Graves Graves Graves
Il était une fois 2005. Deux albums allaient sortir et bousiller mes tympans : Le Côte Ouest de Tepr et le Burn Down Town de Phon.O. Grosses basses bien grasses, synthés méchamment agressifs, pour une recette que l’on sentait déjà pointer dans les Ep de Modeselektor, qui n’avait pas encore sorti d’album à ce moment là (mais qui allait appuyer sur la gâchette avec leur Hello Mom !). Défini à l’époque par Infratunes (j’avais découvert le disque grâce à la chronique sur le site, c’est dire comme cela remonte) comme premier vrai représentant de la contestée Eurocrunk, un pendant européen, instrumental et ralenti d’une vague pimp aux US, ce Burn Down Town était devenu un disque culte (même s’il a un peu vieilli) dans mes oreilles, balançant des sonorités plus putassières, tout en restant foncièrement crades et underground. Deux morceaux en point d’orgue, le cultissime et imparable En Duo Avec George W, que je me repasse souvent avec toujours autant de plaisir, ainsi que les ravageurs Kyoto Station 6pm ou Ridin’ Dirty.
Puis plus rien, à part quelques maigres EP entre 2005 et 2011 pour Phon.O, qui réapparait sans crier gare en fin d‘année dernière sur le label de Modeselektor, et une nouvelle direction : (presque) fini les claviers gras et les basses pachydermiques, on passe au Uk / 2step racé et lunaire. Etonnant, un peu comme si Hudson Mohawke se mettait à faire du Fennesz. Une énième et barbante déclinaison d’un son à la Burial ? Loin de là, Phon.O a bien trop de métier et de talent pour tomber dans un piège pareil.
N’y allons pas par quatre chemins, l’album est une pure tuerie. Bourré de bombes Uk/2step electronica ultra mélodiques, superbement taillées. Nightshifts, ça porte bien son nom, tu prends ton service dans une boite crasseuse, à naviguer entre la fumée des clopes et les minijupes. Entrée en matière presque club, mais tout en retenue, cisaillée avec prestance, tout en restant plus rentre dedans et moins précieux qu’un Jacques Greene. Mais Phon.O impressionne sur ce disque par sa maitrise de la mélodie. Uk émo pour sur, qui drague le palpitant, qui tutoie autant les cieux que les ordures. Yudasi, bass music funèbre pas loin d’un Seekae laisser perler une litanie magnifique. Le morceau ne dure que 2 minutes, mais la progression est parfaite, véritable petit bijou électronica. Sinon… dub cristallin avec Hopelight ? Check ! Uk garage rétro et technoïde avec Die Machinistin ? Check ! 2-step fantomatique noyé dans les échos ? Black Boulder est dans la place.
Tu cherches les grosses tueries de l’album ? Il faut écouter ABAW 723, qui te sort la mélodie hypnotique, les voix susurrées et le beat uk qui drague l’échine. C’est le gros tunnel techno avec les nappes qui t’étouffent, tu chavires en slow-motion aveuglé par les stroboscopes après trop de verres et médocs dans le nez. Le morceau fait du surplace pendant 4minutes30, et c’est pourtant beau comme la mort. Ce mélange parfait entre club music, mélodie camée et Uk garage fantomatique, c’est ce qui me manquait sur pas mal de disques sortis récemment.
Même combat pour Mosquitoes, qui démarre façon Burial 2012, avec cette rythmique 2-step qui sort des tréfonds londoniens, de caves remplies de cadavres rongés par la dope. Mais ce coté Burial va se faire graduellement bouffer par une nappe Trance pachydermique, qui défonce le morceau tranquillement, te donnant l’impression d’écouter un concert d’Amin Van Buuren à travers un mur de béton. Le tout laissant perler des réminiscences du Phon.O d’antan. Slavemode sortira lui aussi ce petit coté Trance dépressive que tu écoutes à 5am après une nuit blanche. Quand le morceau se soulève à partir de la moitié, crache cette belle mélodie putassière avec son synthé bigger than life, et que le rythme se remet à gronder après être resté effacé pendant plus d’une minute, c’est mandale en pleine tronche. Un travail énorme sur le dernier tiers, avec les voix qui interviennent par milli-secondes et cette mélodie qui donne envie de lever les mains. Le tout devient presque candide, léger, lumineux, après avoir arpenté la crasse d’une rue noire : réussite totale. Le onzième morceau, intitulé 12th, est une longue progression épique sur plus de 6 minutes. Très Moderat dans l’âme sur la première moitié, étouffée et caverneuse, le morceau va partir en Uk accéléré, course vers les étoiles, bassline grondante, parfaite conclusion d’album.
Mais Phon.O sait aussi composer avec les voix, et nous sert au sein de ce Black Boulder deux morceaux de folie avec chanteurs en featuring. Un certain Pantasz et sa voix cristalline accoucheront d’une soul belle comme la mort sur Twilight, 2-step de folie avec mélodie trançouille progressive et claviers lunaires. Et c’est la beauté suprême avec Leave a light on, et sa mélodie façon gouttes d’eau qui te hérisse les poils sur les bras, et une voix pure comme de la glace. C’est très émo, ça ferait presque penser à certains des premiers essais de Artful Dodger avec ces petits violons synthétiques durant le refrain, mais putain, qu’est-ce que c’est soigné.
Au final, et c’est bien là la première qualité de ce disque, ce Black Boulder de Phon.O arrive à trouver l’équilibre parfait entre dancefloor émo, Uk garage racé et bidouilles électro-mélodiques, comme très peu d’autres musiciens UK/2step/bass music ont pu le faire jusqu’à lors. Oubliez le bien trop mou et faisandé nouveau Clubroot (belle déception), car c’est chez 50weapons que la fusion se passe.
Soufflé par ce disque, peut être enfin celui que j’attendais dans le Uk garage, tant il a toute les qualités pour écraser la concurrence, cristallise tout ce qui se fait de mieux dans le genre, et défonce toute la brochette de LP sortis depuis 2007, marquée à vie par le Untrue de Burial, impossible à détrôner. Et le plus drôle, c’est que cet LP si travaillé, si absolu, si bien taillé, vient d’un mec qui était loin de faire dans la dentelle auparavant. Mon héros de 2005 revient 7 ans plus tard, sans trop avoir donné de nouvelle et sans crier gare, pour me foutre une énorme torgnole. Merci, j’apprécie.
Un des meilleurs albums de cette première moitié d’année, assurément.
Phon.O – Slavemode
Phon.O – ABAW 723
11 Titres – 50 weapons
Dat’
This entry was posted on Saturday, May 26th, 2012 at 3:54 pm and is filed under Chroniques. You can follow any responses to this entry through the RSS 2.0 feed. You can leave a response, or trackback from your own site.
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Totalement d accord avec toi c est une grosse tuerie. Ca ressemble beaucoup a jacques greene mais rien qu en ecoutant nightshifts on a l impression qu il travaille beaucoup plus le son, c est plus abouti et plus complexe tout en restant immediat. J adhère a 100%!
Oui tout à fait.
Enfin, Jacques Greene est un peu plus House, plus précieux, c’est plus mannequins à talons haut droguées dans une soirée mondaine, alors que chez Phon.o c’est mannequins à talons haut droguées dans une cave durant une soirée Uk garage ahah.
A dire vrai, ça fait aussi penser à Clubroot, mais en beaucoup plus ouvert, mois étouffé…
Il cristallise pleins de trucs venant d’acteurs differents du mouvement (Greene, Falty DL, Burial, Clubroot…), il condense le tout avec intelligence et te balance ça sur une galette de folie…
Yaouh la transition avec Burn Down The Town !!!! J’adore ce dernier, mais là c’est encore plus coup de coeur…
Ça condense le meilleur de plusieurs genres phares du moment…
Merci de m’avoir mis la puce à l’oreille sur cette superbe sortie !
Ce sera écouté dans la semaine bro, mais tu peux déjà réserver ton exemplaire de Modeselektion Vol.2 : la piste qu’il y largue est juste une grosse dinguerie garage parfaitement dans les tons de ce que tu décris, avec un gros riddim façon Burial derrière en prime. Chouette volume btw, toujours à la pointe les teutons !
Reçu en cadeau la semaine dernière, déjà écouté plein de fois : grosse tuerie. Franchement, c’est pile poil ce que je j’adore en ce moment (je vous conseille d’ailleurs à tous le dernier “Leland” de Francis Harris). Je connaissais pas hein, et donc demandé en cadeau sur tes précieux conseils. Je pense que je pourrais en écrire 100 lignes tellement ce disque m’inspire, mais je vais etre bref : au début, on a l’impression que c’est juste un mec qui s’amuse sur un clavier à la con, et je trouve que le disque évolue de très jolie manière, en passant par pas mal de stade différent. Le type te donne l’impression d’appuyer sur trois touches mais en même temps, il se dégage une telle forme de complexité, complètement dingue… j’adore vraiment. Le type manie les montées en puissance extraordinairement bien. J’ai bcp aimé ce petit côté “SBTRKT” parfois.
Et puisque ca parle de Jacques Greene plue haut, 3 nouvelles pistes sur son soundcloud :
https://soundcloud.com/3024world/jacques-greene-ready
Vraiment une belle découverte. Merci !!!
Porte toi bien
Neska
Neska ==> Cool, ravis que cela te plaise, surtout en achat un peu aveugle !
Perso je ne me lasse toujours pas du disque, la galette que j’écoute le plus actuellement…
Pour Jacques Greene, je n’etais pas du tout au courant, une bonne nouvelle ça ! Je vais écouter ça de ce pas.
dat’
Wooo putaing, quel album ! cohérent, renversant, transportant… et ce finish… !
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