We need a resolution





Air, c’est un peu le groupe français de l’électronique, avec Daft Punk. Tout le monde connait plus ou moins le duo, peut être même plus à l’étranger quand dans l’hexagone…
Ces deux versaillais ont, pour beaucoup d’amateurs de musique electro, été une sorte de “fil rouge” dans leurs oreilles, parsemant les dix dernières années avec plus d’une demi-douzaine de galettes, cultes pour certaines, comme le classique “Moon Safari”, la BO du film “Virgin Suicides” ou le gros succès “Talkie Walkie”.
Pour ma part, c’est le trop mésestimé “10.000 HZ Legend”, véritable chef d’oeuvre de folie et d’inventivité, qui marqua à jamais mes pauvres petits tympans meurtris par la musique…

Reste qu’après un “Walkie Talkie” totalement dénué de prise de risque et un gros travail de production sur le “5:55” de Charlotte Gainsbourg cette année, l’arrivé du “Pocket Symphony” ne pouvait laisser personne indifférent, surtout quand les communiqués officiels l’annonçait comme gorgé de sonorités traditionnelles japonaises… (Koto, instrument d’une beauté absolue, et Shamisen précisément)










Air a toujours incarné une certaine classe, une retenue dans leur musique comme dans leurs apparitions, tout en distillant leurs sons comme des joailliers s’occuperaient de leurs bijoux. En cela, la pochette, magnifique, est sûrement la plus représentative et la plus réussie des parure que le groupe a pu arborer jusqu’à lors.

Mais l’appréhension ne peut être effacée, tant un “Walkie Talkie” m’avait profondément peiné, même en restant un tres bon disque, car complètement amputé de folie, de changements de rythmes, d’évolutions au sein d’une même chanson. Le disque était loin d’être raté, mais laissait clairement un arrière goût de gâchis, de timidité voir de fainéantise inconsciente.

Et ce phénomène est malheureusement, autant l’annoncer tout de go, exacerbé comme jamais sur ce “Pocket Symphony”.
Tout ne commence pourtant pas si mal, avec un Space Maker franchement agréable, presque ambiant, construit comme une lente montée où différents instruments s’y grefferaient peu à peu. Le son est d’une incroyable pureté (presque pas étonnant venant de Air, arrivant à faire de véritables diamants sonores d’un simple point de vu technique), aidant à vous vous laisser importer avec un plaisir non feint.






Le probleme de “Pocket Symphony” pourrait être illustré avec le single du disque, Once Upon A Time. Pop song sans grande saveur, plate au possible, sans aspérité, intensité ni volonté d’étonner, elle glisse parfaitement sur vos oreilles comme une saucisse sur sa choucroute, creusant le sillon du “rapidement écoutée / rapidement oubliée”. L’utilisation du shamisen y est plus que sommaire, voir indétectable lors d’une écoute distraite. C’est beau, oui. Mais c’est loin d’être marquant.
Le grief est lâché. Et je serais presque tenté de vous dire de prendre ce petit paragraphe et de l’appliquer au reste du disque, tant il pourrait lui saillir à merveille. Hop fini on remballe l’article, c’était rapide et point fatiguant.

Mais cela serait trop facile, peu intéressant pour vous et franchement désavantageux pour moi, vu que ma maison d’édition me paye à la ligne.
Et surtout, (seule raison valable) ce serait passer outre quelques morceaux agréables errants dans l’album.






Tenez, prenons ce One Hell Of A Party, avec en featuring LE Jarvis Cocker.
L’instrue est vraiment belle, avec ses sonorités japonaises bien présentes, et la voix grave et soutenue, comme à l’accoutumée avec Mr Jarvis. L’ambiance ne décolle jamais vraiment, mais le morceau n’en reste néanmoins plutôt réussi, si l’on excepte ces tintements façon SNCF “Tuuuududu-le-train-en-direction-de-paris-fera-son-créneau-voie-4” en conclusion de piste.

Et la première vraie surprise du disque viendra avec Napalm Love, et son rythme Pop-electro des grands jours, ou Air semble enfin se lâcher un peu dans la production comme dans le chant. Les petits sons crades et les vagues de synthé zébrant la piste sont distillés de main de maître. Une des réussites de l’album, sans hésitation, resplendissant d’autant plus dans l’univers trop carré de ce Pocket Symphony.






Mais la mode est aux coups derrière la nuque, et Air, sur la piste précédente, nous ravit pour mieux nous avilir la seconde d’après. Il suffit de se pencher sur le triptyque Mayfair song, Left Bank et Photograph, d’une austérité à faire pâlir Steven Seagal.
Aucune évolution, aucune surprise, aucun moment vous pétrissant le coeur par sa beauté. Tout reste trop tranquille, trop avachit, trop avare en sentiments. Alors certes, et comme dans toutes les productions présentes sur la galette, la qualité de son est parfaite. Mais ces trois chansons pourraient être les hymnes du pays de Morphée pour la prochaine coupe du monde du sommeil.

A coté, même le 5:55 de Charlotte Gainsbourg ressemble à une Rave Party hystérique au WOMB…






Bien heureusement, on relèvera le menton pour la trop courte mais excellente Mer du Japon, enlevée, joyeuse, avec ses synthés reconnaissables entre mille tout droit ressortis de “Moon Safari”, et son break bien mortel au Shamisen. La seule diatribe récitée, “Je perds la raison, dans la mer du Japon”, reste dans la tête, pour le deuxième gros coup du disque. Personnellement, j’en verrais bien une version un peu plus breakée, avec un rythme un peu plus appuyé et accidenté… On va guetter les Remix avec curiosité, sait on jamais.

A part ça? Les 4 titres finaux ne s’en sortent pas franchement mieux que le triptyque du xanax vu plus haut. Seul Night Sight se sort du bourbier sur les deux jambes, avec son ambiance Beatles, et sa fin assez hypnotisant. Pas de quoi sauter en l’air non plus, à notre grand désarroi.








On se retrouve au final avec un album presque nécrosé sur lui même, n’explorant aucune faille véritable, se contentant d’aligner des pistes sans surprise, sans grande saveur. Que de regrets quand il suffisait d’écouter les premiers essais du groupe pour ressentir un enchantement incessant, pour se sentir partir en jet vers les nuages. De côtoyer les étoiles avec “Premiers Symptomes” ou “Moon Safari”. D’être constamment étonné et charmé par la frénésie et l’inventivité de “10.000 hz Legend”, filant presque le vertige.
Même le semi-morne “Talkie Walkie”, comportant malgré tout quelques grands moments de bravoures, semble fascinant et rayonnant comme jamais face à ce “Pocket Symphony”.


Même sans se retourner sur le passé (chose que l’on reproche toujours, avec des pamphlets assurant qu’il faut prendre un disque en tant que tel, sans faire de liaison avec ses prédécesseurs), ce nouveau disque peine à convaincre, restant bien trop souvent dans sa coquille soyeuse, ne faisant aucun effort pour nous surprendre et nous étonner. Pire, il ne laisse pas de souvenir impérissable après écoute. Sans oublier au final une présence des instruments japonais extrêmement discrète, voir imperceptible sur certains morceaux. (Bon, ils auront le mérite de ne pas s’être jeté dans la mêlasse “j’utilise le shamisen pour tout est n’importe quoi », et c’est tout à leur honneur… Mais un concept album japonisant aurait pu être une alternative séduisante…)
Le tout ne donne même pas la motivation d’aller creuser le contenu supplémentaire du disque « Opendisc », tant on est déjà embarrassé avec le Cd en lui-même, surtout dans l’avalanche de sorties de ce mois de Mars.






Alors que dire?

Qu’à part incarner la preuve noir sur blanc de la déliquescence du son Air depuis “Talkie walkie”, “Pocket Symphony” pourra à la rigueur trouver son intérêt dans un gigantesque “Où est Charlie?”, avec un shamisen et un koto pour remplacer le bonhomme rouge et blanc au regard aussi perçant qu’un Footix sous Prozac…





Certes, je suis médisant… Les titres Space Maker, One Hell Of A Party, Napalm Love ou Mer Du Japon valent franchement le coup d’oreille…

Ce qui aurait pu faire un excellent maxi….








“Once Upon a time” – Air





Dat’
12 titres – Virgin

This entry was posted on Tuesday, March 6th, 2007 at 8:53 pm and is filed under Chroniques. You can follow any responses to this entry through the RSS 2.0 feed. You can leave a response, or trackback from your own site.