A murmur without a face
Je ne peux décemment pas faire une chronique objective du nouveau Andy Kayes, vu que je me suis chargé des biographies de l’artiste publiée sur son site officiel and co, mais je ne peux néanmoins pas passer sous silence la sortie de ce Alone In Numbers, premier album que j’ai attendu depuis bien longtemps (depuis sa première tape gratos sous le pseudo de Manimal à dire vrai). Le mec qui m’avait foutu des claques sur ses nombreux feat avec les Gourmets (qui eux aussi m’avaient tué avec leur excellent premier album gratos “le plus gourmand des gourmets” il y a un bail… putain ça me rajeunit pas, je l’écoutais tout le temps dans le bus en allant à la fac), avait tracé lentement son chemin à base d’Ep (avec notamment le très bon Invisible, qui installait plus sérieusement Andy Kayes dans le paysage français) pour arriver sur ce premier album en 2012.
On l’a toujours dit, la particularité d’Andy Kayes est de pouvoir rapper autant en anglais qu’en français, mais c’est la langue de Shakespear qui est privilegiée sur ce LP. Les thèmes restent ceux qui sont chers au Mc, tournant autour de la solitude, de la vie quotidienne, de se sentir perdu dans la foule, dans sa bulle. Et comme pour Invisible, les instrues de Alone In Numbers déboitent serieusement. Bonetrips est au sommet de son art, balances des ogives de folie, revenant sur un Hiphop mélodique visant la nuque et le palpitant.
Evidemment, il y a les petites bombes I’m Just a Man (l’instrue mortelle) ou Dreamcatcher qui ont déjà tourné, mais aussi la petite bombe Man Without a Face avec un Copywrite qui brule complètement le morceau. On a même Thavius Beck en guest-star de luxe pour la prod’ de Sandcastles In Concrete, pour une fin d’album assez dingue, avec en point d’orgue Infinite, qui est surement la plus belle instrue du disque.
Ce qui marque le plus dans cet Andy Kayes, c’est ce coté “sans époque” du disque, assez difficile à décrire, avec cette posture intelligente de ne pas lorgner vers le futur (pas de synthés electro qui partent dans tous les sens) ni vers le passé (on est pas non plus dans un boom-bap new generation à la Entourage). Comme si Andy Kayes avait juste voulu nous faire écouter son hiphop, celui qu’il aime, l’intemporel, le brut, sans réellement se soucier de se placer quelque part, dans une mouvance ou un style quelquonque. En cela, et avec la direction musicale prise dans ce disque, Andy Kayes est surement “alone in numbers” dans sa tête et la foule, mais un peu aussi dans le hiphop, en livrant un drole de disque un peu esseulé et unique au milieu des prods d’aujourdhui, tranchant avec les galettes rap que l’on a l’habitude d’écouter ces derniers temps. Et si ce choix d’une direction très personnelle peut avoir des désavantages (pas de morceau révolutionnaire dans le Lp, pas de couverture médiatique parlant du “next big thing”), ce Alone In Numbers en tire aussi sa force : Andy Kayes balance simplement un album super bien foutu et qui fait du bien par sa propension à servir un hiphop qui se fait rare ses derniers temps.
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Meme mouvance, mais autre style, la aussi, pas de chronique mais un rappel, notre label adoré Cooler Than Cucumbers s’apprete à sortir dans l’hexagone le LP Foreshore Reverie du groupe Murmur Breeze, groupe aillant fait son trou depuis quelques années avec son hiphop sombre et experimental, proche des élecubrations Anticon d’antan. Le disque s’était récolté pas mal de bonnes critiques (ici ou là ) et avait percé dans quelques tops 2011 via cet album sorti sur Decorative Stamp, et le groupe était largement present, sous plusieurs entitées (Absurd et James P Honey), dans la gargantuesque compilation gratos filée par le label l’année dernière (toujours téléchargeable). Le Mc de Murmur Breeze, groupe qui a aussi le cul planté entre l’Angleterre et la France, revient avec sa voix grave et son flow nonchalant pour chevaucher des instrues lunaires, sombre et abstract, s’autorisant pas mal d’instruments chelous, comme des cordes poussiéreuses, histoire de renforcer ce coté nauséeux parcourant le disque. Difficile de faire du track par track ou de parler d’un morceau et pas d’un autre, tant le Lp est homogene dans ce coté oppressant et cradingue (musicalement), boue dense s’infiltrant lentement dans les tympans. Disque un peu malade, chapeauté par un James P Honey qui s’autorise un chant au bout du rouleau et ultra nonchalant sur quelques morceaux, pour vite repartir sur un flow mitraillette (Float, clippé, en est le parfait représentant). Le disque oscille entre le folk-hiphop funèbre sans beat pouvant faire penser à un Buck65 sous codéine et rap expérimental qui ferait passer les instrues des solos de DoseOne pour des face-b d’un Katy Perry.
L’identité graphique du groupe, via clips et pochettes, est toujours aussi maitrisée (les artwork et clips sont superbes), et si la musique de Murmur Breeze ne va pas filer la banane au petit déjeuner avant d’aller au boulot, le disque se case obligatoirement lors de longues nuits blanches éclairées passées à boire des bières en compagnie de la seule blafarde lumière de son écran d’ordinateur. Ce Murmur Breeze, c’est un peu comme écouter du Hiphop bien assis dans un micro-onde après avoir avalé une tablette de Dogmatil. Et c’est drôlement agréable.
http://ctcrecords.bandcamp.com/album/foreshore-reverie-vinyl-edition
Reverbère Records & Cooler Than Cucumbers
Dat’
This entry was posted on Thursday, March 22nd, 2012 at 11:31 pm and is filed under Chroniques. You can follow any responses to this entry through the RSS 2.0 feed. You can leave a response, or trackback from your own site.
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J’écouterai ASAP. En attendant, la typo sur l’album a l’air d’être la même que celle qu’utilise Made to Play, juste pour l’anecdote xd
( http://madetoplay.net/ )
je viens d’acquérir le Andy Kayes,
c’est juste une tuerie. Il faut absolument que je le fasse écouter à tout le monde. Tous les morceaux sont énormes. Ca faisait longtemps que j’avais pas écouté un truc dont la qualité est aussi constante.
Bon je vous laisse, il faut que j’aille réécouter “Man without a face” quatre ou cinq fois…