incroyable, protéiforme au possible, Mike Patton de la parlotte, passant les vitesses comme un enfoiré, changeant de voix et de rythmes toutes les trente secondes, pouvant maitriser n’importe quel beat avec une facilité hypnotique (Super Evil, génial à ce niveau là). On entendait le mec sur des trucs débiles ou banger expérimentaux sans disctinction, avec en point d’orgue Visitor, ou le monsieur se met à râper sur la thème song de Megaman 2, le génial Sun On My Face et l’écrasant World Champion, superbe diatribe sur la musique/création, et tellement efficace que tu te demandes encore pourquoi il n’a pas grillé toutes les radios. Je sais, ce n’est pas très sérieux de dire ça, surtout que le disque sort de nul-part, mais ce Fuck’n’Rad est carrément dans mon top 10 disques of all times, sans soucis.


Quelques mois après sort une nouvelle galette de Waddy, Maxnomal.tv, assez énorme (Total Fuck Up, parfait résumé d’un pan du hiphop, ou RapRaveMegamix, dont on va reparler plus bas) mais reprenant pas mal de morceaux du disque précédant, et des productions moins flamboyantes, ce qui fait bizarre.  Le concept est diffèrent, le Mc rappant en costard ou en raveur craqué sur des présentations powerpoint, et commence à changer de personnage comme de chemises, aidé par une nana à la voix hélium (Yo-Landi). MaxNomal.Tv c’était ton DRH qui t’expliquait la vie en hiphop. Puis plus de nouvelles. Rien, que dalle, même en cherchant bien, le mec ne disparaît du radar musical. Et vu que je n’ai pas souvent l’occaz d’aller en Afrique du Sud, ben je reste sur mon Totally Rad en chialant de bonheur pendant quelques années.

Et tout à coup, gros buzz, un clip tourne partout depuis quelques mois, morceau à la débilité extrême, Enter The Ninja, semblant aussi débouler d’un trou noir. Je le regarde en me marrant, puis mon cerveau fond au bout de 10 secondes, c’est Waddy Jones qui canarde de nouveau, et semble bruler Internet. Un nouvel album est dispo, cette fois sous le nom de Die Antwoord, toujours accompagné de Landi Visser, et d’un mystérieux dj Hi-tek qui change de gueule à chaque fois. Waddy Jones veut encore se marrer avec un projet débile, cette fois plus accès sur le trip Sud-African-Slang. Le groupe file son album gratuitement sur le net, 16 titres completement craqués, totalement dans la continuité de ce que faisait le bonhomme auparavant, l’album de Die Antwoord contenant des morceaux datant de plusieurs années, (Dagga Puff, Beat Boy voir carrément une 3eme fois Super Evil, déjà inclus sur les Lp de Totally Rad et Maxnormal)

Filé gratuitement au départ, sans réel plan marketing, (et avec une pochette tellement immonde qui ne fait aucun doute sur le fait que le mec n’aurait jamais pensé commercialiser mondialement le truc) le groupe se voit dépassé par le Buzz gigantesque créé par Zef Side et Enter The Ninja, qui déferlent “all around the Interweb”. Le Lp gratos se doit de disparaître, on prévoit une ressortie mondiale, Mc Totally Rad est près à envahir le monde :

Du Twitter de Katy Perry à Pitchfork, en passant par un concert fait avec Aphex Twin, plus besoin de faire chier ses potes en foutant le Cd tous les samedi soirs, Waddy Jones s’occupe de parasiter le monde tout seul. Parfait.







Alors il faut savoir qu’entre la première version de $o$, gratos, et la nouvelle, il y a pas mal de modifications. Tracklisting changé, plus ramassé, nouveaux morceaux, et d’autres qui passent à la trappe, difficile de contenter tout le monde. Le packaging fait dans le simple, avec une cover qui défonce et des crédits de pochette bien débiles. Je m’attendais à un peu plus de folie, c’est dommage. Mais il y a un chat dans la pochette, donc c’est cool.


Le contenu diffère donc, et montre, mine de rien, les changements opérés le groupe avec leur exposition. Yo-Landi Visser, qui était sur le premier SOS (et sur MaxNormal.tv) une voix marrante plus qu’autre chose, se chargeant surtout des refrains et de quelques incursions vocales, a pris au moins autant d’importance que Waddy “ninja” Jones dans le groupe. Par son look surtout, par le buzz de la proposition de Fincher aussi, et les clips évidemment. Le projet devient duo à part entière, là où on percevait surtout le fantôme Hi-tek (et son pc computaaa) et Visser comme des éléments gravitant autour de Waddy.

Evidemment, c’est Enter The Ninja qui fait le beau sur ce disque, morceau complètement hors temps, reflétant parfaitement la dualité cramée de Die Antwoord. L’instrue est cheesy à mort, avec des synthés dance-pute parfaits, des petits bleeps electro émo qui te font frissonner l’échine de honte, mais en fait tu aimes ça tellement fort en secret que tu te sens bien. Bref. Les lyrics sont tellement pourris, égo-trip ultra crétin impossible à prendre au sérieux, avec un dernier couplet tellement foireux qu’il en devient culte : “Fuck, this is like / The coolest song I ever heard in my whole life / Fuck all of you who said I wouldn’t make it / Who said I was a loser / They said I was a no-one / They said I was a fuckin’ psycho / But look at me now: / All up on the interweb”. Quand le mec a écrit ça, c’était au départ pour les MJC sud-Africaines. Mais Waddy lit dans l’avenir, il est balaise. Ce morceau c’est donc la présentation de la nouvelle facette de Waddy. Il se fout de notre gueule, peut être. Sauf qu’il arrache l’instrue comme d’hab, avec son flow d’enfoiré qui sublimerait même une instrue de Richard Gotainer.
Et derrière la blague, il y a le respect, du flow certes, mais de la référence surtout. Le mec, il aime la Dance des 90’s, les synthés pourris, les minijupes roses. Il va se faire des biftons, devenir connu grâce à ça. Ce Enter The Ninja, ça ne peut pas être autre chose qu’un spoof, une reprise, non, un hommage à l’horriblement indispensable morceau de Smile.Dk, “Butterfly”, que tu as oublié parce que tu l’écoutais en prenant ton gouter au collège, mais que l’on t’a dis que c’était trop pourri, et qu’il fallait mieux se battre sur le fait que Smash de Offspring était mieux que le nouveau Oasis. Merci Die Antwoord.

Et la majorité des titres présents tapent dans ce délire. On ne le voit pas forcément, mais Die Antwoord, c’est aussi un hommage à Hit Machine. Une sorte de négatif de tubes des années 90. Je n’ai pas de preuves formelles, mais quand tu as vécu cette période, ton palpitant vibre tout du long, tu le sais, Waddy Jones te mord le lob d’oreille. Synthés cheesy, vieille dance cramoisie, “Next level beats” et un mc qui rappe comme un enfoiré :
$copie, et son “no means yes” qui a fait jazzer les féministes de tout poil, la terre entiere aime. Yo, c’est  un remix de 20fingers et son Short Dick Man que tout le collège chantait à la récré. Même Bassline, même régression dans les lyrics. “Don’t Want a short dick man” se transforme en “I got whatcha you want boy  / I got whatcha want / You never gonna get it / So you might as well forget it”. Waddy Jones est irrattrapable sur les couplets, il dit de la merde bien salace, et on ne comprend pas la moitié du texte vu que c’est du slang sud-africain, mais le balance tellement bien que c’est du miel pour tes tympans, tu te sens bien avec tes ray-ban et tu as envie d’ouvrir les fenêtres de ta bagnole pour le faire savoir sur la place du village. Tube parfait, irrattrapable.

Wat Kyk Jy ? Hommage au Tuning et la culture Zef sud-af, passera un ersatz du thème de Mortal Kombat en diagonale, et te balance un refrain de gros bourrin. Sauf qu’au milieu, Ninja te saigne les couplets avec un flow posé et lubrique, qui te caresse le bidou comme des draps en soie maculés de cyprine.  Et encore, il n’y a pas le remix d’Enter The Ninja par le mystérieux Dj Fishsticks (…) qui te transporte dans le paradis des nappes trance-dance-émo que j’aimerai arpenter tous les deux jours.





Bon par contre, les choix de Tracklist ne sont pas toujours pertinents. Ne pas inclure Very Fancy, I Don’t Need You, Lie Maatjies et Wat Pomp sur la nouvelle édition, c’est une belle connerie, vu comme ces morceaux démontaient la $o$ première version, et tapaient dans une veine bien Mc Totally Rad. (L’urgent Wat Pomp a été réintègre au dernier moment en titre bonus dans la version deluxe, mais bon…). Il a fallu que les mecs gardent le dégueulasse  Ritch Bitch, qui était franchement le pire morceau du Lp gratos. Ca se justifie par la place prise par Yo-Landi, vu que Ritch Bitch est le seul morceau qu’elle arpente de bout en bout, et qu’il en fallait bien un. Certes, mais il fait franchement pale figure comparé aux précités.

Heureusement, les bonhommes ont gardé Beat Boy, aka le meilleur titre de $O$, et surement l’un des toutes meilleurs phase de Waddy Jones. Déjà présent sur le Lp de MaxNormalTv sous le nom de RapRaveMegamix, ce monstre de 8min30 est une hallucination pure, un morceau de hiphop electro rave pute débile incroyable, avec un texte tellement graphique sexuellement que le 3éme étage des magasins Lammtarra passent pour des Disney Store. Donc oui, ce morceau devrait être placé dans le dico dans la définition du mot progression : L’instrue, booty synthétique, qui craque petit à petit pour se transformer en rave psychotique droguée. Le flow de ninja, qui devient de plus en plus haché et aléatoire, pour finir sur des incantations shamaniques. Et donc ce texte, qui passe du hiphop salace classique à la description de fantasmes qui feraient flipper Patrick Bateman. Je veux entendre ce truc en live. Jouissif et imparable.

L’album se termine sur l’excellent Doos Dronk, tranchant avec les ambiances tek-débiles du cd, pour partir sur une instrue façon filme de pirate psychotique avec chœurs et guitares métal finlandais en mode digressions noisy. Dégagé du Lp avec l’absence de Wat Pomp, l’excellent Jack Parow revient finalement taper la croute avec Die Antwoord et bouffe le beat avec sa voix d’alcoolo, et tout le monde saute sur la production avec des torches et des haches pour nous casser la tronche.




Avec la mise en lumière du groupe, les mecs ont du flipper un peu pour pondre de nouveaux morceaux, il doit y avoir une sacrée pression pour ne pas se planter. Manque de pot, c’est mi-figue mi-raisin. In Your Face est plombé par un refrain horrible.  Fish Paste est sympathique dans le genre, banger Hiphop bien rentre dedans, mais qui n’a vraiment rien de spécial. Et fait franchement regretter l’absence de titres plus pertinents de $O$ première version.

Evil Boy, produite par Diplo, relève le niveau, mais le beatmaker de Major Lazer ramène Die Antwoord sur des terrains arpentés par une bonne centaine de groupes actuellement. Le titre est bon, mais n’a pas la saveur “Die Antwoord”, à cause d’un écrin efficace mais banal. D’autant plus que le dernier couplet de Ninja, présent dans le clip vidéo, est inexplicablement absent sur l’album. (Et c’est ce qui faisait pourtant passer le morceau de sympa à vraiment bon)

Mais, à l’instar de Beat Boy cité plus haut, Die Antwoord cache une autre gemme dans son entre-jambe, avec She Makes Me A Killer, inédit de 7 minutes absolument génial, justifiant à lui seul cette version Lp payante. Waddy Ninja Jones y narre ses errements amoureux avec un texte tellement débile que le tout devient œuvre d’art. A coté, American Pie, c’est la Pléiade. Encore une fois tout est parfait, le flow du mec est incroyable, l’instrue est une vraie bombe, et s’envole à chaque refrain dans les chœurs à la Gnarls Barkley complètement craqués. Kid Cudi aurait tué pour avoir ce morceau sur son dernier album, manque de pot, il ne savait pas qu’il fallait aller en Afrique du Sud pour avoir un truc aussi parfait. Le truc est épique, superbe, débile, et le morceau cristallise presque tout ce qui se faisait de mieux sur le disque Mc Totally Rad & Dj fuck.






Alors forcément, le grand jeu sur internet, c’est de savoir si le groupe est sérieux ou non. Si les bonhommes ne sont qu’une vaste parodie, de vrais cramés pensant être des ninjas-gangsta à coté de la plaque, ou un groupe qui sait parfaitement se placer dans les médias pour exploser. Evident, d’autant plus que l’on ne peut que saluer le talent de Waddy Jones pour brouiller les pistes. Les multiples interviews promotionnelles qu’il diffuse sur le net depuis quelques semaines sont les meilleurs exemples de son art pour construire le mythe. Le groupe va aborder le sujet de Evil Boy, parlant du problème de la circoncision obligatoire faite à l’arrache dans certaines “tribes” sud-africaines (dont celle de Wanga donc, en feat) comme étape pour passage à l’age à l’adulte. Puis aborder, sur le même ton, de sombres sujets sur le chien d’une voisine empêchant ninja de dormir ou discourir sur la chatte-à-ta-mère-gardée-dans-du-formol (si si). En allant même jusqu’à se tatouer ses punchlines les plus pourries/savoureuses sur son corps. Cette posture impossible à définir, Waddy l’avait déjà dans des rares interviews trouvables sur le net. Mais c’est l’ampleur du phénomène qui rend les choses intéressantes, là où il aurait pu passer pour un dingue hurluberlu auparavant.

Le nouveau disque, lui, est bon, et fait la gueule en même temps. Blessé par des choix franchement dommageables (Ne pas inclure certains titres de $O$ 1st version, enlever le dernier couplet de Evil Boy, mettre l’excellent morceau électro SOS en titre caché après 5 minutes de vide alors qu’il était morceau à part entière auparavant…), cette nouvelle version se révèle moins bonne que l’album filé gratuit il y a encore quelques mois, puis disparu quand le tout à commencé à trop flamber.  Ce qui est un comble. Mais en même temps, on pourrait me contredire à cause de la présence du morceau She Makes Me A Killer, gigantesque, et de la ré-intégration de Wat Pomp en titre bonus.

De toute façon, si Die Antwoord peut en pousser certains à aller écouter l’album de Waddy Jones The Fantastic Kill / Mc Totally Rad & Dj Fuck, alors ce $O$ est la meilleure chose arrivée en 2010. Quand aux fans du disque précédant, ils peuvent se jeter sur ce nouvel LP sans soucis.


Die Antwoord, ce n’est évidemment pas sérieux. Mais c’est sacrément intelligent.  Pretty Wise, comme dit le tatouage de Ninja sur sa gorge. Surement la création de groupe le plus pertinent depuis plusieurs années. Finalement Die Antwoord réussi le grand écart absolu. Le groupe pose sur de la techno ultra cheesy, puis va faire un concert avec Aphex Twin. Waddy Jones a un flow incroyable, mais va parler d’autographes sur nichons et d’éjaculations dans des verres à champagne. Les mecs sont les nouveaux chouchous de Pitchfork, mais rappent dans le LP sur des refontes de SmileDk ou Short Dick Man. Ce type qui a vu son disque sortir sur Jarring Effects se retrouve sur le Twitter de Katy Perry. Et ça, c’est beau.

De toute façon, il y a obligation de prêter allégeance à Waddy Jones, ce dernier devant sauver le monde dans les années qui viennent. You can’t fuck with the chosen one.












Die Antwoord // Evil boy
. –




bam bam there a reminder (enfin surtout illustrer l’intro) :





Et l’ineffable “Visitor” :





10 Titres – CherryTree / Interscope
Dat’




THE BLOOD OF HEROES – The Blood Of Heroes

Posted in Chroniques on September 23rd, 2010 by Dat'


I’m gonna take it all out, I’m gonna be the last one standing



Preuve que les artwork peuvent encore faire vendre. Encore halluciné par le sublime artwork du dernier Scorn, (Refuse;start fires) qui écrabouille de classe un rayon disque entier, je vois que sur le même label, l’artiste en charge de cette cover signe aussi le design d’un certain The Blood Of Heroes. Ce groupe, connais pas. Il suffit pourtant de glaner quelques informations sur le net pour écarquiller rapidement des yeux : La formation regroupe carrément Bill Laswell, Broadrick (Godflesh, Jesu entre autre), Enduser, Submerged, et un mc du nom de Dr Israel…

Les super-groupes ont rarement été pertinents. Concepts fumeux, machine à thune ou  surtout formation faisant baver un max sur le papier mais filant un résultât dégueu (ou pire : tout simplement banal). Ici, le bordel livré par le groupe peut faire peur. On melange les digressions noisy de Laswell avec les fresques Heavy-shoegaze de Jesu, sur beats electro-cramés d’End.user et Submerged, le tout mâtiné de flow hiphop.  On se renvoie la balle, les styles mutant un peu de morceaux en morceaux. Avec Justin “Jesu” Broadrick et Laswell qui restent en tête d’affiche, les deux bonhommes étant présents sur la quasi totalité du disque.







Et justement, la première peur qui piétinera nos petits coeurs, c’est que Blood Of Heroes ne fasse pas dans la dentelle, et bourrine à tout va. Des tracks de gros rageux, il y en a. Et  justement cela marche plutôt bien, dans son ensemble. A dire vrai, l’ouverture, Blinded, balance dur, et jouissive, à fond les ballons, et rassure sur le coté bucheron du projet. Certes ça taille dur. Les beats sont pachydermiques. Les guitares Heavy de Broadrick dégoulinent sur la drum and bass industrielle. Le doc Mc est déchainé, en mode toaster de fin du monde. Tu balances ça en concert, le monde meurt à tes pieds. Le dernier tiers du morceaux est hystérique, Breakbeat sur mur de son shoegaze-metal, ça te décrasse dur le moineau, tout en te faisant tirer la langue de plaisir. Car oui, le tout est jouissif, bien foutu, et franchement violent.

Salute To The Jugger, tout aussi tourmenté, aligne la même recette, avec un coté encore plus Dancehall, plus éclaté, c’est le vrai chaos, le travail sur le son est vraiment chiadé. Tout tabasse, les guitares tracent des lignes d’horizon noisy, là où les beats flirtent franchement avec le breakcore. Et une saturation finale assez géniale. Le mélange ne plaira peut être pas à tout le monde, mais c’est là où le disque est intéressant sur certains titres. Faire copuler trois musiques de sauvages diamétralement opposées : le Metal-sheogaze, le Dancehall et la Drill-breakbeat. On aura même le droit à une fresque épique de 9 minutes, Descend Destroy, bien Dalek, mêlant le tout jusqu’à implosion.

Attention, le hiphop de Dr.Isreal n’est pas présent sur tout le disque. Le Flow du monsieur n’est présent que sur la moitié du disque. Mais ce n’est pas parce que le Mc est en berne que l’on va laisser os tympans en friche, et les explosions de fureur, il y en a en instrumental, comme sur l’inénarrable Wounds Against Wounds, qui commence avec de jolies notes aériennes, pour se faire littéralement écraser par un immeuble entier de grattes ultra massives. Ta baraque te tombe sur la gueule, tout en te prenant des missives Drill en pleine trombine. Ca gronde comme jamais, les beats tranchent dans tous les sens, jouissif comme la mort.




Mais a dire vrai, là où l’album est attendu pour un amateur de Jesu / Broadrick, c’est sur l’intégration des superbes steppes de ce dernier dans le disque. Et si ses guitares typiques sont présentes tout au long de la galette, cette dernière respire franchement grâce à des titres bien plus typés “Jesu”,  façon shoegaze massif, électronique, calme et éthéré. Si 50% du disque a donc une facette franchement bourrine et violente, The Blood of Heroes calme souvent le jeu entre deux attentats, et c’est surement le choix le plus pertinent du disque. Remains reste le petit bijou du lot. Les beats sont plus légers, les guitares subliment, entre cordes cristallines et vibrations étouffantes en horizon. Le morceau va vite évoluer en Drill’n bass warpienne superbe, qui copule si parfaitement avec les teintes de Jesu que l’on en aurait presque la larme à l’œil. Bonheur.

Transcendent, qui n’aurait pas fait tache dans un Conqueror, se tape un beat plus simple, bien rond, puissant, avec d’hallucinantes lignes de grattes, larsens passé à l’acide, avec petites incursions dub et éclats industriels qui viennent se greffer sur la nuque. Ca m’hypnotise, le rythme est dingue, c’est vraiment beau, ça grince dur, mais c’est à se damner. Composition en mille-feuilles, bourrée de détails, avec un final émo qui dressera plus d’un poil de bras. Bound integrera même un élément un peu plus world à ce maelstrom de saturations, avec un  instrument à corde oriental qui se noie dans le chaos noise, et des rythmiques ultra saccadées, breakbeat psychotique. Sur presque 8 minutes. Du bon boulot.

Le disque se terminera sur un Drift complètement camé, débutant sur une rythmique tribale, des larsens et des voix spectrales à chialer, construisant un shoegaze expérimental parfait pour le Mc qui ne répètera qu’une seule phrase tout au long du titre, en prophète halluciné. Le morceau est d’une richesse impressionnante, on passe de la brume au carnage électronique sans prévenir, ça se tord dans tous les sens, avec un breakcore bien plus intéressant que ce qu’à pu nous offrir Venetian Snares depuis une poignée d’années (well, j’attends son nouveau disque impatiemment néanmoins). Le tout finissant dans des échos à filer le vertige, donnant du corps à cette phrase en boucle jusqu’à la nausée, jusqu’à se qu’elle se greffe sur nos cortex au fer rouge.

Le disque n’est pas exempt de ratés, et de clichés. Logique, le mélange est risqué. On se passera sans problème de Breakaway, en mode  “ouai on est des fous on met des gros riffs bourrins sur de la drum’n bass décharnée” trop grillé pour ne pas faire tache au milieu des perles précités. Sinon à l’instar des balades larmoyantes dans un disque de Britney, le sempiternel morceau dub-spoken word qui est présent dans toutes les sorties indus/dub est là aussi, et, s’il n’est pas mauvais, n’est pas franchement excitant non plus, voir un peu terne. (bien que la ligne de basse ultra crade et les rythmes vrillés titillent quand même pas mal)





Nop, le seul petit défaut du disque, en étant complètement subjectif, c’est son manque de prise risque dans le mélange. Pas le mélange des genres, vu que le grand écart est déjà assez hallucinant, et propose enfin un nouveau Cd pouvant rallier les populations. Et ça c’est drôlement bien, parce que cela n’existe plus des masses (ou alors c’est toujours mal branlé) Par contre pourquoi ne pas avoir poussé le vice un peu plus loin, en aliénant les structures Jesu avec un Mc Hiphop ? Ou au contraire tenter de foutre les poussées hardcore avec des lignes plus cristallines ou ambiant ? On s’arrête au grand écart entre les styles, là où le démembrement des jambes aurait été encore plus exaltant. Un peu dommage. Reste que j’aurai bien aimé entendre un Mc Hiphop sur le très Jesu Transcendent, vu que là, il est justement très Jesu point barre.


Mais c’est vraiment histoire de pinailler, car le disque est violent, lourd, beau, foutrement aventureux. On a des teintes rappelant le Godflesh période Songs Of Love and Hate, une plâtrée de fresques superbes à la Jesu, le tout bourriné par d’excellentes digressions drill’n bass et quelques incursions hiphop pas piquées des hannetons. Cela a l’air bizarre écrit comme ça, The Blood Of Heroes marche parfaitement, du tout bon, parfait pour fissurer les murs de son appart’ un jour de frustration. Excellente galette.










11 Titres – Ohm Resistance

Dat’






World’s End Girlfriend – Seven Idiots

Posted in Chroniques on September 15th, 2010 by Dat'


Brand New Car



En assistant aux derniers concerts de World’s End Girlfriend, on pouvait être sur qu’il y allait avoir des changements sur le futur album. Il y a encore deux ans, la musique du Japonais était un mélange entre electronica-drill’n’bass épique et post-rock religieux, le tout charcutant sample de musiques classiques et mélodies tire-larmes. Le mec était tout seul dans sa cave, on avait l’impression qu’il crachait la mort, qu’il vomissait la tristesse,  qu’il envoyait la mélancolie se faire fondre au centre du soleil. Ce mec, il t’a pondu un des disques les plus sublimes de la terre entière (Farewell Kingdom), a tué sur place les fans de drill-post-rock-n’bass (si si ça existe) avec The Lie Lay Land. Et l’année dernière il avait sorti une Ost un peu chiante pour un film japonais relatant l’histoire d’une maid-poupée-gonflable qui prend vie et tombe amoureuse de je ne sais qui.

Revenons aux lives donc. En y allant la première fois, je m’attendais à ce que j’avais vu il y a quelques années sur Youtube : Un mec prostré sur ses machines, balançant une musique qui faisait chialer l’audience tellement elle était belle (et aggressive). J’avance pour me mettre prés de la scène, je me dis que ça va être génial, je vais pouvoir déprimer avec plein de monde en même temps. Et voilà que le japonais déboule avec 4 autres gars, et se prend pour un Guitar Hero pendant tout le long, balançant un gros rock agressif. Les 15 premières minutes, j’ai franchement fait la gueule. Puis le bonhomme revient vers ses premiers amours, l’electronica torturée, tout en gardant ce coté “je t’envoie un 747 dans la tronche”. Le premier single annonçant ce Seven Idiots calme lui de nouveau ma joie, bien foutu, mais frôlant le niais malgré ses destructions en règle.

Ne partez pas tout de suite, je vous rassure tout de suite, l’album Seven Idiots, lui, est immense.






Le booklet est étrange. D’une part, l’artwork ne brille pas par sa beauté, et l’interieur n’est composé que de couleurs degueux laissant à peine apparaître quelques squelettes ou démons déchus. L’information principale est que World’s End Girlfriend n’est plus l’affaire d’un seul homme, celui ci accueillant les 4 musiciens du Black Hole Carnival sous son nom. Comme pour les lives. Information capitale, acheté sur le site du label, le disque est livré avec un cd bonus 3 titres.




Alors certes, pour ceux qui connaissent la discographie de WEG sur le bout des doigts, les deux premiers morceaux vont casser quelques morals. L’introduction orchestrale du disque donne l’impression d’être chez Disney malgré le beat industriel pachydermique. Pour Les enfants du paradis, c’est un peu la même chose, mais en bien mieux quand même. Pop song hallucinée, avec guitare enjouée et rythmes qui giclent dans tous les sens, ça part en vrille complet, mais c’est euphorique en diable, ça frôle même le générique de San Ku Kai sur quelques secondes. Vraiment bizarre. Bon certes, au milieu du morceau, c’est la violence absolue, l’immeuble qui te tombe sur la gueule genre Alec Empire remix Bernard et Bianca. Le morceau n’est pas mauvais, mais ce n’est pas le WEG qui me fait flipper, me tue, m’emporte.

Teen Age Ziggy continue sur la même lignée légère et enjouée, mais c’est déjà bien plus touchant. La guitare est facétieuse, mais ça part vite en couille totale, la litanie marrante du morceau est constamment explosée par des samples arrivant de nul part, des saccades hallucinées, des charges ultra violentes, avec un esprit absurde et débile complètement assumé. Ce morceau, c’est Mr Oizo tentant de faire du Heavy Metal. Avec en point d’orgue une conclusion techno-trance-noise-glam-rock indescriptible, genre tu as toutes les drogues de la planète faisant la nouba dans ta bouche.

Alors certes, on retrouve le WEG que l’on aime. Complètement craqué, bourré de LSD, mais WEG quand même. Il manquait encore un petit truc. C’est là que Decalogue Minus 8 intervient. Ce titre, je me le suis pris tellement violemment dans les viscères que j’ai failli crever en l’écoutant. Ca commence par une basse jazzy bizarre, une guitare déglinguée, et le Saxo bourré du Black Hole Carnival. Hey, un métronome asbtract Hip Hop, simili saturations en mode scratch, petite flute, on claque des doigts en se la jouant Gangsta. Une gratte ultra violente débarque, déboite tout, jishin, glitch 8bits et piano lugubre, le saxo est en train de crever, violons menaçants, c’est violence,  tempête absolue, la rage, tu baves de partout alors de la musique classique sublime vient s’immiscer sur le synthé chiptune, ça sature, tu sais que ça va te peter à la gueule alors tu cherche un abris, grenade, Hard Rock incroyable, violence absolue, on vient de t’ouvrir le ventre pour se balader avec tes viscères. Putain le mur de son, cette guitare, c’est la sauvagerie maximum, le mec tire dans la foule et cette dernière n’est composée que de dizaines de toi se tordant de douleur. Le morceau ne t’a même pas laissé une seconde pour respirer qu’un violon Tzigane déboule et t’arrache la colonne verterbale, c’est QUOI CE VIOLON QUI PETE UN PLOMB SUR CETTE GUITARE ULTRA massive, c’est à chialer mais tu n’as même pas le temps d’avoir les yeux qui piquent car la charge finale est tellement agressive que tu te fais balayer les tympans. Ce morceau est dantesque. Dantesque.

Ulysses Gazer continue se travail de dérouillage, avec un rock bien enlevé supplanté d’un violon et d’un piano qui hérisseront plus d’un poil. Ca devient rapidement épique, et la rythmique se transforme rapidement en Drill’n bass cramée, alors que WEG crache une mélodie pour stades. Tout s’arrache de nouveau et part dans un tourbillon classico-rock-electro de folie qui n’arrête pas de se briser, cabrer, repartir en trombe. Tu as quinze changements de structures à la minute, et au moins autant de talloches à te prendre. Dès que la guitare prend le dessus, on aimerait avoir un chanteur avec une mèche balancer des “yeaaah baby come with me” au micro, mais le pauvre se couperait l’aorte de désespoir au bout de 2 minutes au vu des attentats sonores incessants. World’s End Girlfriend vient d’accoucher d’un tube pour psychotiques.




Helter Skelter Cha Cha Cha mixera délires à la Squarepusher (d’avant) et Hard-rock bien violent (euphémisme, on se prend un 33 tonnes sur la nuque à partir de la deuxième minute) avant qu’un chœur bien flippant tente de survivre dans la jungle noisy. Le final étonne, sublime digression techno rave chelou, avec ce synthé qui s’enroule de partout et vole l’âme. Vraie drill’n bass explosée sur Galaxy Kid 666, avant de partir dans une explosion épiquo-débile-melancolique ultra joussive, débouchant sur une autoroute Breakbeat frôlant la tuerie. Le morceau finira sur une mélodie plus jolie, pleine de vie, franchement salutaire après le déluge de sévices pris dans la poire.

Et pour ceux qui veulent vraiment du World’s End Girlfriend période Lie Lay Land and co, ça tombe bien, car le bonhomme nous sort un Bohemian Purgatory part 1, 2 & 3, avec trois parties qui s’étalent en tout sur plus de 20 minutes, revenant à quelques chose de plus electronica, entre samples de musique classiques martyrisés, mélodies à pleurer (Ces piano sur crépitement Autechrien de la première partie, avant de partir dans des Amen Break geniaux m’ont littéralement piétinés). Je vous défie de ne pas avoir envie de crever sur l’intro de la partie 2, superbe musique classique qui va se faire laminer par une mélodie à la guitare absolument géniale, tubesque, avant de partir dans une drill bien violente, déchirée, qui s’écrase, lamine, poignarde, et cette guitare qui continue de faire son rockabilly pépére sur le saxo et la ligne de synthé. C’est épique comme la mort, passes là dans un club on pourra tous se tenir la main quand elle viendra nous chercher. La partie 3, c’est la dépression, mélodie cristalline qui se fait violer par des taillades noisy genre Merzbow est en train de fondre  alors il soupire en tapant une dernière fois sur ses machines. Enveloppé par un chant d’église. Tu es laissé pour mort part les écorchures saturées du dessus, alors les anges virvoltent au dessus de ton cadavre et te crachent dessus.

Les métaphores du dessus ne sont pas gratuites. Car la mort, les macchabés, il y en a foultitude sur The Offering Inferno. C’est du World’s End Girlfriend de traumatisme, la musique du dernier souffle, l’étranglement. C’est des cris, des bébés mutilés, des femmes qui hurlent, des monstres qui grondent, fracas, os qui se brisent, déchirures noises. C’est marcher dans Tokyo, et voir en sous-vitesse tout une foule se faire bouffer par un démon fou. C’est aussi de l’orgasme, de la cyprine et de la tension sexuelle. Scie à métaux, violons des Balkans, cours de recréation, saturation électronique ahurissante, ballon rouge et balançoires. Musique hardcore, samples à blessure. Si tu écoutes le morceau au casque jusqu’à la fin, tu deviens fou. Coupes toi les veines, on glissera sur ton sang. Et se faire avaler par une monstruosité indus-noise tellement brutale, mélangée à tous ses cris de souffrance et de jouissance. Tu n’auras plus JAMAIS vraiment le courage de réécouter le tout sans serrer des dents.

Heureusement, on aura tout le temps de panser ton âme sur Unfinished Final Shed, belle complainte piano /cordes, qui n’aurait l’air de rien prise à part, mais qui trouve son effet magnifié par la déferlante jusqu’auboutiste du morceau précédant.





Alors quand on regarde le Tracklisting, et que l’on écoute le disque d’une traite, on se rend compte qu’outre l’hommage rock appuyé (les titres bourrés de références, certaines mélodies familières), le disque s’écoute comme un véritable saut dans le vide. Ce n’est même pas une métaphore, c’est écrit dans les tracks. Du Paradis au purgatoire, pour finir en enfer. Et dieu, que celui-ci est tétanisant.

La bonne nouvelle, c’est que je ne m’attendais pas à une claque pareille. Oh, certes, World’s End Girlfriend, on le sait, est un bon. Un vrai. Un grand. Oui. Mais sur les derniers disques, on sentait que le bonhomme commençait à trop maitriser sa recette. Et surtout, le premier single de ce Seven Idiots, je ne l’aimais pas des masses. Alors à l’écoute du disque, j’ai frôlé la syncope, en cas de grosse déception (comme pour la bien terne Ost du film Air Doll par exemple). Mais pas de problème, cette galette est incroyable. Les morceaux sont dingues, surement les fresques les plus riches que l’on nous a servi depuis des lustres. Milliers de sons, explosions noises, mélodies candides, cordes à chialer. Autre good news, il y a un peu plus de Drill’n Bass que sur les précédentes galettes, cette électronique saccagée prédominante sur les premiers disques de WEG, qui avait disparu peu à peu face au Post-rock. Ici, on a du rock massif, des tubes de stades (La fin de Ulysse Gazer, incroyable, absolue, mirifique… la ligne de gratte de Bohemian part 2…) noyés dans un ocean noise déstructuré. De la mélancolie pure, de la beauté géniale. Cavalcade du ciel vers la tombe, de vie à cadavre. J’ai failli chialer comme un gamin sur Bohemian part 3.  Je me suis mis a sourire comme un con et à taper sur mes jambes en écoutant la fin de Helter Skelter.

Si comme moi, vous n’aimez pas trop le premier single, n’y prêtez pas attention, le reste est dingue. Si vous aimez le premier extrait, c’est encore mieux, la suite est dantesque. Car  ce n’est même plus les mots “génial” ou “essentiel” qu’il faut apposer sur ce nouveau WEG : Beau comme la mort, massif, ultra violent, mélancolique, drôle, arraché, cramé, triste, affolé et affolant. World’s End Girlfriend a pris tous les sentiments d’un monde pour en faire un disque.


Ce Seven Idiots est incroyable, mirifique, sublime.  Une claque énorme. Celle qui n’était pas encore arrivée cette année. Un disque absolu, qui vous arrache la colonne vertébrale avec un tournevis pour vous la faire bouffer.

Sublime putain, sincèrement. Sublime.







World’s End Girlfriend sur les Chroniques Auto :

World’s End Girlfriend sur la mixtape Les Autoroutes de la Nuit : Japan Experimental vs French Underground

World’s End Girlfriend live UNIT Shibuya / Photos

World’s End Girlfriend – Farewell Kingdom / Chronique





Virgin Babylon Records – 13 Titres

Dat’






DEPTH AFFECT – Chorea

Posted in Chroniques on August 31st, 2010 by Dat'


Great Day Today



J’en devenais presque de mauvaise humeur. Apres deux ans de silence (et un matos entièrement volé je crois bien) Depth Affect avait lancé un énorme morceau avec Riddlore? en featuring. Rien d’autre. Une video, il y a quelques mois, sans infos, sans précision quand à un futur album ou Ep, fortement attendu pour ma part depuis la grosse claque prise par le très bon Hero Crisis. Ce clip, c’était beau comme du Hero Crisis, mais en plus cool, en plus décontracté, surement grâce au flow lymphatique de l’americain, mais aussi par une précision et un sens mélodique qui semble s’accroitre de galettes en galettes pour l’abstract-hiphop-boys-band-breton. Alors on est drôlement content, on arpente le web, on se dit que yeah, Depth Affect va sortir un nouvel album, avant de se pendre vu le peux d’infos distillées. Et voilà que ce Chorea déboule sans prévenir, Ep aussi rempli qu’un Patrick en fin de soirée.







Dammerung semble avoir reprendre les choses là où Hero Crisis les avait laissé. Pourtant, il ne va pas me falloir trop de temps avant d’être renversé par cette première compo. Voix cutée un peu putes, synthés bien gras et ligne de gratte acoustique, on est en erre connue. Mais la chanteuse en mode vocoder détraqué file une aura incroyable au tout, et l’on se fait percuter méchamment par les handclaps parfaits. C’est triste, beau, mélancolique, joyeux, super émo (pas les mèches violettes, celui qui te prend le cœur), ça te drague la nuque, et en écoutant ça, tu te mets à faire des petits bonds sur ta chaise de bureau comme une bagnole de Snoop Dogg. Le break d’avant montée finale est encore plus tire-larmes qu’un morceau de Ventura, la voix revient te faire des suçons dans l’encolure, tu as des fourmis dans le plexus et les mains rouges à force de claquer des moignons. Morceau génial, super abouti, fragile et jouissif, du Depth Affect de haut niveau, merci pour la baffe d’entrée.

Dans le genre “Depth Affect maîtrise les yeux fermés”, je dois dire que leurs morceaux avec Mc en featuring sont à 100% dantesques. Celui avec Alias sur le premier disque était culte. Sur Hero Crisis, Subtitle démontait comme rarement, et Awol One était emporté dans une superbe comptine mélo. Sur ce Else’s Vision, Riddlore? est ridiculement à son aise, sur une instrue de folie, avec ces petits synthés facétieux qui s’immiscent partout, cette mélodie à chialer (en plus de ses beats parfaitement placés). Sérieusement, le dernier tiers est tout simplement imparable. Rupture amoureuse et bande de potes, autour d’un feu de bois dans un nightclub.
Stunt & Sms passera sur un abstract épique en diable, imparable, balançant la recette d’Hero Crisis dans quelque chose de plus frontal, imparable, c’est ghetto ploubenec, même le break émo est un peu plus charcuté que prévu. Rien de spécial, on se prend juste la compo dans la gueule. En écoutant ça, difficile de savoir si l’on sautera encore autant contre ses murs dans 3 mois, mais là, c’est plus bien foutu.




Depth Affect, c’est aussi un petit coté pop assumé, que l’on entendait déjà perler sur certains titres (voir atteignant une certaine perfection Hip-pop avec Dusty Records feat Awol One). C’est donc pas nouveau, entre la petite guitare acoustique qui tourne et qui chiale, et le chant qui balance un petit couplet (Honey Folky superbe…) avant de se retirer sous l’avalanche de beats et synthés séquencés sur la Mpc. Alors sur Chorea, on a Marine Eyelid, qui pousse le vice beaucoup plus loin. Vraie chanson cette fois, avec chant un peu plus affirmé et mélodie évidente. Et pourtant, ça ramone dur, entre rythme imparable, et lignes de claviers bien appuyées. On se paie en plus une wobble bass pas piquée des hannetons, qui grince dur derrière la gratte folk. Devendra Banhart se fait racler la gueule sur le bitume de l’autoroute A84, et en plus il aime ça. La fin est toute belle, tu claques dans tes mains en voyant les boites à rythmes pleurer devant un soleil couchant. Des romantiques ces Akai.

Et pour pousser l’exercice de la chansonnette candide dérouillée par un brise-glace, le groupe inclus un remix d’un morceau de Populous With Short Stories. Pour le coup, avec Man Overboard, on a une vraie composition pop, mais Depth Affect aime brouiller les pistes, et balance une introduction façon Gameboy maelstorm, avant de laisser le champ à la voix haut perchée. Le morceau se déroulera tranquillement, si l‘on excepte deux belles montées électroniques à raidir l’échine. On sent le groupe un peu moins libre sur ce morceau, vu son statut de remix/relecture, à la durée un peu trop radine aussi. On lui préfèrera donc son pote du dessus Marine Eyelid, mais ce morceau passe drôlement bien quand même.
L’Ep se finira sur une longue montée mystérieuse, dénuée de beats mais pas de textures mille-feuilles et petites mélodies en clochette. Amenecer est donc carrément plus sympa que leurs delires noisy interludiques & conclusifs pas foncièrement dingues. Non là c’est de la montée électronique de ninja, si tu ne fais pas gaffe tu te retrouves avec les viscères dévalant le calebard. C’est beau, ça envole ton âme sans problème. Mais c’est aussi, encore une fois, un peu trop succinct et frustrant, on aurait aimé voir le tout s’étirer une minute de plus… Histoire que Depth Affect nous plonge vraiment la gueule dans les étoiles, et ne pas se contenter de nous les placer à porté de main.




Un EP pour étaler ses talents avec brio. Depth Affect rassure, et montre que ses membres savent toujours autant se débrouiller dans le Hiphop-electro pur et dur, l’abstract folkysant, ou le banger visant la nuque sans tortiller du cul. Les synthés sont toujours à se damner, les mélodies aussi, les handclaps résonnent tellement qu’ils rebondissent sur toutes les parois de la caboche. Merde, l’introduction du premier morceau est folle, avec cette voix qui part en vrille, supplantée par cette guitare branquignole à tomber. Le pied. Et franchement, le morceau avec Riddlore est une bombe. Une vraie correction, un passage à tabac émo, une caresse avec poing américain, le couteau tente de s’infiltrer sous tes omoplates, mais on t’as fait la bise juste avant donc ça va c’est cool. Un 3éme album est attendu la bave aux lèvres.

Car en s’axant sur des compos toujours aussi nerveuses et mais surtout pétries de mélodies et d’émotions, le groupe breton n’a jamais aussi bien porté son nom.





Depth Affect – Else’s Vision feat Riddlore?





6 Titres – Autres Directions
Dat’





CJ BOLLAND – Electronic Highway

Posted in Chroniques on August 24th, 2010 by Dat'


Du Dehors



C’est l’été. Et pendant cette saison, en plus de dépérir sous la clim’ ou en face d’un ventilo qui ronronne et empêche de dormir, on ne peut que déprimer en voyant des rayons de disques restés inchangés depuis mi juillet. Peu (pas) de sortie, tout est bloqué, on attend fin aout et son avalanche de bonnes galettes, qui feront toutes moins de 35 minutes vu que cela semble être la norme en 2010…

Alors forcément, c’est souvent une période vers laquelle on dérape vers ses classiques, vers les oldies, vers les plaques que l’on écoute régulièrement et distraitement dans son appart, mais que l’on n’a pas posées dans son discman depuis un bail, histoire d’arpenter les rues la nuit, des souvenirs dégoulinant la gueule. Dans une période où pains aux chocolats rimaient avec découverte musicale constante, ou crise de catalepsie en classe de maths copulaient avec synthés électro et beats tronica. A suivre de plus en plus d’artistes, de semaines en semaines, de mois en mois, d’années en années, les disques s’empilant, immuablement. Un cd reste un classique, figé, incarné plus par le titre de l’album lui, plus que l’artiste lui même. “Yep, un de mes disques préférés, c’était le sublime Electronic Highway, de CJ… euh… Roland ? Folley ? Folland ? merde”. Avoir des trous de mémoire pareil, c’est rageant. Alors on fouille dans ses cd, (on retrouve des galettes plus ou moins marquantes (“Ah Lunatic Asylum putain !” ” Hey Bosco !” “Ouah le SourceLab” “Merde j’avais acheté un Urban Cookie Collective ?” “The Beloved, je me le repasse”) On trouve enfin le Lp, on le claque dans la chaine Hifi, et on pleure tellement c’est beau.







Bon je mens un peu en disant avoir totalement oublié le disque, car certains titres de l’anglais tournent encore assez régulièrement dans ma tête (Camargue, Naphtali et Con Spirito). C’est surtout qu’il me fallait une bonne introduction, et que le disque pour lequel j’ai retourné ma collection de Cd était une compilation Dance Machine. Le genre de truc que l’on ne dit pas trop, surtout en début d’article. Là ça va c’est à peu près caché entre deux lignes, pas de problème. On pleure en regardant l’artwork aussi. Bref, on était sur Electronic Highway, ses mélopées inébranlables, des litanies qui me feront toujours chavirer, à croire que mon cœur mou est resté soudé au préau, malgré mon entrée dans cette vie d’adulte pleine de vice.

A dire vrai, le morceau ouvrant Electronic Highway, The Tower Of Naphtali restera pour moi l’une des plus belles pièces de la musique électronique mélodico-mélancolico-naive, à ranger à coté d’un Amenity de Link, d’un Twangle Frent d’µ-Ziq ou Even Spring de Plaid. Les trucs que vous avez écouté mille fois, et qui vous arracheraient pourtant toujours une larme en public.
Parce que la mélodie, et ces petites clochettes espiègles, filent vite le bourdon. 10 secondes de superposition de Bells et de nappes ambiant, et l’on sait déjà que le morceau va être grand, sublime, parfait. Ce morceau, c’est la grâce incarnée, une fresque qui se retrouve vite encrassée par un rythme hypnotique.
Ton palpitant obstrué par la graisse, c’est le rythme. Ta dernière rupture passée à la moulinette, c’est la mélodie. Les deux premières minutes, ça pourrait être un tube de stade, un rouleau compresseur trance, vu l’évidence du tout, mais Cj Bolland préfère balancer ça dans un écrin cristallin et fragile, histoire de nous violer l’échine. Tiers du morceau, le tout s’éteint sans prévenir, avec pour seul sonorité ce rythme en mode aorte pétée, et le tout bascule dans un truc tellement émo que l’on a envie de se couper les veines pour asperger ses anciennes lettres d’amour tant la mélodie est belle. Evidement, la litanie du départ revient, tout se superpose, alors nous on craque, on est déjà à se rouler dans les nuages en se disant que putain, le truc à 15 ans mais il sonne tellement parfait que s‘il sortirait aujourd’hui on pleurerait devant sa tv en attendant, en vain, qu’il passe sur Mtv pulse. Et ce n’est pas l’attaque élégiaque de la pénultième minute qui nous fera dire le contraire. Désossé moralement par ce bijou absolu. A chaque putain d’écoute.

J’en vois déjà rigoler en disant que le morceau du dessus sonne actuel. C’est un peu comme dire que le On d’Aphex Twin (assez proche) est tellement Ghetto qu’il semble tout droit sortir de Windows Vista. Certes. Alors j’ai une autre cartouche en réserve, avec Con Spirito. Long morceau à la structure drum, cette track laisse débouler directement de superbes nappes Trance qui n’arrêtent pas d’onduler, foutant dans les toilettes crades d’un club le morceau christique 12 o’clock de Vangelis. Mélange de claviers célestes et chants angéliques, avec un petit grain pute, le tout est parfaitement taillé. D’ailleurs l’anglais le sait, et laissera courir tout le morceau comme ça, sans réel changement, si ce n’est des ondulations et des passages de relais entre les synthés et les rythmes (qui friseront l’indus pendant une poignée de seconde, avant de se noyer dans la mélodie) Une vraie course de 8 minutes entre une litanie parfaite et un métronome dérouillé, qui flottent, se croisent et s’envolent. On ne sait plus si l’entité club est cristallisée par les nappes, droguées, dance, enfumées, ou par ses rythmes violents et nécrosés. Mini-jupes tournant en slow-motion vs usine démontée aux folles machines. Pourquoi actuel ? Parce qu’avec des beats plus ronds ou espacés, c’est exactement ce que l’on retrouve partout actuellement, ces nappes trances étouffées et droguées dont est gorgé un disque comme MMX II de Clubroot… Ce genre de passages incroyables qui me friseront toujours la gueule, noyées dans des volutes Dubstep ou sur un lit déstructuré.




Toujours coincé entre les nuages et la piste de dance, le nez dans la pisse de chiottes et le cœur en escapade, avec le très long Nec Plus Ultra, 11 minutes au compteur. Il n’y aura ici que rythme Drum’bass et nappes ambiant à te cramer la gueule tellement elles sont belles et parfaitement posées. Ca pourrait sembler long, durer des plombes. Que nenni, il règne ici une atmosphère de conduite dans le désert, de paysages défilant derrière la vitre d’un tgv, de ville mourant au petit matin observée du haut de son balcon une bière à la main. Fresque c’est le mot. Hypnotique aussi, superbe surtout.
On pense que Cj Bolland lâche les chevaux avec Zenith. Ici, le rythme tabasse des le départ, entre Techno racée et drum métallique, ça claque de partout, ça tressaute dur, des bleeps vont vibrer la nostalgie, qui t’en mélodira-tant. On frise le banger rave-ish agressif, mais à partir de la 3 minute, une nappe affolante déboule, toute fragile, tentant de survivre sous les excavations, avant de se retrouver seule et de partir dans une mélodie sublime, incroyable, mi-trance, mi-angélique, se faisant rapidement charcuter par un rythme et une bassline qui arrachera la jugulaire de tout amateur d’électronique mélancolico-fracassée. Le final plonge dans l’épique exacerbé, ça explose de partout autour de toi mais en même temps tu sanglotes des tympans tellement c’est beau.
Bones sortira le simili-amenbreak pour quelque chose de carrément Drum’n bass, seche et claquante, avec en prime la petite bassline bien jouissive qui fait “pom pom pompompom pom pom” pour te faire dodeliner de la tête. De nouveau, ce sont les synthés incroyables qui porteront le morceau au firmament (oui carrément) avec une mélodie aérienne et saccadée à m’arracher les larmes. Dans mon bidou j’ai la triperie qui fait des bonds, des papillons dans le ventre, des fourmis dans les hanches et des larmes dans les yeux.

Catharsis sonnera plus squelettique et frontal, rappelant clairement l’album précédant de Bolland, 4th Sign, plus enlevé, mais beaucoup moins mélodique (si l’on excepte le diamant Camargue, et le craqué Pendulum). Il sera pourtant parfaitement tenu, avec cette arrivée de chœurs fantomatiques à raidir l’échine, hululant distinctement sous l’amas de beats névrosés.
Ce qui est intéressant, c’est de voir le basculement du disque, à partir de la fin de ce morceau. Les 7eme, 8eme et 9eme morceaux, sonnent, eux, clairement plus datés, plus vieux, accrochés dans le passé. Car Cj Bolland, sur les 3 derniers titres, fait hurler les machines, balance du gros son, et se retrouve alors confronté à des tics un peu dépassés, que l‘on ne retrouve pas dans la sincérité mélodique du dessous. La Drill indus de Spoof sonne comme une vieille face-b rejetée de Fluke, et crache ses larsens un peu dans le vide, sans réelle émotion. C’est plutot cool comme morceau, mais ça n’a plus le même impact que ceux du dessus… Neural Paradox, avec ses 9minutes, fatiguera avec sa première moitié vraiment vieille, dissonante et presque irritante. Le morceau pouvant être considéré comme le seul vrai raté du disque. Car le final Drum Tower déboite, grosse techno pachydermique bien cyberpunk. C’est jouissif, bien foutu, mais cela reste, dans ses sonorités, indéniablement ancré, soudé dans une période qui sonnait très Fluke, Wipeout, premiers Prodigy et Chemicals Bro. La mélancolie n’est plus là, effacée sous la débauche de beats et de machines furieuses.




Et c’est en chialant sur la beauté des deux premiers tiers de l’album, puis en se marrant en pensant à ses gouters d’après école en écoutant les 30% restant, que l’on peut dégager un super concept philosophique dans la musique électronique :
La beauté d’une mélodie semble traverser le temps, rester actuelle dans nos palpitants malgré ses 15 ans d’âge, là ou la débauche d’effets portent clairement le poids des âges. Car ce sont clairement les mélodies qui portent le disque, s’agitant sur des rythmes impeccablement ciselés certes, mais clairement en retrait par rapport aux claviers magnifiques. Car à l’instar d’un On d’Aphex Twin, un morceau comme The Tower Of Napthali continue de faire son office et de nous ravir même si l’on sait bien que le truc date pas d’hier. Les synthés de Con Spirito trouvent leur écho dans biens des disques Dubstep Uk Garage aux apparats putassiers psychotropés d’aujourd’hui, et d’autres coups de génie comme Zenith continueront de décaler les mâchoires d’un revers de beat.
Le seul petit regret dans ce disque, c’est de ne pas avoir de représentant un peu plus techno façon Camargue, indispensable track, qui a vieillie mais qui reste énorme, highlight de la galette précédente. Car Electronic Highway se focalise exclusivement, ou presque, sur quelque chose plus Idm, de plus déstructuré et mental. Je redeviens de toute façon toujours gamin quand une musique électronique sait me titiller avec les vraies mélodies, les belles, les cristallines, les intemporelles. Qu’elles soient noyées sous du Dubstep, de la drill, de la drum, posées sur un lit dance, noise ou rock. C’est beau, jouissif, et cela a ce petit je ne sais quoi de mélancolie qui vous accroche pour une bonne partie de la vie.

Hop, inserer tout pleins d’autres phrases sérieuses dans la conclusion, je voulais juste parler d’un disque qui me prend les tripes, ces dernières étant peu remuées par les rayons disques d’Aout, la période ayant toujours été propice au retour vers l’occas’ et l’envie de retourner aux vieilles galettes. Parce que l’été, on a surement un peu plus de temps libre pour s’abandonner.





CJ Bolland – The Tower Of Naphtali (album : Electronic Highway)






Cj Bolland – Camargue (album : The 4th Sign)





9 Titres – R&S Records
Dat’




BATHS – Cerulean

Posted in Chroniques on August 12th, 2010 by Dat'


La tristesse n’est pas un reproche vous savez



Il paraît que l’on commence à parler de Baths un peu partout, que son album est super abouti, bien produit, qu’il ne faut pas louper ça et compagnie. Et en même temps, le disque est introuvable hors Us, les vidéos Youtube ne croulent pas sous les visionnages et on ne sait pas grand chose du bonhomme. Le Lp est sorti début Juillet sur le label à la fourmi noire, je ne le savais pas, j’ai du louper le coche, faut dire qu’avec cette énième cover arborant un cercle, on commence à se perdre, ou a croire à une sortie alternative d’un Caribou, Sunn0))) ou Autechre… qu’ont-ils tous à coller ces ronds sur ces pochettes ? Jouer sur le symbolisme du soleil, globe, trou, vagin, crêpe, frisbee de la vie, je me noie dans la philosophie rien qu’en me baladant dans un rayon Fnac. Hâte de passer au hype du triangle.
Bon sinon le mec vient de L.A, est chaperonné par Daedelus (rien que ça), et il a tout un bordel de projets que je n’ai jamais entendu. Alors par contre, son album là, après l’avoir parcouru, je n’en avais pas croisé souvent des comme ça non plus.







Décrire la mixture de Cerulean, n’est pas une mince affaire. Enfin si, on peut balancer un raccourci façon communiqué de presse qui arrangera tout le monde, mais ça ne fera pas avancer des masses le schmilblick, voir fausser l’appréciation du tout. Pas d’inquiétude, j’en ai une de comparaison toute faite, mais je la garde pour le paragraphe suivant. Pour se faire une idée précise du cas Baths, le mieux est d’écouter le morceau et d’être franchement surpris, si l’on a pas eu, comme moi, d’infos en amont :
Piano larmoyant, choeurs dépressifs, c’est drôlement beau. Ca sent le truc mélancolique à souhait. Et pan, un beat syncopé, abstract, déboule sans prévenir et surprend franchement. On ne comprend plus grand chose, et c’est l’étonnement le plus total à partir du moment où Baths se met à hululer d’une façon traînante, comme la plus normale des compos tire-larmes. Alors ça déroule son chant (très beau, bien tenu) sur ce beat hiphop, ce piano qui fait grésiller la colonne, et samples de partout, rythme rehaussé, spirales synthétiques. C’est franchement beau, ça m’a éclaté la gueule à la première écoute, encore plus quand l’américain repart dans sa pop song calmos, cette fois aidée de clavier analordiens du plus bel effet. L’enfoiré vient de me voler le cœur.
Ce morceau, on dirait un Sebastien Schuller vs Flying Lotus. Si si sincèrement, je viens de voir votre mine interloqué en lisant ça, mais c’est la meilleure comparaison qui m’ait venu à l’esprit. La mélodie est foutrement belle, le chant mêlé dans les chœurs est parfait, et le beat rond, chaud, drague la nuque. Bref, on est devant un album Abstract-émo-pop-hiphop. Je ne mens pas sur la marchandise. Et c’est vraiment cette recette qui va être développe tout le long de cette galette, que la voix de Baths soit bien présente ou mise en retrait pour des morceaux plus électroniques.




Lovely Bloodflow, plus sec, accueillera un chant plus funky, plus appuyé, pour un tout imparable, qui va vite flirter avec les hauteurs à coup de claviers ambiant planants/poignants. Le rythme se nécrose sur lui même, Baths se fait presque sexuel en susurrant le refrain. On entend sa langue claquer, les muqueuses buccales s’agiter, la salive rouler sur une guitare acoustique, une mélopée soudainement chillout, et du field recording bien chelou, pour une conclusion quasi acoustique.
Hall lui, commencera dans un bordel sans nom, pour déboucher sur une superbe ligne abstract, on se croierait chez Depth Affect, c’est mélodique en diable, ça rebondit de partout, fourmillant de détails, progression lumineuse. Car après 1min30 d’abstract bien foutu, on bascule soudainement vers quelque chose de plus pop, tout en gardant ce coté experimentalo-bordelique. Le soleil sur la Mpc, on se met à chanter comme des niais sur une base à la Nosaj Thing. Well well well, on peut dire que je ne m’y attendais pas.
On a même le droit à la pop song ultime sur Plea, à chanter sous la douche, mais avec un rythme de folie, bien sourd, des handclaps jouissifs, et un travail sur le chant à raidir la tignasse. On a même une incursion Shoegaze-drill’n’bass-pop (si si vraiment) avec Indoorsy, qui m’a découpé les viscères en petits cubes avec sa montée épique à la M83. Incroyable que ce (trop) petit morceau. Her Space Holiday a du souci à se faire.

Mais pour les puristes les plus chevronnés, l’album ne verse pas seulement dans les couplets chantés, et file des morceaux plus dans la norme du Nu-abstract actuel. Mais candide, tissé à l’or fin, avec des mélopées et chœurs éthérés évidents. Une fois encore, Sebastien Schuller me vient à l’esprit en écoutant certains morceaux de Baths. Comme si les morceaux instrumentaux de “Happiness” se voyaient télescopés par une Mpc folle. Meilleur représentant du genre avec Maximalist, ENORME morceau qui vrille dans tout les sens avec des synthés bleep-chiptune-bizarres superbes, des rythmes fous, d’une beauté dingue. Je ne sais pas quoi dire d’autre, c’est imparable, superbe, jouissif. Tu mélanges rupture sentimentale et suspensions hydrauliques pour lowriding, et tu as ce morceau.

Plus enfantin et léger avec Animals mélangeant beats incroyables et chœurs d’enfants qui ont l’air d’etre plutôt contents. C’est drôlement joli, ça titille les hanches et le cœurs, et ça déboite même franchement quand un grattement imparable (guitare ?) déboule et dynamite le tout. On ne pourra de plus qu’être conquis par Rafting Starlites Everglades, teinté Boards Of Canada, et le morceau ouvrant l’album, Apologetic Shoulder Blades (ahah), mêlant Abstract syncopé et chorale d’anges.





Cet album, sincèrement, a tout pour plaire, c’est presque du fan service. Mais plus qu’une banale fusion nu-abstract-pop, ce Cerulean m’impressionne par sa richesse, sa densité sonore. Ca déborde de partout, les sons partent dans tous les sens, tu as toujours un sample ou un bruit parasitant le background. Cela en fatiguera peut être certains, mais cela m’enchante personnellement. Il n’y a bien que le dernier morceau qui me laisse de marbre, où justement l’américain fait le minimaliste. On a l’impression que Baths deverse un camion entier de sonorités dans nos oreilles, c’est jouissif, beau, et presque étourdissant ( Maximalist, je parle de toi). Plus mélodique qu’un Nosaj Thing ou Dorian Concept, moins bordelico-savant qu’un Flying Lotus, plus abstract qu’un Sebastien Schuller (ahah), mieux branlé qu’un Bibio, moins émo mais moins frustre qu’un Mount Kimbie, ce LP a pas mal d’argument pour se greffer longtemps dans mon cortex. Attention, je ne dis pas que le tout est meilleur que les références précitées. Juste que cet album est réussi, du bon boulot. Rien d’hallucinant, mais vraiment très bien taillé.

En fait, ce qui me fascine le plus sur ce Cerulean, c’est ce fil rouge improbable, qui le démarque des autres : Cette constante pulsation, ce battement de cœur, ardant, qui traverse l’album de bout en bout. Le meilleur exemple reste le superbe titre Rain Smell, pop éthérée, un titre fabuleux qui respire, nous porte. Le beat n’est qu’un souffle plus ou moins appuyé, provoqué par le field recording. Un rythme à l’envers, qui se la joue métronome grâce aux silences, qui se dérobe quand il faut marquer le pas. Et ce palpitant, cette respiration, on le trouve tout au long de l’album. Par ces beats toujours ronds, chauds, espacés, souvent callés sur les frétillements d’une aorte, le disque nous enveloppe, nous rassure. Baths nous prouve qu’un album organique, ce n’est pas forcément un truc bourré de hautbois et violons.

Ici, c’est bien ce battement de cœur constant, cette pulsation hypnotique qui possède et renverse, et offre un Cerulean plein de vie.




Baths – ♥





Baths – Maximalist






12 Titres – Anticon
Dat’




MOUNT KIMBIE – Crooks & Lovers

Posted in Chroniques on August 1st, 2010 by Dat'


Mount Saint Kimbie+Saint Kimbie Mount




Mount Kimbie avait clairement ravagé mon petit coeur l’année dernière en sortant deux Ep contenant ce qu’il y avait de mieux en 2009. Electronica-2step-abstract-folk-UkGarage-experimentalo-enfumé et plus encore, il était difficile de catégoriser les petites perles des deux anglais, qui ne révolutionnaient rien, mais qui faisaient leur tambouille foutrement bien. Ces rythmes, incroyablement bien taillés, d’une classe extreme, me faisaient presque croire que Mount Kimbie composait simplement la musique que je rêvais d’entendre depuis des lustres.

Bref, mes chouchous de l’année 2009, avec un album que j’attendais la bave aux lèvres, un long format enfin, une longue fresque Mount Kimbienne me rassasiant pour deux ans grâce à de futurs classiques Abstract 2step qui renverraient Flying Lotus dans-son-studio-en-pleurant-(ah !)-pour-enfin-composer-un-album-que-j’aimerai-au-moins-un-peu-parceque-là-franchement-j’ai-honte-mais-je-n’accroche-pas-sur-son-second-opus-non-plus-même-si-Zodiac-Shit-est-un-morceau-extraordinaire…
Pan, Crooks & Lovers, qui déboule avec sa pochette tellement crunk que même Lil Jon a pensé que le tout dépassait les bornes. Merci Hotflush Recordings donc, sortir un Lp de Mount Kimbie, c’est la bonne action de l’année. Juste la prochaine fois, n’oubliez pas de mettre l’autre moitié du disque.





Alors certes, la cover bien frontale du Lp choque par son mauvais goût au premier abord, mais en ouvrant le très beau packaging cartonné, le tout prend un sens. Il n’y ici que photos cornées et mélancoliques d’instantanés pris dans les rues anglaises. C’est joli, sincèrement, et l’on voit l’artwork principal d’un autre oeil après ça.
Tout adorateur du groupe que je suis, j’ai quand même fais un peu la gueule en faisant claquer la galette dans mon discman. La durée : 35 minutes. Le premier morceau, intro qui n’a rien de spécial. Le deuxieme, Would Know, est assez sympa (avec ses bruits de foule et son facetieux synthé final) mais loin des missives envoyées sur les Ep. Bref, la mine renfrogné, je me dis que c’est mal barré, que je viens deja de passer sous la barre des 30 minutes restantes, que je vais etre déçu la larme à l’oeil, que Hotflush c’est des méchants, que je vais devoir trouver une autre raison de vivre, tout ça.

Before I Move Off déboule, avec ses cordes bizarres. Je suis toujours pessimiste. Un rythme arrive. Enfin. Un truc qui esquinte, qui parle directement à la nuque, qui fait claquer tes doigts. Ca te fait frisotter les cervicales, fourmis dans les hanches. Parfait. Ce rythme est parfait, c’est du Mount Kimbie, ce que j’attendais. Alors on se laisse aller. Boum clap boum clap boum clap. La guitare acoustique prend de l’importance, croisant le bleep 8bits. C’est imparable, c’est bien sympa. Ca file le sourire. Tout s’arrête, on est surpris, et là, Mount Kimbie mute, lâche sa forme ultime, absolue, sublime. Des voix putes, charcutées, lachent des syllabes ici et là. Le rythme est tellement mortel, la mélodie aussi, c’est super simple, mais au final juste t parfait. Tu écoutes ça dans la rue, c’est IMPOSSIBLE de ne pas sourire, de ne pas faire “snap” doigts, de ne pas avoir envie de tourner sur toi-même une rose entre les dents. C’est simple, à la 2min18 du morceau, je me suis écrié mentalement “putain c’est l’album de l’année”. Alors quand même pas hein, c’était l’émotion. Mais bordel, ce gap, ce petit vide qui débouche sur une deuxième partie de morceau absolument mortelle, est incroyable. Cette 2min18, ce fut un petit rush d’adrénaline, une libération, un soulagement en me disant que oui, ce Crooks & Lovers allait etre cool, malgré un départ poussif. J’en fais trop? Bien entendu.

Et après nous avoir montré que Mount Kimbie maîtrisait toujours aussi bien sa recette, le groupe va nous étonner avec Blind Night Errand. Sur la piste précédante, on marchait dans la rue avec le soleil dans la gueule, en tenant ses ray-ban et son sandwich thon-mayo, mais ici, c’est les caves, le dancefloor, la saleté, Londres un vendredi soir bourré. Le rythme est plus electro, plus enlevé, grosse ligne de basse imparable, stroboscopes, minijupes et machine à fumée. Evidemment les samples de voix surviennent vite, ça soupire, ça murmure, petits orgasmes éparses noyés dans cette charge caverneuse, tu sentirais presque la chair et le gloss sur tes levres, télescopages de corps sous averse de drogue. Dernier tiers, on opère un virage à 180° avec un shamisen qui remplace le simulateur de vitalic, pour repartir dans un abstract plus lié au groupe.
Adriatic, interlude abstracto-folk, permettra de faire tranquillement redescendre la pression, avant l’autre énorme claque du disque, Carbonated. Parce que là aussi, comme Before I Move Off, c’est une vraie raclée que nous administre les deux anglais. Le morceau démarre sur une techno cristalline, superbe, tout en relief. Parasites, nuage sonore, c’est un peu de la detroit-shoegaze, avec cette facette frontale qui va se faire remplacer par quelque chose de plus laidback. Le timing est assuré à la perfection, tout intervient pile au bon moment. Et quand on se dit que des petites voix sur le tout formerait un ensemble parfait, les anglais ne se privent pas, et balancent de nouveaux de petites exclamations pas piquées des hannetons. Ecrase moi le coeur avec tes talons, j’en redemande. Comme pour les EP, il n’y a rien de spécial sur ce morceau. Pourtant il est parfait. tout simplement. Tout intervient à la perfection, avec une pertinence rare, c’est construit à la serpe, superbement effectué. Le morceau, sur un fade-in à te griller la colonne vertébrale, repart dans ses apparats techno du départ, on n’en s’en rend même pas compte. On vient de se prendre une vague de bonheur, de maitrise, de classe en pleine gueule. Magistral.




Alors Mount Kimbie va revenir sur des terrains moins défrichés, plus en raccord avec ce que l’on entendait sur les EP de 2009, de l’abstract brumeux à la William, sur le bien mystérieux et hypnotique Ruby, bourré de revers, bruits filtrés et field recording chelou, avec un rythme beaucoup moins enlevé que les pistes précédentes, avant une fin ciblant encore directement la nuque. On s’amusera beaucoup moins sur Ode To Bear, assez laborieux et franchement pas folichon dans ses sonorités. Et pourtant, une superbe mélodie et un beat terrible déboule, on se dit que le morceau commence enfin, on se prépare à remettre ses ray-ban, ben non, c’était juste pour les 20 dernières secondes. Frustrant.

Heuresement, Field déboule. Le banger du Lp, le fusil à pompe dans le thorax de Crooks & Lovers. Et pourtant ce Field, qui avait filtré quelques mois avant la sortie du Lp, m’avait clairement laissé de marbre. Parodie du sublime Maybes, en reprenant les mêmes codes, structures et idées. Bref, il y avait de quoi etre bougon. Et pourtant, callé au milieu du disque, ce morceau devient énorme. Comme son grand frère, il a donc deux parties disctinctes. On démarre ici avec un tunnel de synthés façon gros drogués, Mount Kimbie dans la rave, bloqué sur un acid, à taper sur la porte des latrines de festival en bavant. Hypnotique, jouissif, le coeur se met à sursauter à l’orée de cette guitare acoustique candide qui se fait attendre petit à petit, nous assurant que l’explosion sera belle. Arret brutal, une demi seconde de silence, et l’on part dans un folk 2-step vraiment beau, encore une fois vraiment parfait niveau construction et timing. On est passé du champ tekos ravagé à la balade champêtre en compagnie de sa belle. Le morceau avait clairement le potentiel de muer en fresque, de s’étendre sur plus de 7 minutes, on sent que Mount Kimbie aurait pu étirer ces deux parties, les faire copuler sur la longueur. On se contentera d’une vignette drôlement réussie.
Mayor renverra lui à Sketch On Glasses, aka un abstrackt plus technoïd, remuant, saccadé, et imparable. On croit entendre claquettes et balles de ping pong, le synthé est mortel, les petites demoiselles qui laissent échapper des “ouh yeah, love you the thing is ouh yeah ouh yeah” et cela se transforme en vrai tube à partir d’1 minute 30. Le morceau change de structure toutes les 30 secondes, les idées fusent de partout, rien de spécial dans l’ensemble, mais c’est génialement mis en forme.




Malgré tout l’enthousiasme survenant à l’écoute, on ne peut qu’être frustré, voir déçu par ce Crooks & Lovers. Une sympathie énorme émane de ce disque. Une émotion aussi, une mélancolique, un certain je m’en-foutiste qui touche, franchement. Dès que l’on écoute la galette, c’est bonheur, sourire et pulsations. Mais dès le casque posé sur les genoux, on fait la gueule. Trop court, pas vraiment fini, ce Lp offrant quasimment moins que les deux Ep précédants. Il est incomplet, Il a quelques pistes sans grand intérêt (Ode To Bear, et surtout le trio intro/interlude/outro, qui auraient pu, en les réunissant, faire une simple chanson d’un seul coup, et on n’en parlait plus), et en sautant un ou deux titres, on bouffe l’album en moins d’une demi-heure. On en viendrait à regretter le fait que le groupe n’ait pas inclues quelques morceaux des Ep précédents, Maybes et Vertical en tête.

Mais mais mais… certaines tracks de Crooks & Lovers sont les morceaux les plus cool de l’univers. Des missives comme Before I move off, Carbonated, Field, Mayor… Tout est dosé à la perfection, ce qui me fascine avec ce groupe. Crooks & Lovers, c’est des rythmes incroyables, ces petites voix putes qui te susurrent à l’oreille auxquelles tu réponds “oui ça va bien et toi?”, claquer des doigts, manger une crêpe au miel, boire un pepsi cola.
Le disque est court, oui. Aucun problème, on l’écoutera toujours au moins deux fois.





Mount Kimbie – Before I Move Off





Mount Kimbie – Carbonated






11 Titres – Hotflush Recordings
Dat’




VENTURA – We Recruit

Posted in Chroniques on July 22nd, 2010 by Dat'


Going Blank Again



Je me suis toujours un peu pris la trogne sur la nébuleuse musicale, sur le pourquoi du succès d’un groupe plutôt qu’un autre, sur le choix de propulser 3 ou 4 pèlerins sur un simili-coup de tête. De savoir que des mecs jouent dans leur garage des choses peut-être carrément mieux qu’un Chris Clark ou qu’un Dillinger Escape Plan. Mais que ces mêmes entités, déjà reconnues, ne seront jamais aussi célèbres qu’un Daft Punk ou un Pixies. Talent, marketing, j’ai souvent eu l’impression qu’il fallait être tout simplement au bon endroit, et au bon moment. La rencontre qui fait tout basculer, le coup de bol survenu de nul part, le patron de XL Recordings qui échoue dans une salle de concert cradingue et propulse un nouveau groupe. Alors que sur le trottoir d’en face, il y en a trois autres peut-être meilleurs qui s’escriment à torturer leurs instruments dans le vide.

Le net change évidemment un peu la donne, et file pas mal d’espace aux groupes, ok, mais ce n’est pas le propos et ça ruine ma philosophique introduction. Alors donc, comme ça, un petit groupe, Ventura, que personne ne connaissait sauf les acharnés de rock expérimental suisse, sont sortis de l’obscurité, tout à coup, à cause d’une collaboration. Car c’est carrément Yow, le frontman dérouillé des cultes Jesus Lizard, et qui a collaboré avec tous les grands du rock/hard/métal/indé/expé/fracturé qui déboule pour faire un Ep et une mini-tournée avec eux. Bam, super underground les Chroniques Automatiques, on serait passé à coté d’un diamant si on ne nous l’avait pas mis sous le nez à coté d’un grand nom. Ouep. Parce que je suis tombé sur un clip youtube de la collaboration, et que j’ai trouvé ça assez renversant. La gouaille de Yow, complètement ramoné, avec sa voix toute cassée, et surtout des guitares lumineuses, un mur du son de grand malade, télescopant rock, pop, noise et shoegaze donnant un mélange pas piqué des hannetons. Bref, l’album We Recruit, sortant sur l’excellent label African Tape, ne pouvait qu’attirer l’attention de mes esgourdes en manque de matraquage.





C’est pas au niveau du packaging que l’on va trouver de l’originalité. A l’instar du Marvin sur la même structure, le Ventura se déplie, il est fonctionnel, ya un cd dedans, point barre. Niveau musique par contre, le disque, s’ouvre sur quelque chose de mélodique, un peu intriguant, avec ce sifflement qui se fond dans une ligne de guitare. Cette dernière égrène sa mélancolie, gagne en puissance, prend ses aises, s’intensifie, pas besoin de se torturer le cerveau, Ventura nous propose de la bonne mélodie sur ce Brace For Impact. Le chant, un peu freluquet, reste parfaitement placé pour accompagner ces volutes mystérieuses. Plus de deux minutes d’ascention, la voix nous prévient en boucle : “How close are we / To the collapse / Not far from the crash / brace for the impact”, le boulet est envoyé, ça explose de partout, les guitares tonnent dans tout les sens, bien jouissif. Ca reste classique, pas incroyable d’un point de vu structure, c’est pas forcément ce qu’il y a de plus escarpé. Mais ça marche drôlement bien. D’autant plus que le chanteur, lui, ne s’égosille pas, il continue d’égrener sa litanie calmement, comme si c’était le seul mec à ne pas s’être pris ce fameux mur en pleine gueule.

A dire vrai, je n’ai pas énormément aimé ce disque au départ. C’est le genre de plaques sympathiques, celles que vous fais écouter votre pote les yeux brillants, alors vous allez répondre juste “ouai c’est cool”. Parce que le disque l’est un peu évidemment, mais surtout parce que vous ne voulez pas repartir dans une discussion de 2 heures. Parce que finalement, avec une oreille distraite, on a bien l’impression que Ventura nous sert un rock un peu classique, poppy-noisy-shoegazy tranquille, pas dingue dans les compositions, mais assez frontal et mélodique pour accrocher l’oreille. Loin des deux bourrasques faites avec David Yow par exemple.
Pour illustrer : le deuxième titre, With Ifs, est sympa. C’est rock, ça tabasse un peu, une montée, une explosion, c’est plutôt beau et bien branlé. Cool, bon morceau rock, on passe au suivant. Et ainsi de suite. Ouai, les deux-trois premières écoutes, c’était ça. Et puis un soir, je ne sais pas pourquoi, le disque m’est tombé sur la gueule. With Ifs, ce n’est pas sympa, c’est gigantesque. C’est un morceau pop-rock-noisy parfait. Il y a les grattes qui grincent au départ, la batterie syncopée, qui passe tes enceintes à tabac. Bien violent, mais avec un chant doucereux, et un refrain tout con, à base de “With Ifs, we put paris in a bottle” (whao), donc ça passe nickel. C’est massif, jouissif, prenant. Et pan, le break émo arrive, t’arrache la colonne vertébrale. Avec la petite mélodie à la guitare qui déboule alors que deux ou trois larsens finissent de crever. La batterie qui se contente d’un kick puissant pour faire monter la sauce. Le chanteur qui crache “whooooooohouuuuuuoooowooouuuoo” comme quand t’étais jeune et que tu faisais pareil avec une main vers le ciel, en y croyant dur. Non sans déconner, ce petit break de 10 secondes, il est parfait, il a volé mon cœur, alors que je m’en battais les couilles sur les premières écoutes.
Et après, c’est la baffe en mode rotatif. Tout s’emballe, les guitares hurlent, le mur du son t’écrabouille, les futs sont incroyables, l’autre continue de dire ses conneries avec Paris dans sa bouteille, les saturations noises viennent te violer l’échine. La grosse folie. Voilà, à la première écoute j’avais à peine sourcillé. La mélodie, la montée avait du ricocher sur ma caboche sans vie. Parce que maintenant, je saute de partout en imitant le batteur. Et si j’écoute ça dans le métro, je tente de résister pour ne pas passer pour un malade, mais c’est dur, alors on dirait que j’ai mal au ventre tellement le morceau il défonce. Hey en plus c’est pas fini, quand l’explosion se calme, le morceau part dans une troisième phase plus écrasée, à base d’à-coups de guitares bien raides, pour s’assurer que notre tête est enfoncée dans la boue. Epique.

Alors c’est parti, dès que l’on a accroché sur ce morceau, le disque se révèle, devient fou, explose. Tout ce qui était normal/cool/sympa/yakoialatélécesoir devient génial. Les mélodies sont incroyables, les structures ultra jouissives (je l’ai déjà dis merde), les idées fusent. Et pourtant, rien de spécial, rien de génial là dedans, on est pas dans un nouveau Mr Bungle.
Genre le troisième morceau, 24000 people, franchement, c’est la grosse charge rock/punky/noise basique, c’est super normal, et je suis sur qu’une tonne de groupe font des exercices dans le genre. Bref, ça pourrait être tout pourri. Mais là c’est génial. Tout est énorme. Le morceau fait moins de deux minutes, ça hurle de partout mais c’est parfaitement concentré, hop, on se tape encore un petit break moment d’émotion qui te tire la peau de cul, avant la grosse attaque finale. En plus les lyrics valent franchement le détour, entre ode à l’absurde, hymne rock débile et charge acerbe : “I dont really care about politics / i have no opinion about religion / I do understand terrorism / and i encourage war / im following trends / i am following trends” et le coup de grâce textuel lâché pendant le break pleurnichard : “24000 people dying of hunger in the world everyday / Fuck them all / Fuck Them All”. Cette dernière lâchée sur des guitares hysteriques. Bonheur.




Alors on va calmer les ébats avec I Always Said He Was Weird, qui dérouille avec sa plâtrée sonore apparaissant des la première minute, une gratte qui va hurler comme une damnée et une ligne de basse affolante courant sur tout le morceau. Frank Black se sentirait comme un poisson dans l’eau dans tout ce bordel. Will Kill For Love sera encore plus posé, avec une très (trop ?) longue première partie, à base de notes inquiétantes, qui vont se faire culbuter par une ENORME charge heavy, à faire tomber les charpentes, et une voix plaintive noyées dans les échos pour parfaire l’équilibre.

Ventura reviendra nous titiller le palpitant comme jamais avec les 3 derniers titres, de nouveaux pétris d’émotions (snif) et bien violents dans le même mouvement. All The Reason No To. Sur celui là, le trio suisse ne fait pas monter la sauce, il essaye de te filer la chair de poule dès l’entame. Bordel, ce mur de guitare à partir de la 30ème seconde, cette structure en mille-feuilles, ces larsens qui perlent de partout, et ce refrain touché par la grâce à partir d’une minute avec un chanteur qui lâche des “we made the choice of nothing” avec le cœur au bord des lèvres. Boum petit break claudiquant, peut être pas assez à fleur de peau, mais c’est tant mieux, sinon on serait mort sur place. Donc oui, petit break, et les grattes reviennent faire la guerre, c’est saccadé, ça s’arrête pour mieux te frictionner les miches l’instant suivant, c’est beau, putain. C’est toujours tout simple, rien de spécial. Mais ça défonce. Désolé pour le vocabulaire, je suis en roue libre. Le morceau aurait été parfait avec un break à la With Ifs, mais ce n’est pas grave, c’est déjà un monstre.

Why Are You Not A Coin renoue avec le rock plus frontal et léger, sauf que lui aussi il s’acoquine avec ton échine. La même recette, avec ces harpes de metalleux bien folles, une mélodie évidente et un chant un peu plus agressif. “Why are you not a coin / I’d keep you with my change / And i’d be careful not / To spend you / To spend you” et vlan grosse mandale de nouveau, avec une instrue à s’arracher les membranes. C’est tout, mais c’est parfait pour ma pomme.

Demons, parfaitement placé en conclusion, aura un ton un peu plus grave, et une durée plus aventureuse que ces congénères, car dépassant les 7minutes. Le chant est plus éraillé, le thème un peu plus dépressif, cela pourrait saouler, mais vu que Ventura ont été de super bons potes sur les morceaux précédents, on fait l’effort de tendre l’oreille. Il nous parle sur un lit noisy bien acéré, encore une fois rondement mené. C’est bruyant et aérien dans le même mouvement. Mais c’est réellement, et de nouveau, avec la cassure lumineuse du morceau que le groupe nous emporte. Guitare toute fragile, chant presque crevé, et ça monte, et ça prend de l’ampleur, et les cheveux se dressent, et la gorge se serre, on se prend la dernière charge du disque, ultime, impériale, comme si un 33 tonnes nous passait dessus. Apres 3minutes de bourrasques, le mec reviendra nous susurrer des mots doux dans les oreilles calmement, avant de s’éteindre, et nous avec.




Donc oui, ce We Recruit de Ventura, est clairement un disque de rock pas franchement inédit, qui n’invente pas grand chose. Pourquoi le groupe a t’il été choisi par Yow, et s’est subitement retrouvé dans la lumière poussiéreuse de l’underground, aucune idée. Pourquoi ce groupe restera surement dans l’ombre de la reconnaissance en masse et de la pluie de biftons, alors qu’il démonte une tonne de groupes confirmés avec ce We Recruit, c’est encore plus mystérieux. Etre au bon endroit, au bon moment. En attendant, ils préparent le terrain, en balançant un disque de folie, sans aucun temps mort, sans aucune coquille (allez, peut être l’intro un peu longue de Will Kill For Love, et un disque au final assez court, même s’il se tient parfaitement bien, en restant cohérent), bourré de morceaux jouissifs, mélodiques, bruyants, beaux.

Merde, quand j’écoute ce disque, je suis émerveillé par sa propension à me donner envie de faire de la guitare dans l’air, même si je ne sais pas en jouer. A tenir ma main devant ma bouche en faisant semblant de chanter, même si j’ai la voix d’un Gerard Darmon en plein cancer de gorge. En écoutant With Ifs, je saute partout en moulinant des bras pour tenter de suivre le rythme du batteur. J’avais oublié tout ça, mais je faisais pareil en écoutant I’m Just a man ou King For a Day de Faith No More. On s’arrête tout de suite, je ne dis pas que Ventura fais du vieux rock des 90’s. Non, ils nous font juste redevenir “jeunes cons” à nouveau, et ça c’est drôlement bien.

Mon âme d’enfant, je la cherche désespérément. Au moins, Ventura vient de me replanter violemment mes élucubrations lycéennes, et c’est déjà pas mal. Le plaisir de tressaillir sur un craquement de guitare, sur une batterie affolée, sur un refrain tire-larme. Coup de bol, cet énorme We Recruit est sorti de son coin sans prévenir, et risque de rester imprimé un bon bout de temps dans mon cerveau.






Rien concernant l’album sur Youtube et dérivé, on trouvera un With Ifs sur cette page : http://www.builtonaweakspot.com/2010/07/ventura-we-recruit.html






9 titres – African Tape

Dat’





AUTECHRE – Move Of Ten

Posted in Chroniques on July 14th, 2010 by Dat'


Good news, everyone ! (2)



On avait laissé Autechre il y a à peine 3 mois sur un très bon Oversteps, renouant avec les sphères mélodiques du duo, flirtant avec l’ambiant et le beatless, sans omettre quelques charges radicales (D-sho Qub ou Treale) On avait même droit à quelques surprises en tombant sur un Os Veix 3 superbe, que n’aurait pas renié Alva Noto, ou des See on See et O=0 faisant du pied à Plaid (dont on attend toujours l’album… ahem). Bref, le duo anglais respirait enfin, et ramenait sa musique sur quelque chose de plus concret, ouvert, rassurant.
Autechre sur cette première année, ce fut aussi, pour moi, un live presque traumatisant. Rêve de gosse de voir la formation en concert, je n’ai pas été déçu. J’ai eu l’impression de me faire passer à tabac pendant 2 heures, la musique ne s’arrêtant jamais, maelstrom d’une violence absolue, dans le noir complet, avec un son d’une ampleur et d’une frénésie hallucinante, presque intolérable. Le tout dans le noir complet. Et attendez, des concerts de noise ultra brutale, du simili-merzbow, j’en ai fais des tonnes. Avec mêmes des mecs qui vomissent sur scène avec des gants de ski. Mais non, cette performance d’Autechre fut surement le live le plus violent, le plus éprouvant qui m’a été donné d’entendre. Pas du tout le meilleur. Mais le plus sauvages, surement. Je passe sur le battement de cœur passé à fond la caisse pendant 15 minutes sur liseré d’explosions indus, avec des gens craquant totalement, se tenant la tête, recroquevillés à même le sol.

Quand le groupe arrive déjà de nouveau avec un disque, on prend un peu peur. Que Quaristice m’ait déçu, c’est un fait, mais son vrai problème, c’était tous ces appendices dispensables, ces versions alternatives de versions alternatives de versions originales (ou pas) sortant de tous les cotés, réduisant à néant la coherence de l’album, pour le transformer en vaste lego à composer soi-même. Move Of Ten aurait pu, elle aussi, passer pour un cadeau bonus, un junk disque servant à compléter son pendant sorti 3 mois avant, avec sa pochette similaire, le titre façon recueil de Faces-b. Pourtant la galette est un vrai album, un essai qui n’a d’Oversteps que le rond sédatif de sa pochette.





Et comme souvent avec Booth & Brown, à part un bien joli artwork, pas grand chose à se mettre sous la dent si l’on excepte une couleur intérieure (jaune délavé) qui détonne de nouveau, après le vert du précédant du disque. Mais de ce dernier, il n’en est pas vraiment question à l’ouverture de Move Of Ten, hargneuse, rude, âpre, squelettique. Autechre renoue avec un son plus sec qui caractérisait https://www.chroniquesautomatiques.com/2008+autechre-untilted.html, dernier chef d’oeuvre, et peut être meilleure plaque du groupe pour ma part.
Alors penser à LCC des les premières mesures d’Etchogon-S, ça me rend tout chose, vous imaginez bien. Rythme de folie, complètement mutant, distribuant taloches sur taloches, éreintant, froid, superbe, mortuaire. Une mélodie, évidente (pour une fois) et belle qui se glisse au milieu, fait des bulles sur cette cavalcade mécanique. En dessous, c’est une vraie boucherie, ça s’écharpe, une vraie baston d’enfoirés, ça concasse dur. Le titre, qui n’offre pas de réelle évolution (à l’inverse de ses potes sur Untilted) reste impressionnant, et surtout diablement jouissif pour ceux (j’en fais parti) qui quémandaient quelque chose de plus âpre et frontal de la part des anglais.
A dire vrai, Move Of Ten part dans tous les sens, arpentant pas mal de chemins déjà retournés par le groupe, en les magnifiant, réactualisant. Si la galette est clairement homogène et construite (ça reste de la musique étouffante et hypnotique, ça reste “du Autechre”), elle s’autorise beaucoup plus d’écarts qu’Oversteps. Et vire carrément sur des exercices plus concrets et directs… Le premier extrait, y7, avait étonné en proposant une electro acid torturée, clairement secouée, mais pas trop expérimentale, assez plaisante, même si l’on y revient pas forcément après quelques écoutes intensives.
Rew(1) par contre, se la joue grandiose, avec un rythme Hiphop qui déboule de nul part, presque pimp, avec une vraie bassline, et des handclaps carrement. Oh mon dieu, Autechre devient mainstream. Ca craque évidemment de partout, machines en mutation, le duo veulent te faire bouger la nuque avec de l’abstract bien laidback, mais ne peuvent s’empêcher de frotter ta gueule sur le ciment. Il y a aussi un modem 56ko qui fait une crise nerf au milieu du marasme, et qui rend le tout encore plus génial. On claque des doigts en se faisant rouler dessus par un 33tonnes. Bonheur.

Attendez, Autechre balance carrément de la techno pure sur M62 ? Yep. Rythme binaire bien sourd, c’est franchement dansant, et l’on est clairement étonné d’entendre un truc aussi dépouillé et easy-listening émanant du groupe le plus craqué de l’electronique. Pourtant c’est clairement lié au groupe, avec ces mélodies mourantes, synthés en fin de vie qui égrènent leur mal-être, superbes complaintes neurasthéniques. Et plus le morceau avance, plus l’on pense, à cause de cette mélodie cancéreuse en fil rouge, au Duntisbourne Abbots d’U-ziq (un essentiel) A dire vrai, avec une pulsation moins régulière, plus electronica, M62 aurait pu se glisser dans la galette de Paradinas sans trop de soucis. C’est dire la qualité de la prise de risque.

Mais le vrai tour de force de cet imprévu album est cristallisé par Nth Dafuseder.B (un vrai cauchemar ces titres), d’une beauté absolue, claque énorme. Saturations discrètes, bleep chelou, on n’est pas forcément transporté par l’intro. Mais l’usine se fait, petit à petit, recouvrir par une cathédrale de synthés, une chape angélique à filer la frousse, rapidement dérouillée par une marche militaire industrielle énorme. La cadence est morose, ça claudique irrégulièrement, et les synthés, eux, grandissent, s’animent. On a l’impression d’assister à un accident de voiture pendant la messe. La dimension sonore du morceau est énorme. Tu divagues, tu te laisses porter par les claviers, mais les beats te cassent la gueule. La mélodie, au départ guillerette, presque candide, devient à chialer à partir de la 3ème minute. La métamorphose est brève, quasi imperceptible, mais si on la chope, la colonne vertébrale ne survit pas. Autre détail qui m’étais passé par dessus sur les premières écoutes : le rythme concassé du départ change subitement, et devient plus régulier, violent, dur. D’une structure complètement explosée, on passe à des coups de surins métronomiques. Le rythme ne veut plus nous avaler, simplement nous écraser les pommettes. Gauche – droite – gauche – droite – gauche – droite –gauche – droite. Pam Pam Pam Pam Pam Pam Pam Pam. C’est ridicule, mais quand je me suis pris cette séquence dans les tympans la première fois, ça m’a laissé sur le carreau. Surtout que le tout est accompagné d’une mélodie à se damner. Le tout titillant de près un certain “D-sho Qub”, dans sa rythmique mais en balançant le tout au paradis. Superbe, vraiment. Je sens que ce morceau va affoler mon compteur itunes sur cette année.




Alors forcément, il y a deux trois tentatives un peu moins réussies, ou qui me touche moins personnellement. Le Hiphop indus (oui vraiment) de Pce Freeze 2.8i est sympa mais un peu redondant sur la longueur. No Border n’est pas super passionnant non plus, bien qu’hypnotique. Iris was a pupil se débrouille mieux, en reprenant des éléments d’Oversteps, pour les glisser dans un écrin electronica ambiant du plus belle effet, avec dix couches de mélodies volant en diagonale. Ylm0, lui aussi lié au précédant disque dans ses sonorités, passionnera de même un peu plus, avec ses clochettes sympathiques virevoltant de partout, et un morceau échouant sur un dernier quart vraiment beau, la litanie prenant un peu de hauteur.

Mais c’est clairement sur la fin de la galette que Autechre remet une claque, avec deux titres en or massifs, Cep PuiqMX, et ClnChr (ce dernier dans l’édition japonaise seulement)
Cep PuiqMX commence avec une grandiloquence peu commune chez les deux anglais, avec gros synthés façon space opéra et rythme hallucinant, qui se roule sur les trottoirs en éructant come un damné. C’est sale, ça pue la mort, ça se décompose de partout, tuerie. Et tu as toujours les nappes qui tonnent et s’envolent vers le ciel, alors que tout se nécrose dans tes tympans. Une ville aspirée dans un trou noir. Et en lieu et place d’une explosion règlementaire, Autechre va faire crever son morceau, en l’abandonnant dans sa geôle. On prend petit à petit de la distance, les synthés deviennent sifflements, on laisse le pauvre homme à son funeste destin, pendant que les murs lui tombent sur le coin de la gueule, la destruction devenant marasme jouissif et absolu, la track étant littéralement froissée dans nos oreilles.

Et bonne nouvelle, pour une fois, la bonus track japonaise n’est pas un vulgaire “pouet” bonus sorti d’un ableton en mode démo, ou une petite vignette ambiant filée à l’arrache. A dire vrai, je ne serai pas étonné si l’on me disait que ce ClnChr sortait tout droit des morceaux écartés d’Untilted (ouai !) encore une fois, car comme pour l’ouverture de Move Of Ten, c’est ultra rude, âpre, désertique. Ca tape dur, mais sans violence. On ne veut plus jouer avec tes viscères, simplement te casser le nez. Le rythme est parfait, presse hydraulique ayant oublié ses congés, et brutalisant l’acier inlassablement. Bref, du Autechre pur sucre, hypnotique, violent, nickel. Et là, le choc, une mélodie se fait entendre au milieu du bordel. Des violons, mourant, écrabouillés, qui surgissent des entrailles façon Tetsuo pour aller se foutre sur la tronche avec les exosquelettes. Ballet industriel, Hiphop pimp du prochain siècle, complainte depressivo-concrete, ça m’a arraché le cœur à la première écoute, et cela devrait se placer dans mes titres préfères du groupe très rapidement.
C’est tout simplement juste ce que je préfère chez Booth & Brown. Ce qui, pour moi, révèle la beauté d’une musique de ce genre. Le rythme est là, la mélodie aussi. Il est violent, elle est belle. Il ne faut pas chercher bien loin, ils sont là, sous nos yeux. Et pourtant, c’est d’une violence absolue, d’une complexité sourde, tout en circonvolutions, en soubresauts, en révolte continuelle. La collision des extrêmes, le chaos fleuretant avec la pureté, avec une progression, une ascension évidente. Dans ces cas là seulement, Autechre ne fait plus de l’idm, de la braindance, des mathematiques, de l’électro compliquée. Il n’y a plus de règle, plus de dénomination, plus de genre. Ils mettent simplement face à face deux entités qui ne pourraient normalement jamais cohabiter, mais qui copulent, ici, à la perfection.




Certes, ce Move Of Ten n’est en rien comparable à Oversteps, grand monolithe mélodique et abstrait, faisant fie des rythmiques pour se balader dans des nuages bouffés par la rouille. Là, ça part dans tous les sens. Et pourtant, cela correspond mieux à l’idée que je me fais d’un disque d’Autechre. Ce nouvel essai surprise n’est pas exempt de défauts. Mais en assenant quelques missives superbes, indiscutables, le groupe se refait une nouvelle jeunesse. Le passable côtoie le sublime : Les tentatives ennuyeuses se battent contre certains titres sont énormes. La galette est bancale, inégale.

Et pourtant, en lâchant quelques exercices de style très réussis (le Hiphop Rew(1), la Techno mélancolique de M62, et surtout en accouchant de morceaux ahurissants comme Etchogon-S, Cep PuiqMX mais surtout Nth DafuseberB et ClnChr, le groupe balance un disque qui me marque enfin de nouveau, comme je ne l’avais pas été depuis Untilted. C’est totalement subjectif, mais avec les 4 morceaux précités, Autechre reprend sa forme ultime.

Il ne reste plus que la mélodie, d’une pureté absolue, pulvérisée avec rage et laissée pour morte dans nos oreilles.





Autechre – ClnChr





Autechre – Nth DafuseberB




11 Titres – Warp Records – Beat Records
Dat’





GREMS – Broka Billy

Posted in Chroniques on July 7th, 2010 by Dat'


Ouai les animaux c’est de la saloperie



Dans la vague Hiphop indé français du début des années 2000, des mecs talentueux, il y en avait des tonnes. La verve souvent alambiquée, télescopage des genres, les instrues taillées à l’or fin, en s’acoquinant souvent avec l’électro dans toute ses formes. Nouvelle décade, certains ont disparu, d’autres végètent, pas mal sont parti en couilles, et quelques uns ont gardé leur ligne de conduite, égrenant le paysage hexagonal de quelques albums toujours aussi bien branlés. Grems fait parti de ceux là. Empileur de mots, poèmes saccagés, porn-prose de haute volée, le bonhomme est apparu (je crois) pour la première fois dans mes oreilles grâce au petit bijou Sonophrologie de son projet Hustla, avec Le Jouage. (justement, car j’aimais bien Le Jouage. Ce dernier découvert car aimant bien Delleck. Lui aussi découvert car j’aimais… bon ok on n’en fini plus) Bref, Grems s’est faufilé et m’a foutu une torgnole avec son Microbe, son Micropolis ou son Intro. Même histoire pour ses tracks sur Kamasoundtracks (Aka la réunion des mc absolus)

Suite à Hustla, le premier album solo de Grems écouté, Air Max, attendu comme un mort de faim à sa sortie, m’avait administré une claque absolument mémorable. Pour moi, ce Air Max reste l’une des toutes meilleures missives balancées dans le Rap Français, et de loin. Parfait mélange entre rap electro et hiphop plus classique, la galette contient certains des plus gros tours de force du HH hexagonal, avec en point d’orgue “Les Gothiques”, cristallisant tout ce qui se fait de mieux chez Grems : Instrue de folie, un flow au débit à rendre fou tout Mc amateur, un texte complètement craqué, empilement de mots salaces et de métaphores facétieuses encore plus bandantes qu’un mannequin en porte-jarretelles qui te lècherait l’oreille. Sinon, il y a “Tu parles pour tchi” qui reste pour moi le meilleur morceau rap / house, un “Pessimiste” qui te donne envie d’aimer ta sono, ou “Rakaille Numerik” qui te propose de kicker tout le monde dans les transports en communs en hurlant “j’vous nique tous”. Sinon je passe le titre éponyme “Air Max” dès que je peux sur Tokyo, et tout le monde s’entretue en ayant orgasmes à répétition, même si personne ne pige les paroles. Preuve que les instrues ne sont pas là pour la déco.


L’album suivant, Sea Sex & Grems, même s’il reste méchant, n’avait pas la force de Air Max. Faute à une tracklist un peu bordélique, alignant plus de trentes morceaux, jamais mauvais, mais pas toujours absolus. Avalanche de feat, de styles, de genres, c’était bien, mais un peu le bordel aussi, l’album ayant un incontestable ventre mou, même si l’on trouvait quelques trésors dans le lot (Cr18 en tête, et une fin d’album absolument épique). En plus, il était chaud à trouver, ce con de disque. Bref, jun successeur etait durement attendu, en espérant, secrètement, un digne successeur de Air Max.

Broka Billy, le petit nouveau, s’est fait désiré. Annoncé, repoussé, disparu, teasé par un clip/morceau de folie (Dimanche, parfait) puis englué dans le flou entourant chaque release de Grems depuis quelques temps (impossible de trouver une vraie date de sortie, lieux de ventes ultra sélectifs voir inexistants, marketing réduit à néant si l’on excepte quelques clips bien sentis…) Bref, ce n’est pas Grems qui s’impose, c’est bien toi qui doit venir le cherche, le débusquer, et s’occuper en plus des démarches administratives. Mais Grems a mis les petits plats dans les grands pour ce Broka Billy, et nous sort carrément un livre dans disque. Ou un disque dans le livre.





Car il ne faut pas s’y tromper, la première chose qui frappe sur cette nouvelle galette, c’est le livre(t) de grande classe accompagnant l’album : couverture rigide, papier bien épais, le tout se construit autour des morceaux du disque, en présentant les lyrics intégralement, et en illustrant à chaque fois la track à coup de photos, graff, dessins ou anecdotes. Details qui a son importance, chaque morceau est affilié à sa ville. La vie du mc semble donc se partager entre Londres, New York, Paris et Montpellier. Bref, le parfait manuel du Grems illustré, le bonhomme officiant autant dans la musique que dans le design et la street culture. (et plus présent que l’on ne le pense, Grems ayant signé la psychédélique campagne pub de la RATP l’année dernière par ex, ou des unes de journaux)

J’attends toujours Grems sur deux choses. Les textes d’une part, épileptiques, rafale de mots formant toujours un ensemble ultra cohérent. Là où la plupart des Mc écrivent de gauche à droite, Grems n’hésite pas à échafauder ses couplets dans toutes les directions, allers-retours et diagonales. Mots à mots, cela semble partir dans tous les sens, mais le tout impressione toujours par sa coherence. L’autre point évident, c’est la couleurs des instrues. D’un relatif classicisme electro-abstract, Grems a petit à petit glissé vers sa “House de racaille”, son Deepkho, pour former une tambouille arrivée à maturité sur le dernier Rouge à Levres.



Bon, autant y aller franco, l’ouverture du disque, La Barbe, m’a déboité la gueule. Troubl nous à concocté une instrue folle, bijou techno cristallin, beat binaire bien sourd, avec synthés qui t’arrachent la colonne vertébrale en crevant dans les échos. Au final, on est pas loin de groupes comme… Echospace justement, qui taillent la musique en 3d. Grems pose tranquille, mais c’est une intro alors la track s’efface bien rapidement. Dommage, tant le tout est superbe. Vraiment. Première minute, on tient déjà la meilleure instrue du disque, voir la meilleure compo sur laquelle Grems a pu poser. Carrément.
Bisou arrive, et déboule comme étant typiquement le morceau qui va énerver les premières secondes, puis devenir indispensable au final. C’est confirmé, sur son Broka Billy, Grems craque. Il explose les frontières. Meme pas en fait, il s’en branle total, il part dans un trip halluciné, qui va courir sur tout le disque, et qui n’a, à ma connaissance, pas d’équivalent dans l’hexagone. Alors ouai, le Bisou, c’est un délire cramé, à l’intro interminable et jouissive, gros tunnel electro crade produite par un mystérieux Opolopo, suédois de son état. En gros, pendant 5 minutes, c’est des claviers ultra crades qui tressautent dans tous les sens, des beats cassés qui te roulent dessus, pour une cavalcade techno hallucinée. Grems lache deux couplets de grand malade au milieu du marasme, et un refrain impossible à articuler pour un mec normal. Bon courage pour balancer ce morceau en live. Bref, c’est complètement mortel, je ne trouve pas de comparaison à donner là. Et attendez, c’est pas le petit trip perdu dans un album écrasé par une fausse normalité. Nan. Toute la galette est comme ça. Perchée. Off Limit.

Un peu plus loin, Carlos sort le grand jeu. Broken-beat de drogué, les beats claquent comme des coups de fouet sur une croupe, les synthés se tordent, crissent, mutent. Warpzone. Sur cette instrue de l’impossible, Grems dépeint la vie de Carlos, faisant du flouze en vendant du cul. Et c’est là que la plume de notre mc est la meilleure. Quand ça parle cul. Mais pas de cochonneries bas du front hein. C’est de la plume nymphomane, du prix Goncourt en rut. “J’ai trouvé du taff, designer des pop up / Dessiner des mannequins, leur donner des peaux neuves / Google, sexe, allo pass et call girl / Chiennes, gays, lesbiennes, vielles et beaux reup’ / Numero de carte, t’es baisé, gros fuck / Ma compagnie, tu pourras dire que c’est des voleurs / Le biff, le biff, le biff, on en connaît pas l’odeur / Je fais des gifs animés, des bites et des grosses teubes”. Ah, et quand tu crois que le morceau est fini, le tout part dans un trip génial. La track s’énerve, grosse ascension jouissive, ça vire dans le noisy, on vient de se faire arracher la tête. Gros alien, petit chef d’œuvre.
Moins secoué, mais tout aussi plaisant, Miki part dans un trip House-dance putassier parfait pour claquer des doigts en buvant un coca, pas si loin des exercices de Rouge à Levres. Les deux derniers tiers du morceau laissent l’instrue seule pour attaquer tes hanches, ça s’immisce inévitablement dans les synapses.

My Name is Micheal refait venir Son Of Kick (qui a composé Carlos) pour un autre titre electro en apnée, complètement craqué, noyant encore les paroles de Grems sous 5 minutes de Techno géniale. On perd la notion du temps, ça n’arrete pas de changer de rythme, d’ambiance, ça saccade, ça part en vrille, ça retombe sur ses pieds, c’est riche comme la mort, ça fourmille de détails, fresque folle qui part en techno lunaire sur la fin. Quand le morceau se dérobe, on a pas compris ce que l’on vient de se prendre en pleine trogne, mais on a bien compris que c’est grand.



Mais le vrai tour de force de ce disque, c’est Rencontre Avec Un Ballon. Ca tombe bien, la track a sa vidéo. Il est pas con le Grems, il sait qu’il tient un diamant. Une tuerie absolue. Sincèrement. C’est d’abord des lyrics de folie, parfaite cristallisation du flow à la Grems, de son rap cradingue, de ces mots mis bout à bout, de ses phrases affolées qui volent dans tous les sens. Cela se construit petit à petit dans tes tympans, la phrase actuelle t’explique celle qui vient de passer, c’est du lego textuel, de la dissertation sexuelle, des phases de vandale. Le tout déclamé à vitesse maximum, sans jamais bouffer un mot. L’histoire, c’est Grems qui rencontre une nana dans la rue, et ils baisent. C’est tout. Mais c’est bien. “Il est 15h37, métro Blanche, direction Clichy Mairie / Rdv pour une performance / Une jolie fille qui veut me faire offrande / De ses orifices. Alors on fait comment, on se mobilise ? / On s’immobilise oui ! Pourquoi on se plait autant ? / Jolie cuisse étonnante. Ma folie me guide je suis un cerf-volant / J’suis chaud, si si. Meme pas besoin de payer le restaurant / Je suis juste un gros zizi et assez éloquant”“Bon, elle a enlevé le haut direct / Je peux plus faire le beaux, je lui gère le dos, je dissèque / Elle kiffe et me dit : t’as de beaux biceps / Ouais, j’ai grossi, et toi aussi t’as de jolies fesses / Nuisette, v’la le morceau, la bête de meuf / Le gigot d’agneau, la pièce de bœuf / La cuisson commence, la cyprine coule à flots / Sève de teush, je la bouffe, cadeau, je la baise deux heures / Qu’est-ce-qu’elle aime le Grems”. Sinon, les refrains déclamés par deux demoiselles, Frida Carlos & Dame de Cœur, sont les inserts vocales les plus affriolantes de l’année. Des friandises pour la bouche.
L’instrue, c’est une aberration, la déraison, le pêtage de plomb. Klimaax accompagne le flow de notre parisien avec une électro crade et rampante. Ca claque, c’est sombre, rue la nuit, usine, métro. Grems vient de jouir, il prend le biff et se dérobe. Mais la musique ne veut pas s’éteindre, et c’est la progression, la montée du disque ultime. Cet hiphop cradingue se transforme petit à petit en explosion techno-noise bien violente, c’est absolument jouissif. Coup de pelle dans les mâchoires, les beats pilonnent, les claviers hurlent, les “chatte / pute” frisent l’épilepsie. Violence, pugilat, passage à tabac. Unique. En plus d’être ultra addictif. Ah, et le handclap à 1min54 est le meilleur handclap de 2010. J’ai trouvé le nouveau morceau pour ruiner mon entourage.

Mais que l’on rassure tout de suite nos tympans, ce Broka Billy ne tourne pas que sur des instrues fracassées et expérimentales. Car Grems, comme le titre le soutient, amène sur cette galette son Broka, rejeton Deepkho un peu plus cabossé, aux fortes teintes broken beat et Uk Garage. Du cool Le Broka à l’excellent Tuer Le Chat et son chorus miauleur, ces titres permettent de reposer un peu l’ambiance, et de quitter les sommets escarpés des délires précités. On a même de vrais petits bijoux, comme sur Snake Bite, Uk garage mutant en techno planante, ou le superbe Place de la Com, tout en retenue, en apesanteur, noyé dans les nappes ambiant et un rythme que n’aurait pas renié bonhommes du 2step/dubstep en vogue actuellement. D’ailleurs, en entendant certains de ces morceaux, je ne rêve qu’à une chose, que Grems fasse appel à FaltyDL pour une ou deux productions, tant l’univers de l’américain pourrait s’harmoniser avec son flow. La même pour le très beau Ne Pleure Pas, Grems accouchant d’un texte plus grave, personnel et indissociable de la lettre écrite dans le livret.
Autre suprise, le Broka Billy feat Foreign Beggars, entêtant et plutôt réussi, se retrouve magnifiée en fin d’album par Machidrum (sur l’un des trois titres remix bonus), pour un Broka Billy Rmx hallucinant, avec des synthés simili-chiptune-electro-bleep qui filent la chair de poule. Tu voles, ciel rose, nightclub, minijupes et lasers qui dilatent la rétine. C’est beau, ça tabasse. Instrue parfaite. Amsterdam pourra refroidir vu son instrue un peu trop pépère, mais on se rattrape encore avec des tirades de folie.

Les deux seuls défauts du disque, mineurs, sont les suivants :

– Gros regret de ne pas voir la version originale de Dimanche sur ce disque. Ici, Dimanche Rmx étonne avec son déluge de rythmes façons breakbeat-tek-latine, mais la version originale sortie l’année dernière était tellement classe, évidente dans son osmose Mc / instrue que l’on ne peut que chialer de ne pas pouvoir se refoutre le morceau dans les tympans.
– Il n’y a pas Iris en feat quelque part.
Voila.




Car il ne faut pas se leurrer, Grems fait carton plein avec ce Broka Billy. Certes, comme d’hab avec le bonhomme il y a deux trois titres un peu moins excitants (Photosoap, Place de la Com Rmx et J’essaye, pour ma part) mais le reste du disque est tellement énorme, tellement dingue. Une vraie claque. Sea Sex & Grems souffrait, malgré un tracklisting de gros bourrin, d’une structure un peu trop cadrée, rentrant un peu plus dans le rang que le Air Max ou les Rouges à Levres.
Sur cette nouvelle galette, Grems se lache. Il ne veut même plus se démarquer, vu qu’il est désormais tout seul sur le terrain de jeu. Hors comparaison. Je ne dis pas qu’il révolutionne la musique, qu’il est en avance sur tout le monde ou autre tournures à la con. Non, il vient juste de créer un truc chelou, malade. Il n’est pas en avance, il n’est pas au dessus, il n’est pas dans le “game”. Il est juste “ailleurs”. Autre part. Tres loin. Là où personne n’est allé foutre les pieds, et la où personne n’est assez dingue pour aller le rejoindre.

Grems, en plus de ses délires textuels habituelles, injecte une petite dose de sérieux dans son disque. Ce n’est pas explicite, mais on le sent, comme un fil rouge, tout au long du disque. La perte de sa fille, une rupture, l’éloignement, sa vie à l’étranger, la fatigue de se mettre à l’envers. Le chat est égratigné, il clopine, mais il a toujours les griffes dehors. Car il est fier. Et qu’il veut encore chasser de la coquine souris.
On sent aussi que le bonhomme ne fait pas ses Cd pour vivre. Ses deniers, il doit surement les gratter avec son activité dans le design. Alors il s’en bat les couilles le Grems, il peut tout se permettre, tout tenter, cramer les tympans. Son amour pour Detroit et le Hiphop cabossé s’illumine. Et cette liberté donne des titres incroyables, des bombes absolus, des trucs qui m’ont percé le cortex ou cajolés la nuque. La Barbe (cette prod !), Place de la Com, Rencontre avec un Ballon, Carlos, Ne Pleure Pas, Broka Billy Rmx, Bisou, My Name is Micheal, Tuer le Chat… La liste est longue, mais les morceaux sont tous des tueries indiscutables, qu’elles naviguent dans l’electro-techno-experimentale ou le Uk Garage broken-beat.
Bref, Broka Billy est un album monstrueux, hors norme, grosse claque.

Et vu la distribution anémique du disque, ça va surement rester secret, mais Grems vient de fracturer le Hiphop français.





Grems – Rencontre avec un Ballon





La Barbe By Grems Prod Troubl. from grems miki on Vimeo.

Grems – La Barbe teaser





Grems – Dimanche




Dispo chez Edition Populaire
17 Titres + 3 Remixes – Edition Populaire
Dat’





Reso – Temjin

Posted in Chroniques on June 30th, 2010 by Dat'


C’est la punition



Reso fait parti des petits poucets ayant balancé pas mal d’EP depuis 3 ans, sans jamais avoir eu de réelle résonnance. Cet Anglais aurait pu rester dans l’ombre, à l’instar des tonnes de producteur Electro from UK, toujours aussi productifs depuis l’avènement du Dubstep et dérivé. Personnellement, je n’avais jamais entendu parlé de ce type, et son nouvel Ep aurait du rester (à tort) dans le ras de marée de vinyles déboulant chaque mois avec un tampon Fish & Chips apposé sur le dos. Mais voilà, l’artwork de ce Temjin Ep viole la rétine tant il est classe. Sorte de croisement entre une sortie Raster-Norton et une digression cyberpunk, cette araignée métallique connecte mes neurones à des souvenirs aux relents d’Amon Tobin, Fluke et Gunnm.
Mais Reso, ce n’est pas la nostalgie, c’est la punition. C’est les grosses basses, le pilon, la Wobble qui tressaute, les tympans qui abdiquent. Mais le plus drôle, c’est qu’au milieu, c’est beau.





Je parlais d’Amon Tobin dans l’introduction. Et bien à l’entame d’Otacon, on ne peut que penser au maitre brésilien, tant la première minute semble tout droit sortie d’un “Out From Nowhere” : Superbes nappes cristallines mi-cyberpunk mi-angelique, rythme électro cadencé aux apparats latins (mais dans un broyeur) et profondeur sonore impressionnante. Ca monte dur, on sent que cela va exploser genre breakbeat Tobinesque. Que neni, c’est un tsunami dubstep qui détruit tout, la ligne de basse est complètement folle, hystérique, ça explose dans tous les coins, les immeubles tombent, les gens hurlent, et au milieu du chaos, les androïdes de 10 mètres tabassent tout ce qui bouge. On a l’impression de se retrouver dans une ville assiégée, derniers survivants courant sous les lasers, évitant les blocs de bétons se désintégrant autour de nous. Moment d’accalmie, on pense avoir trouvé une bonne couverture, les machines cherchent de l’humain à étriper, mais l’on retrouve notre souffle derrière un mur dérouillé. Les Wobble se calment, les nappes reviennent, voix d’anges, le syndrome Amon Tobin revient, le calme est là, on commence presque penser espoir, mais notre couverture se fait désintégrer, la course reprend, nos oreilles se font se font rétamer, c’est absolument monstrueux. Ecouter ce morceau sur un système sonore peu avare en basse, c’est se prendre une réelle mandale.

Armored Core joue sur les mêmes ressorts, mais en délaissant les aspects éthérés et planants zébrant le titre d’ouverture. Ici, Reso nous rentre encore plus dans le lard, en précédant son explosion Dubstep hystérique par un “Power extreeeeeme !!!!” du plus bel effet, pour nous passer à tabac pendant 5 min 30. Les basses hurlent, ça s’entretue dans les enceintes, hallu totale. La grosse violence, on a l’impression que Reso te tire par les cheveux et te racle la tête contre mur en te criant dessus. Il y a du sang partout, cela semble lui faire plaisir, mais pas de problème, toi aussi tu prends ton pied. Je veux entendre ce morceau dans une soirée, ou en live. Ca doit être un vrai massacre, tu peux tuer des clubbeurs avec une torpille pareille.

Mais heuresement pour nos petits viscères, Reso n’est pas qu’un adepte chevronné du fusil à pompe, et sait aussi poser joliment l’ambiance, délaissant le Dubstep jouissif et rentre dedans pour quelques mélopées plus évasives et psychotropées. Hemisphere se la jouera jolie electronica dub-ée, avec une belle ligne mélodique à la guitare, des échos en mille-feuilles et un beat plus lancinant. Quelques samples de voix, mais du très discret, on n’est moins dans la (superbe) putasserie de ses potes Clubroot ou Ital Tek. Le morceau dodelinera en imprimant une progression discrète mais marquante, avec cette base grondante, son rythme plus appuyé et cette petite mélodie à crever qui finira de nous envoyer dans les étoiles, pour mourir sur une longue saturation, presque shoegaze, avec ce larsen cradingue tentant de noyer la petite gratte acoustique. Ca fourmille de détails, c’est vraiment travaillé avec minutie, du tout bon.



Ce glissement opéré par le titre du dessus n’est pas anodin. On n’attendait de Reso encore quelques missives enflammées, voilà que le bonhomme se dirige vers une toute autre facette avec Hyperglide. Le dubstep de bourrin est mis de coté, place au Nu-Abstract. Les synthés sont beaucoup plus présents, ils s’enroulent dans tous les sens, le beat est sec, handclap de grande classe. Pas si loin d’un Take ou d’un Dorian Concept, le tout parle directement à la nuque, surtout quand le titre prend le temps de se poser. Car attention, Reso reste un minimum terroriste, et secoue sa fresque de grosses zébrures bien rondes. Vous rêviez d’entendre Nosaj Thing remixé par Joker, c’est ici servi sur plateau d’argent. Le titre oscillera donc entre moments bien laidback, et roller-coaster electro, superbement mené, de bout en bout. Le plus court Channel Pressure lorgnera lui aussi avec prestance sur l’abstract, en plus classique plan-plan, évitant le dépeçage à la Wobble des autres tracks.

Dernier essai sur Temjin Ep (version digitale), Mind Games va encore surprendre par sa direction, partant rapidement dans un trip Drum’n bass de haute volée. Attention, pas de truc linéaire, le tout est encore une fois pétri comme jamais, avec une grosse ligne de basse caverneuse, un rythme parfait, en retrait, pas bourrin, mais parfaitement cadencé, hésitant constamment entre l’explosion et retenue timide, à la Interlope. Le morceau s’enrichira graduellement de sons cristallins, cavernes de glace, avant une conclusion breakbeat de folie, explosant de partout. Reso porte l’estocade finale, nous écrase le cervelet avant de nous laisser sur une jolie divagation aérienne.




Avec cet Ep, Reso fait carton plein. Le son est d’une puissance absolue, les basses sont littéralement écartelées dans nos tympans, on a l’impression, sur les premiers titres, à avoir affaire à un boucher du Dubstep. Le disque renverse, nous fout une claque, nous rassasie en terme de Dubstep frontal et sans concession. Mais Reso a l’intelligence de ne pas s’embourber dans sa propre recette, et propose sur Temjin un Ep intelligent, évolutif et mutant, dans ses sons comme dans sa tracklist. Apres une ouverture Amon Tobin vs Dubstep, Reso balance une vraie correction, puis filer vers une electronica-dub providentielle après de tels coup de butoirs. Le monsieur va ensuite proposer du Nu-abstract des grands soirs, pour finir sur un titre drum’n bass bien sombre. Le tout dans des morceaux à tiroirs, l’anglais aimant stopper la progression de ses morceaux, les entrecoupant de pauses atmosphériques avant de tout faire repartir avec violence. (Otacon est “mind-blowing” au casque, la même pour Armored Core et Hyperglide, fresques muti-couches phénomenales, ça chiale sous les explosions, nickel)

On en devient curieux de voir comment Reso pourrait agencer un espéré premier album, tant les facettes de ce Temjin sont multiples, et superbement maitrisées. A dire vrai, c’est grosse surprise pour ma pomme. Je ne connaissais pas le bonhomme, je me suis pris les deux premiers titres dans les dents, avant d’être charmé par la parfaite suite de l’Ep. Chez Reso, ça hurle, ça crisse, ça tire de partout, fusil à pompe dans le torax. Mais aussi ciselé à la perfection, beau, épique d’une façon presque déraisonnable. En espérant qu’une galette complète sera prévue avant la fin de l’année. Jouissif, il faut se le prendre en pleine poire au moins une fois sans broncher. Petit coup de cœur.





Reso – Otacon




6 Titres – Civil Music
Dat’





Deepchord presents Echospace – Liumin

Posted in Chroniques on June 22nd, 2010 by Dat'


Sunset on planet T.



J’avais vraiment été touché par le Incense & Black Light de Rod Modell il y a deux ans. Superbe gouffre urbain, sorte d’ambiant techno dub éthéré au maximum, ce disque représentait la parfaite balade de nuit dans une mégalopole grouillante, défoncé apres 48 heures d’insomnie. Entre les nappes de synthés et murs de bruits blancs se télescopaient conversions d’anonymes, rythmes de nightclub étouffés, pluie incessante, bruit de pas. Perte de conscience graduelle en mode Audio, ou simulateur de promenade nocturne, ravagé par la dope, au milieu d’un Tokyo cramant sous les néons, ce disque aurait pu être la bande son de la dernière demi-heure d’Enter The Void.


Rod Modell, c’etait aussi une facette moins urbaine et abstraite du sublime premier disque de son groupe Echospace, The Coldest Season, qui tirait lui aussi drôlement sur l’ambiant/dub/techno et le field recording, mais avec une direction beaucoup plus apaisée. La où le Incense & Black Light se retrouve être un disque calme mais claustrophobe, voir presque menaçant avec cet acouphène perlant tout le long de la galette, le premier Echospace dépliait ses nappes sur de longues steppes rassurantes et hypnotiques. Se balader sans but sur une étendue enneigée, la mélancolie plaquée dans la caboche, avec le soleil couchant en background. Autant dire qu’avec une galette aussi bien troussée (On peut chialer sur Sunset sans problème), ce nouveau Echospace, Linium, était plus qu’attendu.
Et bien Rod Modell et son acolyte Stephen Hitchell semblent avoir été marqués par leurs balades dans Shibuya, et axent entièrement leur nouvelle plaque sur la mégalopole Japonaise. Fini les montagnes vierges et immaculées, bienvenue dans le Dogen-zaka, à 4 heures du mat’, complètement perdu et agressé par les lumières des love-hotel et la musique des échoppes. Le tout avec les oreilles encore cramées du club arpenté en amont.





La pochette, superbe, (agrémentée de quelques belles photos dans le livret) ne laissera aucun doute sur la direction prise par cet album. A l’opposé du paysage hivernal du premier disque, on se retrouve ici à flotter au dessus de Tokyo, et ses couleurs droguées. A l’instar du dernier Rod Modell, Liumin fait donc honneur à la ville, en intégrant carrément un deuxième disque bonus, ambiant, composé à 80% de field recordings pris dans les rues et métro. On y reviendra, mais ce dernier n’est clairement pas qu’un petit cadeau inclus à l’arrache. A dire vrai, ce disque se vit comme une nuit, complète, à déambuler au sein de la ville, et démarre très intelligemment, en faisant le lien direct avec les deux sorties exposées en introduction.


In Echospace démarre par ses sonorités familières, avec ses synthés ambiant ultra posés, un peu rugueux, et ses murs de bruits blancs semblables à de la pluie. L’ambiance est là, quiconque ayant mis un pied à Tokyo se situera géographiquement grâce aux sons enregistrés et égrainés tout au long de cette intro. Des conversations s’échappent, la voix caractéristiques du métro japonais nous précise que l’on passe par Harajuku. Le son s’intensifie, une pulsation se fait entendre, on est déjà perdu, molesté par un slow-motion drogué, tu es dans le wagon, la tête dodelinant, à attendre que ta station arrive, pour débouler au milieu de la cohue.
Shibuya, on y est, les jingles de la JR perlent à nouveau au milieu de l’écrin ambiant, Summer Haze vient de commencer mais l’on ne s’en rend pas compte. Un rythme techno, clair, parfait, déboule, secoue les lignes métalliques. La mélodie file la frousse, on se laisse aller, jusqu’à se rendre compte que cette montée n’est que le bruit d’un métro qui passe. Rod Modell nous offre un traitement du son incroyable. Le morceau file sur une techno plus directe mais toujours aussi impalpable, avec une profondeur de folie, hypnotique comme jamais. Il faut l’entendre pour le croire. Plus que le rythme, clairement binaire, c’est sur les détails qu’il faut se rattacher. Ces saillies cristallines intervenant au milieu du disque, ces échos dub discrets, ces saturations légères. Il est clair qu’écouté avec une oreille distraite, le morceau semble bien chiant et linéaire. Mais avec un casque, et une envie de se perdre, le tout prend une dimension assez énorme.




Et si le disque ne « s’arrête » jamais réellement, il y a toujours entre les morceaux un pont, un lien, tenu par des sons enregistrés dans Tokyo, qui re-situent la balade entre deux morceaux, qui construisent un fil tenu tout le long du disque. Les lumières, les mélodies incessantes des rues nippones sont constamment présentes, transformées en track Techno lumineuses, et positionnées dans une géographie, un lieu réel, le disque pouvant alors presque passer pour une carte sonore fantasmée d’un quartier de la ville. On se balade de clubs en clubs, liés par une station de métro ou une escale dans une rue à échoppes. De l’aquatique Sub-marine (ça ne s’invente pas), au plus appuyé Maglev et sa longue conclusion, noyade progressive vers les tintements caractéristiques des portiques Metro de la ville, le disque file et s’écoule, sans réellement suprendre. Il enveloppe, emporte, hypnotise. Il ne faut pas s’attendre à une soudaine avalanche de breakbeat, ou à un synthé qui s’emporte. Tout est distillé avec une précision extrême, étiré sur huit à dix minutes, laissant la techno se déplier lentement sur elle même, avant de fondre sur du field recording.

Reste qu’un titre accroche l’oreille par son (petit) décalage avec le reste des fresques proposées : BCN Dub est grand, renoue avec le coté un peu dub du premier Echospace, et propose sur 12 minutes un vrai tableau un peu plus enjoué et moins urbain que les autres prods, tout en étant plus crade et éraillé. La balade au sein de la mégalopole est cette fois parasité par des réminiscences dub, avec une mélodie un peu plus guillerette, et des trompettes qui se font, petit à petit, présentes. La mélodie, avalée par le roulement techno, rigole, se tortille, pointe le bout de son nez, et nous fait chavirer, avant de filer vers du bruit blanc. Si le soleil est toujours coincé entre deux buildings bien crados, il tente clairement de percer sur cet unique morceau.
L’ultra cristallin Burnt Sage se chargera de faire jouer les contrastes, avec sa très belle plongée vers les abysses, ou un énergique Float bourré de détails et d’échos, impressionnant au casque aussi, et peut être un peu plus dub que ces frères techno du dessus. Le tout filant vers Warm, une conclusion d’album aussi belle et impressionnante que l’intro, mêlant de nouveaux nappes planantes, conversations éparses, bordel de rue (dont ces fameux camions publicitaires arpentant inlassablement les artères tokyoïtes) et trains en tout genre. L’absence de rythme après plus d’une heure de cavalcade incessante est presque gênante, la solitude latente durant toute la galette se retrouvant balancée au premier plan.




Et ceux qui trouvent justement que le groupe excelle particulièrement sur ces plages ambiant, seront heureux d’apprendre qu’un deuxième disque accompagne le Lp, présentant le boulot de Rod Modell. Autant le dire tout de suite, le bonhomme est un fou niveau field recording. Loin d’être un érudit sur le sujet, je m’amuse depuis quelques temps avec du matos pas dégueux, moi même fasciné par la constante musique émanant de Tokyo, et m’escrimant à copier/coller les prises de sons les unes avec les autres. Ben après avoir écouté cette galette, je peux contempler mes petits fichiers et les foutre à la poubelle en chialant, tant les prises de sons sont ici parfaites. Spatialisation nickel, sons isolés à la perfection, aucune interférence ni parasite, on nage dans le cristal de bout en bout. Et que l’on se rassure, on est à mille lieux d’un field recording champêtre comme on en trouve des tonnes (enregistrer le bruit d’un pissenlit volant au grès des alizées c’est marrant, mais juste deux secondes).

Ici, c’est les métros qui grincent, les ineffables corbeaux tokyoïtes qui croassent, les magasins qui s’animent, Shibuya danse, les gens se découvrent, parlent, échangent, s’enfuient, et se perdent dans nos tympans. Evidemment, le tout est lié, sublimé par le travail ambiant, à base de nappes énigmatiques, tintements légers et mélodies éparses, portant parfaitement les enregistrements. Tout en ayant un travail sonore sur ces derniers, taillés par les échos, les filtres et tout le bordel de Modell (seul à la barre ici, semble t’il). C’est franchement bossé à l’extrême, et si un disque ambiant ne s’écoute que dans de rares occasions vu le coté neurasthénique du tout, les amateurs du genre ne pourront qu’être enchanté par la performance.

Le tout contenant évidemment ses petits moments de grâce, lors de la Track 6 par exemple, et sa mélodie plus présente, ou la Track 8, plus rêche au niveau des nappes, jouant sur le bruit blanc, qu’il soit enregistré dans la rue ou créé par les machines, avec une conclusion qui prend aux trippes. Sans oublier la Track 12, plus soutenue niveau electro, et à rapprocher de l’intro/conclu du premier disque.

La galette, très apaisée au départ, file petit à petit vers quelque chose de plus noisy et sombre, le field recording se focalisant de plus en plus sur les grincements et râles des transports. Tout ceux qui ont un lien ténu avec Tokyo seront aspirés dangereusement par ce disque. Les réfractaires de l’ambiant ne seront pas convaincu par l’exercice par contre, même si les sources plus urbaines du tout pourront capter un peu plus l’attention que les sempiternelles piaillement de moineaux.




A dire vrai, ce Liumin/liumin Reduced semble présenter un fil conducteur fort, une continuité inconsciente peut être : Premier disque, on part sur une virée dans Tokyo, en enchaînant les clubs, Techno à fond les ballons, défonce en slow-motion, passant la nuit à voguer de rythmes en rythmes, se perdre dans les stroboscopes, purée de pois émanant des clopes dans les yeux, kirin dans le pif. Les entrées et sorties des morceaux sont fabuleuses, on à l’impression de quitter chaque endroit en temps réel, avec les basses sourdes étouffées graduellement, à chaque pas fait en direction de la rue, les sons de ces dernières se révélant eux aussi au fur et à mesure. La nuit se prolonge, les actions sont abstraites, les souvenirs s’étiolent, l’alcool nous ronge, on perd pied, se laisse dériver, pour se retrouver dans sur le trottoir, l’aube déjà trop présente.
Deuxième disque, Shibuya est vide, cramé, corbeaux et passants pataugeant dans leurs vomis pour seuls compagnons. Le taxi est trop cher, le métro pas encore en marche, alors on divague, on se laisse porter par la rue, par le Tokyo qui veille encore, les oreilles encore égratignées par la sono des clubs. Conversations de couples se dirigeant vers love-hotels, minijupes égarées, konbini déchargeant les livraisons, bade de potes hilares, on est bien, on flotte encore, la glotte baignant toujours dans la bière. La station en vue, il est temps de rentrer, mais le hangover fait surface, les sons agressent, le métro tangue, le cerveau se rebelle. On patine, on se sent mal, ça hurle et crisse dans les tunnels, perte de conscience, on se retrouve chez soi sans trop piger comment, end of story.

Le disque manque d’une once d’émotion, donnée bien plus palpable sur le premier Echospace et le dernier Rod Modell. Mais le coté beaucoup plus techno, urbain, hypnotique du disque contrebalance parfaitement le tout. Difficile à caser dans une écoute quotidienne, mais si l’on trouve le bon moment, on ne peut qu’être étouffé par ce double album superbement exécuté.


En arpentant Linium tout en se baladant la nuit, on frôle la simili-mise en abyme, à écouter un disque qui écoute ta vie, celle des gens, celle des autres, la ville, son tout L’exterieur puis l’intérieur d’un club. La nuit, les buildings, les artères qui brillent et tanguent. Errements, balade, perte de repères.

Ce disque, c’est le nocturne monstre-foule, capturé pour nos tympans.





Deepchord presents Echospace – Summer Haze




Deepchord presents Echospace – Sunset (du premier album, il le vaut bien)




9 Titres + 12 Titres – Modern Love

Dat’





LCD Soundsystem – This Is Happening

Posted in Chroniques on June 6th, 2010 by Dat'



But that’s not what we do



Bon forcément, tout le monde en parle, cette nouvelle sortie de LCD Soundsystem retourne la planète. Personnellement, j’ai fais une affreuse erreur en 2008, en ommettant de claquer le Sound Of Silver de LCD dans mon top de l’année 08, catégorie disques oubliés dans la précédente. J’ai un rapport un peu bizarre avec le groupe, en y allant à reculons. A dire, vrai, j’avais acheté le tout premier disque du groupe à sa sortie, vu le battage dans les medias spécialisés, notamment à cause du très “tnt” single Daft Punk is playing at my house. J’attendais une révolution, je n’avais eu au final dans les oreilles qu’un disque bien cool, mais pas renversant. Je n’etais peut être pas près, ou j’avais les oreilles malades, allez savoir.

Bref, quand le deuxième disque est sorti, avec cette fois une couverture bien plus large que le premier, brulant tout sur son passage, j’avais pris mes distances, et laissé le disque sur les rayons, en me disant que j’étais super cool de ne pas écouté le truc sensé être le truc le plus cool du monde. Mine de rien, laisser reposer un disque Hype, pour le prendre quand le tsunami retombe un peu, c’est parfois bénéfique. Alors j’ai un peu attendu, puis j’ai pris le disque, et je n’ai pas été aussi ébouriffé que ça. Aucune raison précise, je ne devais pas être dans l’humeur une fois de plus. Sympathique, quelques morceaux bien foutus, rien de plus. On écoute puis on laisse de coté.

Puis 2008 déboule, un jour, d’un geste désintéressé, je lance le disque, et me prend une baffe gigantesque. Ma colonne vertébrale vrille soudain à l’écoute de ces rythmes espiègles, de ses synthés imparable, et ce chant scandé hésitant mais parfait. D’autant plus que je chavire sur la conclusion du cd, pour ne plus le décoller des oreilles. Au final, ce Sound Of Silver a été long au décollage, mais pour se retrouver dans mes disques favoris, vraiment. Autant dire que j’attendais dur ce nouvel album, This Is Happening, annoncé depuis un bail, et que je n’ai pas laissé mariné cette fois, sautant dessus comme un mort de faim à sa sortie.







Premiere remarque, le packaging est tout pourri. Vraiment. Alors certes, ça fait super indie, mais bon, j’imagine que Murphy aurait pu injecter un peu plus de monnaie dans le tout : Simple dépliant cartonné, avec livret, et surtout Cd qui se balade de partout, car sans support. On peste, vu qu’à partir du moment ou l’on a enlevé le film plastique, le packaging ne sert plus à rien, vu que le disque se barre des que l’on fait un mouvement. Intéressant. Le livret est mochard aussi, mais au moins il y a les lyrics, dont c’est déjà moins grave. A noter que la version japonaise contient deux covers en plus dans le disque, bonus non négligeable.





Le premier titre, du moins son introduction, pourrait presque faire office de blague. Dance Yrself Clean démarre sur une litanie facétieuse, au volume très bas. On entend à peine Murphy déblatérer, on perçoit quelques claquements de mains, deux trois percus. Vu que cette intro dure vachement longtemps (genre 3minutes) on se demanderait pas si notre lecteur déconne, ou si le magasin nous a enflé en nous refilant une édition défectueuse. Et bam, au moment où l’on commence à désespérer, un ENORME synthé déboule, avec un rythme de folie bien sec, et c’est parti, le roller-coaster Lcd est enclenché, tu sautes contre les murs, tu pisses de la sueur, tu écartes les bras en tournant sur toi même pour voir ton appart tanguer parce que la drogue c’est trop cher. Sérieusement, le synthé est vraiment énorme, Murphy hausse de la voix et nous emporte, ça défonce réellement. Imparable, presque hypnotique, le “groupe” n’a pas perdu sa propension à nous ensorceler avec un rythme tout simple, mais parfaitement taillé. Niveau mélodie, ça devient n’importe quoi, le clavier vrille de partout, electro droguée qui n’en fait qu’à sa tête, qui semble muter librement, n’arrête pas de faire des va-et-vients dans nos tympans, histoire de s’immiscer dans nos hanches à fond. Au final, on a une fresque intenable de 9 minutes, ouvrant parfaitement l’album. Il faut juste faire gaffe de ne pas trop monter le son sur le premier tiers, histoire d’éviter de se faire arracher la caboche lors de l’arriver des claviers. (Ce qui fut presque mon cas)

Il faut d’ailleurs s’y attendre, la majorité des morceaux du disque ont une durée assez gargantuesque, avec la moitié des titres flirtant (ou dépassant) les 8 minutes. C’est bien, ça laisse le temps à Lcd Soundsystem de nous balancer des rythmes de folie. Car si il y a bien une chose qui m’a convaincu au final sur Sound Of Silver, c’est bien ces rythmes, dépouillés, simples, mais absolument géniaux. Imparables en diable, impossible de ne pas se taper le genoux, remuer la nuque ou dandiner du cul à l’écoute de la majorité des travaux de Murphy. Cette espèce d’electro-disco apparaît ici dans sa forme la plus dépouillée, ou tout du moins la plus jouissive, beaucoup plus entrainante et directe que le mouvement Nu-disco à la P.thomas ou Lindstrom (et cette sombre histoire de pingouins).

Suffit d’aller un peu plus loin, sur One Touch, pour se convaincre que Murphy est un sacré taré, fondu d’electro, voir carrément de Techno pure. Grosse ligne de basse, bleeps et synthés de fou, handclap et beat binaire qui caresse le cortex. On pourrait se croire dans un club en train de cramer sous les psychotropes, mais Murphy prend le Micro, et transforme ce tunnel Techno en bombe electro-funk-salace énorme. Encore une fois, les synthés sont complètement affolés, hors contrôle, à piétiner nos casques audio avec violence. Tu balances ça n’importe où, que tout le monde devient fou, à se battre en hurlant des choses cool, parce que quand tu écoutesOne Touch, obligé, tu te sens cool, et tout est cool autour de toi, même ton job, même le métro, même le réveil. Ce morceau, c’est l’ecstazy du cool dans les oreilles, et c’est plutôt cool. Marcher dans la rue en écoutant ça, c’est avoir envie à chaque beat de faire des petits bonds, de claquer des doigts, de faire des clins d’oeil en pointant du doit, avec les dents blanches qui brillent et tout. Bon, forcement, on a l’air d’un désaxé cocaïne pour les passants, mais pas grave, vu qu’on est cool. Hypnotique encore une fois, mais jamais feignant. Un tube parfait.

Histoire de parler des brulots des le départ, sur ce disque, il y a aussi You Wanted a Hit, tuerie absolue, titre absolument génial, et je pese mes mots. Encore une fois, Lcd nous refile son amour de la techno puissance 10. De toute façon, des les premières secondes, j’ai senti que ce titre allait être mortel : La petite mélodie étouffée, aux apparats un peu pupute, semble nickel. Les claviers se superposent, le métronome, ultra binaire et simplet, n’est qu’une simple pulsation discrète. Bref, on en a pour deux minutes de progression tubesque, parfaite, avant qu’une guitare salace déboule en catimini pour aligner une autre ligne imparable. Ca progresse, la gratte prend de l’importance, ça drague ton coeur sans détour, tu as déjà envie de rouler par terre en bavant, mais c’est encore mieux quand Murphy se met à chanter. Il nous demande si l’on veut un Hit, et forcément, on ne peut répondre qu’à l’affirmative après une introduction pareille, même si on a l’impression de l’avoir déjà dans les oreilles. Alors après comme d’hab’ avec Lcd, c’est super linéaire, mais c’est parfaitement mené. Le refrain est déjà imprimé dans notre cerveau, et quand la guitare toute crado s’envole et crache ses tripes à la 5eme minute, c’est le coup de grâce. A moins que cela soit à la 8éme, quand le synthé tout fragile débarque. Bref, 9 minutes énormes, surement le meilleur titre de Lcd Soudsystem. Putain, je suis devenue une groupie.





Enfin pas trop non plus, car le cd a aussi ses ratés. Drunk Girls est rigolote, mais un peu simpliste. Elle est surtout un peu mal placée dans le disque, à la deuxième position. Elle aurait pu peut être avoir un peu plus d’impact au milieu du disque, histoire de distiller une facette rock sur un disque franchement electro. Trop courte aussi, et pas vraiment représentative de l’album, et pourtant choisie comme single.
On a aussi Somebody’s Calling Me, pâle copycat du Nighlubbin d’Iggy Pop, en franchement moins engageant. Le titre se serait un peu envolé sur la fin que cela aurait pu donner quelque chose de sympa, mais bon, pour le coup on s’emmerde. Sans compter que le synthé alcoolo du morceau pourra vite fatiguer. Histoire de pinailler, on pourra reprocher à I Can Change un rythme clairement moins excitant que ses potes, mais le morceau reste assez cramé dans ses refrains bien marrants et entrainants, pour convaincre rapidement.

Mais Lcd Soundsystem sait aussi calmer le jeu, et partir dans des terres plus apaisées. On le savait, il nous avait déjà cassé la gueule avec la magnifique conclusion de Sound Of Silver, culte New York I love you but you’re bringing me down. Sur ce nouvel Lp, avec All I Want, on reste dans l’electro, presque exubérante, mais sentimentale. En gros, on se tape le slow de l’album, mais par rapport au précédant, pas de piano larmoyant, mélodie sage et chant de crécelle. Parce que là, c’est tout crade, tout cassé, la guitare crachote au départ avant d’aligner une litanie de folie. Le piano est beaucoup plus ramassé, le chant (en)trainant. C’est sympa, mais on se demande ce qui va se passer, on est méfiant, surtout que ça fait drôlement penser au Heroes de Bowie.
Et vlan, le refrain déboule, et il semble se poser parfaitement sur ce maelstrom cradingue tout saturé. On voulait une chanson d’amour, Murphy nous balance du noir “All i want is your pity / Or all i want is your bitter tears“. Il y a un synthé débile qui vient se greffer au tout et c’est encore plus le bordel, mais c’est vraiment beau, et quand le titre s’envol sur son dernier tiers, tu n’as plus de colonne vertébrale, tu veux courir sur les collines vertes pleines d’herbes and co. A la première ecoute, j’ai voulu fuir ce morceau, au final c’est mon morceau préféré avec You Wanted a Hit. Obligé de chanter ça sous sa douche, voir toute la journée, un vrai virus. Et pourtant ça grince à mort tout le long du morceau. Tout bizarre, un peu bruitiste, bien bordélique, donc super riche, bourré de détails, épatante litanie dépressivo-j’m’enfoutiste.

Beaucoup plus rentre dedans, Pow Wow se pose presque comme le cliché tubesque-je-te-fous-une-mandale, avec des paroles scandées, presque agressives. Le rythme est encore une fois imparable. Et si, au première refrain, on trouve le tout un peu exaspérant, on se retrouve à balancer le poing en hurlant des Powpowpowpow Powpowpowpow comme un débile à chaque attaque lors des chorus suivants. Un pur titre de branleur, jusque dans les lyrics, débités d’une façon indolente, parfois presque bafouillés. Sauf que pendant 8 minutes 30, le tout progresse sans discontinuer, jusqu’à devenir complètement dingue. Ensemble incessant et abstrait de punchlines, à base de “We have a black president and you do not, so shut up” ou de “Your time will come. But tonight is our night so you should give us all your drugs”. Bien.
L’album se termine sur un affolant Home, très Sound Of Silver, avec un métronome encore une fois infaillible. Lente progression du coeur jusqu’au hanches, avec nappes de synthés spaciales, handclaps communicatifs et basse au poil. Murphy se permet quelques petits soupirs avant de partir sur un morceau simple, dépouillé, linéaire, mais franchement terrible. Ca doit faire son petit effet passé en public. A dire vrai, à l’écoute de ce disque, je ne rêve que d’une chose, voir comment le groupe se débrouille en live. Parce que les morceaux sont franchement taillés pour.

En bonus, pour la première cover, c’est carrément du Joy Division, pour un morceau déjà sorti sur le split ep avec Arcade Fire. No Love Lost est franchement réussie, et respecte l’agencement de l’original, même si beaucoup crieront au scandale, J.Division faisant parti des intouchables. Mais Murphy prend le parti d’un truc encore plus crade, avec un beat nécrosé sur la première partie, avant de faire tonner guitares acérées, et un chant plus énergique. Noisy et bien foutu, et bien plus rageur que le pas-folichon-mais rigolo premier single du Lp.
L’autre reprise sera plus étonnante dans son choix, en reprennant Throw de Carl Craig, morceau de Techno sur plus de 10 minutes, en replaçant les synthés par une guitare lancinante. Pour le coup c’est un peu dommage, j’aurais (vraiment) apprécie que Lcd pousse un peu plus la chansonnette dessus et se l’approprie carrément, vu que à la base le tout aurait parfaitement pu se prêter à ce genre d’exercice (on se limitera à quelques phrases, qui dynamisent certes le tout). Cela reste quelque chose de plaisant, et plutôt bien placé en fin de disque, donc on ne va pas s’en plaindre.









Sincèrement, s’il est encore un peu trop tôt pour savoir comment ce disque se place par rapport à Sound Of Silver, qui reste une énorme baffe pour moi, This His Happening est clairement dément. Il reprend tout ce qui ce fait de mieux chez Lcd, et pousse le vice d’accoucher de morceaux de géants, à la durée conséquente presque à chaque fois, formant un tracklisting massif. Mais tout passe sans heurt, grâce, surtout, à ces rythmes de folie parourant tout le disque.
Car c’est clairement le métronome qui me fascine chez Lcd Soundsystem. Faire des rythmes tout simples, qui pourraient clairement sortir d’une 606 suffocante, mais qui sont, à chaque fois, absolument imparables. Rien de spécial pourtant. Je ne sais pas, Murphy doit avoir la science du beat, mais c’est impossible de ne pas se prendre une claque à chaque fois. D’autant plus que le disque comprend franchement de véritables tours de force, comme l’inépuisable One Touch, le crado-mélancolique All I Want ou le génial You Wanted A Hit.
Les lyrics, eux, sont ironiques tout le long du Lp. Chez James Murphy, on se prend au sérieux en donnant l’air de ne pas se prendre au sérieux, mais d’une façon sérieuse (Je me suis perdu là, désolé).

Lcd Sondsystem semble vouloir décrypter, à la déconnade, son monde, sa musique, ses nightclubs préférés, et son public. Il est Hype en essayant de ne pas être Hype, tout en parlant de ce qui est Hype mais qui ne veut pas être Hype, ou juste un peu (merde, je me suis repaumé). On passe donc en revu la création d’un morceau (Pow Wow, You Wanted a Hit) les habitudes des Clubbeurs et fêtards (Dance Yrself Clean, Drunk Girls, Somebody’s Calling Me…), ou de relations toujours foirées (One Touch, All I want, I Can Change… à cause des habitudes hédonistes du dessus ?), mais avec des phases bien mordantes, et souvent noyées sous les attaques de claviers.





Je n’arrive pas à voir en Murphy un génie, un représentant de toute un vague hype new yorkaise, un maitre du revival rock-electro-truc. D’une part, parce que toutes ses références, je ne les maitrise et connais pas (il paraît que chaque titre est à relier à un classique, aucune idée, sauf les deux évidents du dessus). Mais surtout parce que pour moi, ce mec est simplement un fou du rythme, du synthé, de la mélodie. J’ai dis à des potes que je trouvais certains titres de ce disque génial, on m’a répondu d’une moue dédaigneuse que c’était pour les hipster. Je n’ai toujours pas trop compris c’est quoi, mais ils ont l’air d’être cool. Parce que quand tu écoutes LCD Soundsystem, tout à l‘air cool. Tout brille, tout bouge en rythme. Les lampadaires, les rues, les gens, les immeubles.



De toute façon, que LCD affole les foules et révolutionne [insérer la mention voulue], au final, on s’en balance un peu. Car quand je prends cet album (Et Sound Of Silver) dans la gueule, je ne pense à qu’à bouger la nuque en rythme, à claquer des doigts dans la rue en tournant sur moi même et à taper des moonwalk dans une rame de métro. Ouai. This Is Happening est un putain d’album, un vrai disque, de folie, qui, sur ses meilleurs morceaux, grille les neurones, taille les hanches et fait briller les yeux. Grand.









11 Titres – DFA
Dat’





Bitcrush – Of Embers

Posted in Chroniques on June 6th, 2010 by Dat'

She was just a dream, He was just a dreamer


Yeah, cela faisait quelques temps que l’on avait pas parlé de cheveux qui volent aux ralentis, de couchers de soleil mélancoliques sur une plage avec coeurs brisés, bouteilles de bières vides autour d’un feu de campagne en pensant à ses années lycées passées dans un campus emplie de grandes demoiselles qui parlent en slow-motion. On a l’air de se faire chier avec une moue boudeuse, mais en fait non, on déprime grave tout en souriant à la vie, c’est beau, on aime pas rien branler mais un peu quand même, sors ta guitare je veux construire des murs, appuyons sur toutes les touches du synthé pendant 10 minutes. I miss You. I miss You. I miss You. I miss You. I miss You. I miss You. I miss You. I miss You. I miss You. Par contre mets-toi une fleur dans la crinière, quand même pour coller un peu plus à l’ambiance.

Bitcrush, paraît qu’il est drôlement respecté, avec 4 albums à son actif, et responsable du label N5MD, qui a sorti le très bon Port-Royal l’année dernière. Mais je ne le connaissais pas. Enfin, je connaissais sans savoir le bonhomme, avec son projet culte Gridlock, et leurs albums Idm bien foutus, mais je n’étais pas allé voir plus loin. Car si en groupe, Mike Cadoo opérait dans l’Autechrien aquatique et épuré, (du moins sur les derniers albums), en solo, c’est sur du Shoegaze électronique que Bitcrush semble s’épancher.







Et au vu du Tracklisting, le terme “s’épancher” n’est pas de trop, on sent que l’américain aime prendre son temps pour tailler ses fresques, avec deux morceaux dépassant le quart-d’heure, et trois autres tutoyant les 8 minutes (plus un ptit loup à la taille interlude). Niveau packaging, c’est un peu plus frustre, avec un simple pochette cartonnée s’ouvrant en deux.

On pourrait tomber sur une piste au hasard, et comprendre sans problème la teneur de ce disque : Shoegaze éthéré, à mis chemin entre le nu-shoegaze électronique, et celui plus 90’s et indie. Of Embers, la progression. On commence sur de simples nappes ambiant, avec petits larsens perlant à l’horizon. Superbe au casque, profondeur de son vraiment travaillée. Une basse gronde sereinement, une mélodie s’installe, un petit simili-xylophone nous titille la colonne vertébrale, et dès la troisième minute, j’ai ce que j’attendais, aka les guitares qui se réveillent, sur lit de batterie ralentie et claviers qui s’envolent. Et pan, pile ce qu’il manquait au tout, des vocaux cristallins et fantomatiques débarquent, c’est drôlement beau, on dérive dans l’espace avec l’esprit serein même si l’on ne peut plus respirer. Cela reste académique, mais quand le tout est maitrisé, aucun problème. Hey, les vocaux se barrent ? Oh attends, reviens, part pas encore, oh stop ! ah ça doit être mon discman qui pête un plomb, problème de batterie, je… Nop, le morceau se termine sur un fade-out criminel qui sort de nul part en plein milieu du morceau. Sincerement, on se demanderait presque si le mec n’a pas fait une syncope au beau milieu de l’enregistrement, mais heureusement, Dreams Unto Fanthoms rattrape le coup en repartant quasiment avec les éléments utilisés précédemment. 
Plus rock peut être, avec cette basse un peu plus présente et crade, et ce rythme de batterie claudiquant. Le morceau nous drague rapidement avec ce cocon de nappes electro, tunnel pour un shoegaze porté par une voix plus affirmée. Moins abstrait, le tout nous envoie clairement en l’air avec ses choeurs discrets et ce solo guitare qui s’échappe, craspec, fragile, déboulant sans crier gare pour s’effacer très rapidement, un peu à la Low. Ca parle come d’hab de rêves, de solitude, le mec lâche des I miss You de rigueur, les éléments s’empilent, les voix aussi, même quelques cordes, et le solo de guitare revient, ça tue vraiment et on se rend compte que Bitcrush voulait faire une chanson d’amour crooner à la Chris Isaak, sauf qu’il n’a pas pu se refréner de passer le tout sous Lsd, murs de guitare et slow motion. Reste que, c’est parfait. Et si la belle est une junkie, ça fera sûrement l’affaire.




Mais l’américain sait poser l’ambiance, et clairement nous envoyer planer de longues minutes, avec ses deux gros morceaux coincés au milieu du disque, Fray The Middle To Meet The End et Ascension. Le premier, rapidement épique, échangera en cours de route la batterie escarpé pour des beats electro, en mode glitch timides, et nous écrasera sur le gros “mur de son” déboulant après 6 minutes, à nous plaquer au sol si l’on écoute le tout au casque. La deuxième partie du morceau sera plus calme, plus synthétique, on laisse les guitares de coté, parfait pour atterrir. 
Ascension adoptera un peu la même structure, en moins épique, plus éthéré slow-motion-j’ai-perdu-la-notion-du-temps, avec son intro crépusculaire, piano et nappes qui copulent, une montée de folie avec le rythme le plus cinglant du disque, vraiment bien amené, qui mourra tranquillement sur une longue partie ambiant. On aurait peut être aimé que le pic du titre reste un peu plus longtemps, ou explose pour de bon, mais pourquoi pas. 
D’autant plus que The Day We Spent Within toujours avec cette même construction, et surement meilleur titre du disque avec Dreams Unto Fanthoms, nous offrira une belle fresque, plus condensée, et peut être plus efficace. Le sommet d’intensité du morceau (toute proportions gardées, c’est pas du Thunderdome non plus) sera cette fois parcouru de rythmes un peu nécrosés, genre drill’n bass épurée sur guitares appuyées, et vocaux discrets mais vraiment bien placés. Fan service, c’est nickel.




Difficile de réellement se prononcer sur cet album, tant l’avis final reposera sur l’attrait du style à la base, la galette rebutera de toute façon les allergiques au genre, et hypnotisera les tympans en manque de shoegaze post-rock electro au ralenti. Certes, le fade-out tout simplement incompréhensible et criminel du premier morceau en fera tiquer plus d’un et l’on pourra aussi critiquer le fait que le disque soit un peu trop sage, avec des explosions parfois trop éphémères. (surtout sur Ascension en fait) Je n’ai pas de point de comparaison, puisque cet album est le premier que j’écoute de Bitcrush, mais on aura peut etre aimé que le disque soit plus secoué, mais ce n’est surement pas le propos de Of Embers.

Car Bitcrush fait le choix de plonger son shoegaze dans un écrin serein et ambiant, celui qui vous enveloppe pour ne plus vous lâcher, parfait pour marcher dans les ténèbres, en manque de sommeil, au milieu d’une ville, à moitié perdu, tentant vainement de retrouver votre chemin. C’est un disque-de-nuit exemplaire, que l’on lance d’un geste presque désintéressé, pour s’y perdre à coup sur au final. Sa structure, très shoegaze/rock au départ (sur ses deux premiers titres) qui glisse petit à petit vers quelque chose de plus électronique-ambiant, n’est pas étrangère au coté sédatif du tout.

Un disque très plaisant en somme, arrivant au bon moment, vu que j’étais un peu en manque de ce genre de fresques, à écouter lors de nuits un peu longues, les oreilles lovées dans un casque, au fin fond du dernier métro, ou en marchant le long d’une grande avenue vide et mal éclairée.






6 Titres – N5MD 
Dat’




Himuro Yoshiteru – Where Does Sound Come From

Posted in Chroniques on June 6th, 2010 by Dat'

Ladies and gentleman we are dancing in space


Encore une fois, bien difficile de faire une introduction sur un mec que l’on connaît ni d’Eve ni d’Adam. Durant une soirée live/electronique, je suis tombé devant ce mec, vers 4h30 du mat’, bien crevé, avec une furieuse envie de voir les premiers métros s’activer. Plus vraiment envie d’écouter de la musique, on se demande où se poser, la tête engourdie, les oreilles chauffées. Peut-etre le dernier mec à passer dans le line-up, Himuro Yoshiteru, inconnu au bataillon pour ma pomme, se pose tout discret devant son Mac et ses bidules Midi, ne bouge pas d’un poil. Le mec ne va pas retourner les foules en faisant la grande roue sur scène, c’est sur. Et vlan, grosse baffe, le japonais balance une superbe mixture entre Electro bien crade et 8bits émo, vrillant parfois dans le Dubstep/Hiphop et l’electronica fragile. Le tout bien souvent très beau, de temps à autre bien violent, Himuro me retourne le coeur et l’échine, au milieu d’une salle quasi-vidée. 
Evidemment, je me renseigne au plus vite, et heureux hasard, le bonhomme venait de sortir un album le mois dernier. Pour le reste, sur les rares infos que l’on peut glaner sur le web, Himuro Yoshiteru a eu l’honneur de passer dans l’émission radio de John Peel, et a quelques albums derrière lui.





L’artwork défonce, et s’étend sur l’arrière du disque, ce qui en jette drôlement quand on déplie le digipack. Le titre est marrant, sur mon edition cd, il est écrit “dose” mais sur les sites de vente, voir même sur les plates-formes officielles d’Himuro, “does” est indiqué. Petite erreur à l’imprimerie?

Ce qui frappe au premier abord, c’est la façon dont Himuro s’affranchi de pas mal de clichés tenaces quand on écoute l’electro jap (le copier-coller Ed Banger / L’electronica vaporeuse toute sage et un peu linéaire / Les digressions jazzy world). Il a clairement été influencé par des tonnes de disques Warpiens and co, et balance dès le départ du gros son, pachydermique : The Adventure on my Desktop se la joue Dubstep monstrueux, avec des basses de folie, et une ligne de basse bien marquée. Ca balance dur, ça bouscule les tympans avec ses digressions métalliques giclant de partout, mais le morceau accueille rapidement une mélodie cristalline, drôlement belle, qui se fait littéralement rouler dessus par les saturations, le tout n’arrêtant plus de se cabrer en rugissant dans tous les sens. En son milieu, Himuro va ralentir le tempo, filer sur un écrin abstract, avant de repartir dans un passage à tabac breakbeat de folie. 
On a même pas le temps de ramasser ses dents que Is résistance futile ? déboule, encore plus dingue, avec ce rythme semblant tout droit sortir d’une usine devenue dingue, les presses à métaux forment une armée et tabassent tout ce qui bouge. C’est absolument jouissif, ça se tord en hurlant, avec des synthés un peu pute qui tentent de surnager au milieu de l’apocalypse, avec une conclusion frisant avec la noise, la track se nécrosant dans un fracas ahurissant, en lien direct avec We, Mess-age, abstract Hiphop Autechre-ien, rampant, dérouillé, mutant, avec une ligne de basse absolument ENORME, qui pourrait faire trembler des immeubles entiers. C’est la fête chez les acouphènes, c’est mortel, imparable et jubilatoire, mais le japonais ne s’arrête pas là, et joue sur la rupture, en partant sur une superbe mélodie fantomatique, bien mélancolique, et collant étonnamment avec le fracas total moulinant juste derrière. La grosse correction, le tour de force de l’album.

Mais même si l’entame du disque arrache la gueule, et bastonne dure, que l’on se rassure, lHimuro semble aussi très enclin à tailler la belle mélodie. La vraie, la nostalgique, celle qui vous balance des petits papillons dans le coeur. Pour tout dire, c’est clairement Unwind and Rewind qui remporte la palme du “beau titre” du disque. Il drague à mort, et s’accroche directement à mon palpitant en se basant sur une litanie 8bits vraiment belle, synthés chiptune qui s’envolent sur une basse vrombissante. Le rythme est languissant, presque slow-motion, mais ce n’est pas là l’important. Ici c’est la cathédrale de claviers, les gameboys qui copulent, les nappes planantes qui se greffent au tout petit à petit. Ce morceau, c’est une simple montée en puissance, qui trouve grâce dans son dernier tiers, sur l’ascension finale, qui viole l’âme. Un des plus beaux titre aux relents chiptune que j’ai pu entendre depuis un bail (depuis FaltyDL surement), et dieu sait si je me gave avec ce genre de musique. C’est tout simple au final comme morceau, mais je crois que ce genre d’exercices marchera toujours avec moi. 
Autre digression séduisante et jolie avec If i could play guitar (je ne suis pas le seul à me dire ça, c’est rassurant), et sa superbe intro electronica très Plaid, à base de clochettes et mélodie fragile. On est déjà conquis, mais des petits bleep facétieux se faufilent dans nos oreilles, avant que le morceau accueille un rythme techno binaire, accompagnant parfaitement la mélodie, confortant le parallèle avec les deux anglais dont-ont-attend-un-album-depuis-tellement-longtemps-que-l’on-tombe-en-depression.




Mais Himuro Yoshiteru tutoie aussi les sommets quand il fait copuler son sens mélodique et ses envies de meurtres sonores. I Wanna Show You What I’m Seeing, lâche les chevaux, grosse drill’n bass affolée, sur claviers à crever. Ca explose de partout, les synthés sont énormes, le tout est franchement épique. Et quand le morceau fini de vriller, de tressaillir dans tous les sens, breakbeat fou, on s’arrête brutalement, pour échouer sur un piano lugubre, balançant une séquence un peu analordienne, avec retour d’un métronome plus calme mais toujours bien soutenu, histoire de bien hérisser les cheveux. Bonheur. 
Impossible de bouder Sort of D’n’B, qui porte bien son nom : Himuro nous balance un morceau de drum’n bass 8bits, dans la pure tradition, avec une mélodie rappelant un peu certains passages du Pwntendo de sieur Venetian Snares. Mais le morceau va vite s’affranchir de cette comparaison en laissant tout à coup les rythmes de coté, pour filer vers une comptine candide, à base de flutes, piano et autres teintes rigolotes. On joue à la tomate en regardant le ciel bleu, mais le japonais veut nous faire cavaler, et écrase cet intermède récréatif avec de nouvelles charges breakbeat. Miss Kimono Dancers offrira lui aussi une piste Chiptune-je-fais-l’amour-à-tes-jeux-videos, bien progressif, presque grandiloquent, mais grandiloquent 8bits, donc drôlement cool.




Au final, vu la qualité des morceaux précités, on pardonnera à Himuro Yoshiteru deux ou trois morceaux moins affriolant. Le long Start It commence tranquillement, mais la deuxième partie du morceau, Hiphop dancehall vraiment générique, refroidie drôlement (d’ailleurs, le Mc n’est pas crédité, et le couplet fait très “libre de droit”) ça fait un peu tache au milieu du disque. (Dommage, pendant le live, il a balancé des morceaux de rap japonais absolument énormes, qui ne sont pas dans ce disque). Bold Lines est un peu linéaire aussi, ce qui marque vu que la majorité des tracks du cd jouent sur la rupture ou la progression, et le breakcore ralenti Hi ! fait un peu j’ai-tout-plein-d’effets-sur-ableton-je-vais-vous-les-montrer. Mais il est court et peut être pris comme un simple interlude, rien de dommageable au final.

Sur cette galette, Himuro Yoshiteru étonne, avec un album certes un peu trop cadré, mais enclin à taper dans toutes les directions avec un talent certain. De son entame absolument monstrueuse (Les 3 premiers titres ravageurs, avec en point d’orgue l’affolant We, Mess-age) à ses divagations 8bits ( superbe Unwind and Rewind, ou Sort of D’n’b bien jouissif) en passant par quelques titres plus warpiens-Idm ( imparable, belle et parfaite drill’n bass sur I wanna show you what I’m seing, l’aerien et plaid-ien If I could Play Guitar…) le Japonais ne se trompe que rarement.

Et surtout à jouer sur les ruptures et la venue soudaine de mélodies, le bonhomme nous emporte le coeur, là où il aurait pu se limiter à la grosse violence. A dire vrai, le dosage entre explosions et moments éthérés, avec ce brassage de genres constant, permet de s’enfiler l’album sans sourciller. Bref, encore une fois, pas de révolution, presque du fan service, avec ce mélange de breakbeat/chiptune/electronica/dubstep, mais Himuro Yoshiteru le fait tellement bien que ce Where Dose Sound Come From risque de tourner pendant pas mal de temps dans mes oreilles.

Le japonais semble aimer massacrer ses machines, mais sait aussi tabasser en douceur, en n’oubliant jamais de nous envoyer planer dans la stratosphère. Un excellent album, petit coup de coeur.



Mp3 :

– Himuro Yoshiteru – Unwind and Rewind

– Himuro Yoshiteru – Album Teaser



14 titres – Murder Channel 
Dat’



Programme – Agent Réel

Posted in Chroniques on May 1st, 2010 by Dat'


La situation d’urgence est devenue la situation tout court






Bon, on ne va pas se mentir, l’écoute du précédant album de Programme, parfaitement intitulé l’Enfer Tiède, fut un traumatisme. Difficile de prendre avec le sourire ce flot de griefs incessants, cette description clinique et violente de l’humanité, ses travers, ses vices. Nous expliquer que tout est défaite, avortement, fuite. Critique sèche en sourdine, réel dégout en pleine gueule. De part ses textes splendides, Michniak chiait sur le monde, spectateur résigné en symbiose totale avec la musique de Damien Bétous, stridences expérimentales et autres réminiscences acousmatico-industrielles. Hiphop, electro, rock, expérimental, on ne sait pas trop. Un peu de tout ça en fait.

Alors évidemment, pour beaucoup, Programme, c’est le rejeton salace de la formation française Diabologum, qui s’est séparé après l’indispensable/culte album #3. Du rock noisy, Michniak est passé à la peinture sociale ultra sombre et dépressive. La musique de caniveau, sang sur le bitume, accords bruitistes, textes parlés/marmonnés, sans venin. Juste dégoulinant de sa bouche comme du vomi de toxico en train de crever dans une impasse. Alors forcement, après avoir atteint le paroxysme, l’équilibre parfait sur l’enfer tiède, le groupe à du se demander ou aller. Voir même pourquoi continuer. Tu viens de découper un cadavre, tu ne vas pas en chercher un autre le sourire au lèvre, sauf si t’es un gros taré.
Chez Programme, on n’est pas fou, on dissèque les gens simplement parce que l’on a marre de descendre les poubelles et se mêler aux ordures. Alors après un Ep de commande bien foutu, et vraiment expérimental (Bogue), le groupe se sépare un peu, histoire de reprendre du souffle, de remonter à la surface.

Michniak revient à quelque chose de plus rock et direct (enfin toute proportion gardée) avec son Poing Perdu, Betous se demande de quelle manière il pourra écraser les neurones sur la prochaine galette. 6 ans donc, et Programme revient, tout le monde est drôlement content, on va pouvoir enfin redire que la vie c’est tout pourri en aillant l’air cool. Ou tout du moins halluciner sur des fresques musicales écrasantes, chevauchant devant des textes de folie.














Une chose qui n’a pas changé, le soin apporté au packaging. Même si un peu moins avenant que celui de l’Enfer Tiède, (car tout en noir et blanc) ce Agent Réel rempli son contrat avec un livret comprenant les textes du disque en intégralité, et toujours imprimés dans tous les sens, à l’envers et en diagonale. Et si les lyrics étaient important sur les Programme de la veille, tant les paroles méritaient une vraie lecture, ce nouveau recueil est peut être encore plus important, vu le concept du disque :

Oubliez le Programme qui dissèque le quotidien au scalpel. Oubliez le Programme lucide et détaché, donnant un coté implacable, ultra réfléchi et résigné aux textes. Sur Agent Reel, c’est l’histoire d’un type qui pête les plombs. C’est l’égo-trip d’un Schizophrène. On ne saura pas vraiment si c’est Michniak qui parle, ou ce fameux “Agent Reel”. Tout ce que l’on sait, c’est que les paroles ne seront pas, cette fois, débitées avec froideur et recul. Non, ici, on va nous cracher des bouts de phrases, des accusations (au premier abord) sans queue ni tête, on a l’impression que le mec est en plein burn-out. Il a trop pris sur lui, il explose. C’est un autiste qui se révolte, c’est un hikikomori qui sort enfin de chez lui et qui ne peut s’empêcher de flipper, de vomir. Bon déjà, 80% des fans de Programme font la gueule. Mais attendez, en plus Michniak, ces phrases, il ne les parle plus en mode dépressif-roulé-en-boule-sous-son-lit. Il les rappe ! il les scande ! Il a l’air vénère, moins détaché ! il invective ! Et hop on monte à 90%. C’est pas fini, j’en ai encore une en stock. On écoute le premier gros morceau du disque, Agent Reel justement, et on se rend compte que la musique a changé aussi. Betous semble avoir arreté de faire des instrues genre réacteur d’avion en train de mourir (comme sur le splendide Il y a) qui font piouuuuuuuuu scriiiittchfzzzzz prrrrrrrrrrrrrr. Non, là c’est un espèce de rock mutant, tordu, électronique, qui te casse la gueule, les hanches, la colonne. Un truc presque tubesque. Pan, sanction, la barre est à 95% de déçus. Programme, c’est fini, c’est mort, je suis triste.
Hey mais attendez. Un instant. Elle défonce cette instrue. Les guitares, les beats, la bassline ahurissante en fond sonore. C’est crade, ça tabasse. C’est jouissif. Et Michniak qui fulmine par dessus, la symbiose est parfaite. Les phrases, elles se terminent à chaque fois en leur milieu, ça donne une structure bizarre, éclatée. Mais bordel, ça tabasse. Le mec, il te donne envie de lever les bras, de gueuler Agent Reel, et de filer un coup de pied dans ta porte pour taper tout le monde. Le dernier album de Programme, c’etait il y a 8 ans. Ce nouveau Porgramme, semble prendre la facette plus rock du solo Michniak, avec une musique plus electro-experimentale.

En plus il l’assume le bonhomme. Si on est pas content, il s’en bat un peu les couilles. “Si tu cherches l’explicite / Ou des trucs esthétiques / Si c’est juste pour ça / J’dis compte pas sur moi / Compte pas sur moi / Pas sur moi” “J’avoue j’dévie / Je rappe si tu veux / j’men tape / J’suis D, j’suis E, j’suis F”. l’Enfer Tiède de Programme, c’était explicite. Et esthétique. Bref, c’est fini, on n’en aura pas un deuxième. En même temps, il faut les comprendre les deux loustics, ils avaient attend la limite finale avec l’ancien album. Un truc parfait, presque indépassable dans son style. C’est un peu comme Dalek, ils savent bien qu’ils ne pourront jamais nous taper un deuxième Absence. Autant aller dans une autre direction.









Alors si au niveau des textes, c’est un virage à 180°, on pourrait presque dire la même chose de la musique. Mais là, aucun regret. Le travail de Betous est superbe. Quasi-parfait. Il arrive enfin à rendre Programme écoutable sans traumatier. Tout en gardant le projet ultra expérimental, et à mille-lieux des productions actuelles. Sincerement, les instrue défoncent. Litteralement. Ca pue le souffre, le bitume, le ciment. C’est cassé, c’est la mort, c’est des coups de coude dans la gueule. Fini les nappes dépressives, les divagations industrielles en slow-motion, laissons tomber les pianos traumatisant. (Vraiment, j’ai encore du mal à écouter Une vie sans me sentir mal)
Sur cet album, c’est du tube désincarné. Du punk concassé. De l’electro en pleine overdose. Ca tabasse, et c’est parfait, vu que Michniak nous engueule. C’est une épreuve de force, c’est la charge rock noisy énorme… qui aurait presque pu se faire une place sur #3. Si si. Guitares ultra crades, et beat de bucheron. Folie. Ya Quelqu’un ?, c’est un peu la même chose, mais découpé en morceau. La guitare fait des soubresauts incessants, comme un poisson en train de crever sur le sol de la cuisine. Le texte, on ne le pige pas trop, charge contre les medias complètement écartelée, morcelée. L’abrutissement télévisuel, ou l’abrutissement de la vue tout court. Difficile. Parce que les lyrics sont crachés de partout, ils t’arrivent dans la gueule, sans lien avec la phrase précédente. Mais ça tabasse. Encore.

Le plus étonnant, ce sera Ce n’est pas ça. A dire vrai, j’ai bien cru, à la première écoute, que le groupe tentait le morceau Techno. L’intro est folle, avec un Michniak craqué qui te balance des Ce n’est pas ça ! ce n’est pas ça qui se passe ! ce n’est pas ça ! sur un beat de folie. Tu as l’impression que ça va partir en drum’n bass, mais bon faut pas trop déconner non plus, alors on va se faire envahir par une nappe fantomatique ultra plombée, et un rythme qui reste bloqué sur sa cadence de la folle introduction. Là, le texte part en vrille, énumération d’images, d’idées, de photos. C’est ne pas savoir si c’est ça ou une action / C’est une explosion au ralenti / C’est du sang / C’est uen petite fille qui sourit / C’est une petit fille qui plante cent fois un stylo dans la tête du maitre / C’est ce que l’on ne montre pas.







Michniak, on le sent au bord de la folie, de la folie tout le long du disque, mais c’est sur le superbe Nettoyage Ethique qui lâche littéralement les freins. Les paroles sont jetées en l’air, les phrases ne se terminent pas, Michniak bégaient, bafouille, bouffe ses mots, repete dix fois des passages. Tu as l’impression qu’il devient fou, ça fait flipper, c’est hypnotique. Vous avez bien travaillé / Vous m’avez bien bourré le crâne / Vous etes des bons bourreurs / C’est de la bonne bourre comme il fallait / C’est bien ça qu’il fallait / Vous avez bien bien bien travaillé / et c’est normal d’etre bien bien récompensé / quand on a bien bien travaillé. Ok, on a envie de lui envoyer des pilules, mais ça reste fascinant.
Sur cet album, Michniak, en plus de vouloir, semble t’il, parler comme un damné, a peut etre adopté l’écriture automatique. Les mots semblent sortir en direct, sans réel lien, simple autoroute d’idées misent en commun. C’est le A Milli de Lil’ Wayne de l’underground asile pour psychotiques. Là, sur ce morceau. Il fait flipper. Tu as un cramé dans les oreilles. Sur une superbe compo de Bétous. Pas de quoi se plaindre. A dire, vrai, le seul titre qui renvoie directement aux précédants travaux de Programme, c’est Bruit Direct, brulot Noise (vraiment) faisant copuler murs de bruit blancs et guitare éviscérées sur rythme hardcore. On n’est pas loin des travaux d’ Otomo Yoshihide, ça fera flipper un immeuble entier, jouissif. Et en plus le texte est clairement intelligible pour une fois.

Le seul gros regret de l’album, c’est Nous, fresque bruitiste de 30 minutes ( !!!), longue pièce quasi improvisée qui aurait pu être géniale, mais qui tombe clairement à l’eau à cause de passages un peu dommageables (le long triturage de gratte entre la 6eme et la 12eme minute notamment, qui revient après) malgré une intro dantesque(Tsunami noise en mode bruit blanc). Les paroles, au milieu du bordel, sont encore plus découpées, écrabouillées, bribe de mots, milieux de phrases, syllabes déssossées. Mais ça ne renverse pas, ça ennuie surtout.
Heureusement la fin de l’album remettra les pendules à l’heure avec un méchant N.A.M, charge rock-indus militaire. Et lyrics simili-écriture automatique, toujours jetés à la gueule, à nous de faire notre tambouille, nos liens, nos constatations. On comprend pas, mais tant pis, Michniak ne veut plus nous mâcher le boulot.










Même si l’on se doute que le duo s’en bat la nouille, Programme prend de gros risques avec cet album. Car tout en continuant d’exasperer ses détracteurs, (qui vont d’ailleurs s’en donner à coeur joie sur ce nouvel album, Michniak etant peut être encore plus horripilant pour certains ici) Programme va se mettre à dos sa fan-base, qui ne vas pas aimer la mutation du projet, passant de la description clinique des travers de notre société à la simple révolte d’un allumé. Pas de textes explicites, pas de musique neurasthénique, pas (ou presque) de phrases chocs. Ici, c’est un gros bordel de mots balancés à tout va, de pétage de plombs, de crises de nerfs.
Comme je disais plus haut, ce n’est presque pas étonnant. L’Enfer Tiède, c’était tout. C’était la limite absolue. C’était le paroxysme, le but, le point final. Surement le disque français le plus extrême, le plus violent, le plus désenchanté, le plus lucide, le plus traumatisant. Tu veux faire quoi après ? A part une redite frêle et bancale. Un truc qui renverrait forcément à son précédant. Il le disait bien Michniak, tout était déjà fini, raté avant d’être abordé, limite on se demande pourquoi les mecs ressortent un autre disque maintenant. A quoi bon continuer de décortiquer quand on sait que tout est déjà mort. Autant perdre la boule. Non ce n’est pas forcément indécent de parler de soi. Ni d’avoir l’air d’un fou. Parce que dans les textes d’Agent Reel, on a vraiment l’impression d’avoir affaire à un aliené, à un mec incohérent, qui se plante devant toi en débitant des phrases sans queue ni tête, te postillonnant dessus en agitant les bras. Michniak, sur Agent Réel, il est un peu comme ça. Ca me plait bien. D’autant plus qu’il est superbement accompagné par les compos de Betous :


Il y a un glissement intéressant dans Programme. Premier album, mon cerveau dans ta bouche, la musique était encore bancale, là ou les textes étaient déjà acerés. Deuxieme plaque, symbiose totale, parfaite, entre une musique déraillée, excessive, et des textes parfaits, cisaillés à l’extrême. Troisième disque, les textes sont cette fois en retraits, là où la musique de Bétous est enfin parfaite. D’ailleurs, j’ai plus vraiment envie de réécouter l’Enfer Tiède. De le lire oui. De l’écouter, plus vraiment. Il est trop, il me fatigue. J’ai fait un peu la gueule à l’écoute de ce nouveau disque, forcément. Mais rapidement, j’ai été soulagé. A quoi bon recommencer. L’enfer Tiède, je l’ai déjà. Et merde, la musique sur Agent Reel, cette fois, est parfaite. L’équilibre absolu entre expérimental et brulot jouissif.



Maintenant, Programme est énervé, Programme tabasse, Programme ne s’enferme plus dans son appart, il invective, il crache, il bafouille. Il se tord dans tous les sens en donnant des coups au hasard, sans distinction. On ne le pige plus trop, on a envie de l’enfermer dans une pièce pour l’entendre et le regarder gueuler en se jetant contre les murs. Il donne enfin envie de serrer les pognes, là où il poussait presque au suicide auparavant. Programme fait du rock electro bruitiste, presque facile à écouter. Des mélodies, il y en a. Il ravive quelques souvenirs (#3, un peu) mais surtout, en l’écoutant, on prend son pied. Des morceaux comme Agent réel, Ce n’est pas que ça ou Il y a quelqu’un, ce sont des tubes. Viciés, concassés, cancéreux. Un peu juvénile aussi, c’est indéniable. Mais ça fait du bien. 8 ans après, ils ne veulent plus se rouler en boule en geignant, ils veulent donner des coups de poings à tout le monde. On peut regretter les textes, la posture d’antan. Mais pas trop, pas longtemps, car en écoutant Agent Réel, je trouve qu’ils ont fait fort.








Programme – Agent Réel (Soundcloud)

Programme – Bruit Direct Teaser










9 titres – Ici d’ailleurs
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